Historien, écrivain, journaliste, intellectuel de gauche, Jacques Julliard est décédé ce vendredi 8 septembre à l'âge de 90 ans. Né en 1933 à Brénod dans l'Ain, son père, maire du village, était un farouche républicain agnostique alors que sa mère était une fervente catholique. Ce qui fait que le jeune Jacques fut bercé dans ces deux univers qu'il ne renia jamais. Enfant pendant la guerre, il a raconté souvent avoir eu "la peur physique" des Allemands et pourtant son père, résistant, lui donnera la plus belle des leçons de pardon, quant à la libération, il demandera la grâce de celui qui l'avait dénoncé. "Vois-tu, il faut toujours pardonner", lui dira-t-il.
En 1954, il intègre l'école Normale Supérieure où il rencontre sa femme Suzanne, qu'il épouse en 1957, et formera avec elle un ménage heureux et uni de plus de soixante années de mariage. Figure intellectuelle et catholique de gauche, il s'engage à l'UNEF et écrit pour la revue Esprit puis pour le Nouvel Observateur. Dans les années 70, il est associé avec Michel Rocard à la "deuxième gauche", puis sera proche "littérairement" de François Mitterrand. Après plus de trente ans au Nouvel Obs, il rejoint comme éditorialiste et chroniqueur le magazine Marianne en 2010 puis Le Figaro en 2017.
Le Christ est la vérité elle-même
De ses milliers de chroniques ou encore sa trentaine d'ouvrages, on retrouve au fil des années des témoignages de sa foi ou plutôt de sa relation au Christ, même s'il avoue ne pas pratiquer. Ainsi il écrira, "la personne de Jésus, le message du Christ sont pour moi la seule chose infiniment respectable sur cette Terre, au point que je comprends Dostoïevski lorsqu'il affirme que s'il avait à choisir entre la vérité et le Christ, c'est le Christ qu'il choisirait, parce que, à ses yeux, sa personne et ses paroles s'identifient à la vérité elle-même".
Lui l'humaniste, fervent défenseur de la laïcité et intellectuel ayant porté une voix ces cinquante dernières années dans le débat politique français, n'a pas hésité à affirmer: "A mes yeux, l’Évangile est la seule force révolutionnaire dans le monde, la seule forme de résistance à ce que je déteste le plus dans notre société : l’utilitarisme, le primat de l’argent… Je ne suis pas pratiquant, mais plus je vais, plus ma seule ligne intellectuelle et morale, c’est l’enseignement de Jésus-Christ. » Souhaitons qu'il retrouve enfin son berger qui l'a guidé pendant toute cette vie terrestre.