Des consignes données aux disciples pour son entrée triomphale à Jérusalem jusqu’à celles données pour préparer la Pâque, Jésus se révèle maître des événements. Il conduit les choses. Tout au long du récit de la Passion que nous entendons le jour des Rameaux, Jésus ne subit pas plus les événements. Il connaît le cœur de l’homme. Il sait de quoi il est capable. Il sait qu’il va être renié, livré, abandonné des siens. Il sait que son heure est proche. Alors que des sentiments de haine et de violence, d’aigreur et de jalousie habitent le cœur des soldats et des autorités religieuses, Jésus lui, garde son calme, souvent même, demeure dans le silence.
Il ne s’est pas dérobé
Une paix semble habiter son cœur. "Et moi, je ne me suis pas révolté, je ne me suis pas dérobé. J’ai présenté mon dos à ceux qui me frappaient, et mes joues à ceux qui m’arrachaient la barbe. Je n’ai pas caché ma face devant les outrages et les crachats "(Is 50, 5-6). Car "le Seigneur mon Dieu vient à mon secours "(v. 7). Cette parole dans le livre d’Isaïe fait penser à cette parole du psaume 55, 5 : "Sur Dieu dont j'exalte la parole, sur Dieu, je prends appui : plus rien ne me fait peur ! Que peuvent sur moi des êtres de chair ?" Et nous comprenons alors ce qui donne à Jésus et cette paix et cette sérénité et cette confiance, même dans l’épreuve et la souffrance. Le cœur de Jésus est tourné vers son Père, demeurant ainsi dans les mains de son Père, abandonné en Lui pour que, selon saint Benoît dans sa Règle (chap. 73, 9), "sous la garde de Dieu, tu parviendras". "Plus rien ne me fait peur !"
Mais pour demeurer ainsi en ces heures les plus sombres, il faut s’y être préparé. Pas d’improvisation chez Jésus. Ce cœur abandonné et confiant, serein et paisible en toute circonstance même dans les plus éprouvante a été préparé dès le début de son existence, et bien plus même, dès avant sa naissance. La vie du Christ s’est avancée sur un chemin d’humilité, de don de soi, et de prière.
Au cœur de l’épreuve
L’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem se fait ainsi sur un âne. "Voici ton roi qui vient à toi : il est juste et victorieux, pauvre et monté sur un âne" (Za 9, 9). L’image est parlante. Tel est le roi qui se présente à la foule qui l’acclame. Saint Paul dans sa lettre aux Philippiens nous le présente ainsi : "Le Christ Jésus, ayant la condition de Dieu, ne retint pas jalousement le rang qui l’égalait à Dieu. Mais il s’est anéanti, prenant la condition de serviteur" (Ph 2, 6). Il ne faut avoir plus rien à revendiquer en effet pour accueillir paisiblement ce qui vient, même l’impossible et l’impensable. L’humble est celui qui, parce qu’il a appris à vivre sous le regard de Dieu, dans les mains de Dieu, en toute circonstance, ne se soucie plus du regard des autres ni de leur agissement, ni de leur jugement pas plus des conditions dans lesquelles il se trouve. L’humilité préserve l’homme du repli sur soi, du découragement, du désespoir et le garde dans la paix. "Dans la paix moi aussi, je me couche et je dors, car tu me donnes d'habiter, Seigneur, seul, dans la confiance" (Ps 4, 9).
Au cœur même de l’épreuve, il choisit d’aimer. Il choisit résolument ce chemin du don de lui-même coûte que coûte.
Dans le récit de la Passion de Jésus, alors même que le drame est avancé, que "les dés sont jetés", Jésus encore une fois ne se dérobe pas. Il aurait pu fuir l’épreuve annoncée, se protéger, se préserver. C’est le contraire que nous voyons. À table avec ses disciples, il choisit de se donner jusqu’au bout. "Prenez, ceci est mon corps" (Mc 14, 22). Quoi de plus bouleversant ! Au cœur même de l’épreuve, il choisit d’aimer. Il choisit résolument ce chemin du don de lui-même coûte que coûte. Car," il n’y a pas de crainte dans l’amour, l’amour parfait bannit la crainte"(1 Jn 4, 18). Et celui qui aime a déjà franchi la mort.
L’abandon à Dieu
Enfin, sur ce chemin que le Christ nous propose, il y a ce moment au jardin de Gethsémani où Jésus se retire en prière avec trois de ses disciples. Cette prière est pour lui le lieu pour dire son angoisse, sa peine et sa tristesse à Dieu son Père. Se confier ainsi à Dieu est toujours libérant. C’est le lieu, dit-il à ses amis, pour ne pas entrer en tentation, pour ne pas faillir dans l’épreuve, pour ne pas perdre courage dans la détresse. C’est le lieu d’un abandon confiant à la volonté du Père.
Uni au Christ, c’est le chemin de la victoire assurée contre toute sorte de mal.
Frères et sœurs, nous avons raison aujourd’hui d’acclamer notre roi. Car il est celui qui nous ouvre le chemin de la vie qui ne se laisse pas déstabiliser, désorienter, décourager par les épreuves et les difficultés. Nous en traversons tous, et souvent, nous cherchons des réponses, des solutions pour mieux les vivre. Le Christ est la réponse, "il n’y en a pas d’autre" (Is 45, 5), pour que nous trouvions la paix et le repos. Nous aussi, suivons-le en ce jour, sur ce chemin de l’humilité, de la prière confiante et de l’amour offert jusqu’au bout. Uni au Christ, c’est le chemin de la victoire assurée contre toute sorte de mal. "Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! Béni soit le Règne qui vient […] Hosanna au plus haut des cieux ! "(Mc 11, 10.)
Pratique