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La trêve olympique aura-t-elle lieu ?

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Michel Cool - publié le 27/07/24
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Traditionnellement, la trêve olympique est une période de paix qui invite à l'arrêt des conflits durant les Jeux. En sera-t-il ainsi cette année, demande notre chroniqueur Michel Cool ? À défaut de réussir, tentons au moins, chacun d’entre nous, de faire triompher l’esprit de paix.

La trêve olympique aura-t-elle lieu ? Elle est vivement souhaitée par le Pape, par le président de la République et par les organisateurs des Jeux à Paris qui vont concentrer, durant tout l’été, les yeux de la planète sur notre Hexagone. Ces autorités civiles et religieuses, par ailleurs confrontées elles-mêmes dans leurs différentes responsabilités, aux affres de la discorde, de la contestation et de l’insécurité, appellent donc au calme général et à la ferveur collective en brandissant bien haut les principes amicaux et pacifiques de l’olympisme. 

La guerre dans la bande de Gaza connaîtra-t-elle un répit ? L’agression militaire de la Russie contre l’Ukraine marquera-t-elle le pas ? Tous les autres foyers de conflits dans le monde baisseront-ils d’intensité durant les JO de Paris ? Rien n’est moins sûr. De même, la mobilisation considérable de moyens policiers et de sécurité pour assurer la protection des athlètes et des spectateurs montre combien plane sur cette méga-manifestation sportive d’importants risques d’attentats et de troubles. L’attaque massive perpétrée le matin même du jour de l’ouverture des JO et visant à paralyser le réseau TGV de la SNCF n’est pour le moins pas rassurant sur l’atmosphère entourant cet événement préparé depuis sept ans avec obstination et enthousiasme. Réclamer une trêve est-elle donc un vœu pieux ? Autrement dit, une illusion, un espoir impossible ?

L’histoire de la "trêve"

Mais au fond qu’est-ce qu’une trêve ? Je suis allé consulter un dictionnaire étymologique pour approfondir le sens de ce mot. Il tient son origine au XIIe siècle du francique "treuwa" qui signifie contrat, traité, convention. Dans le latin médiéval, on trouve également l’expression "trewa dei", c’est-à-dire, la trêve de Dieu. Cette période interdisant toute hostilité entre les seigneurs était décrétée par l’Église catholique du mercredi soir au lundi matin durant les temps de jeûne qui séquençaient alors le calendrier liturgique (Avent, Noël, Carême et Pâques). Le mot trêve (écrit alors "trève" avec un è), que nous connaissons aujourd’hui dans son acception de cessation temporaire des conflits, entre dans le dictionnaire en 1740. Mais il ne s’orthographie avec un "ê" qu’en 1798 avec la bénédiction de l’Académie française. Les mots n’ont pas seulement une histoire, mais ils peuvent faire l’Histoire. Ainsi l’apparition de l’expression "trêve des confiseurs" dans le langage courant n’est-elle pas sans rapport avec la consolidation de la République dans notre pays.

Une trêve, même fragile et provisoire, peut faire avancer un schmilblick compliqué. Une trêve peut même ressembler à une hirondelle et annoncer le printemps !

Elle a en effet émergé en décembre 1874 dans le contexte distendu par les débats politiques entre députés républicains, monarchistes et bonapartistes qui se disputaient sur la constitution à donner à la France. Ces discussions passionnées furent ajournées, si l’on en croit un article de La Grande Encyclopédie de Marcellin Berthelot, scientifique reconnu, par crainte de nuire au commerce parisien dont l’activité dépendait en particulier des parlementaires et de leur pouvoir d’achat. Les élus de la Nation s’accordèrent alors un "repos" allant de Noël au 1er de l’An qu’on nomma "la trêve des confiseurs". 

Les débats parlementaires reprirent ensuite et le 30 janvier 1875, la Chambre des députés adopta l’amendement historique d’Henri Wallon instaurant l’élection du président de la République pour sept ans par les deux chambres réunies en Assemblée nationale. Le vote de cet amendement permit la fondation de la IIIe République. Qui sait si cette "trêve des confiseurs" n’aura pas aidé les esprits parlementaires à cheminer et à voter pour la République à une toute petite voix de majorité ? Une trêve, même fragile et provisoire, peut faire avancer un schmilblick compliqué. Une trêve peut même ressembler à une hirondelle et annoncer le printemps !

L’esprit de paix

Le 26 juillet 2017, sept ans jour pour jour avant l’ouverture des JO à Paris, un hommage national avait été rendu au père Jacques Hamel à Saint-Étienne-du-Rouvray en Normandie. Pour ce premier anniversaire de l’assassinat du prêtre par un terroriste, le président de la République avait fait le déplacement. Après la messe, l’église s’étant vidée, les journalistes et les photographes s’étant esquivés, le président s’était longuement arrêté devant le livre d’or paroissial et y avait rédigé à la main un message. On pouvait y lire notamment cette phrase dédiée au Père Hamel : "Vous avez fait triompher l’esprit de paix en faisant vivre vos valeurs." N’est-ce pas là un programme de vie internationale, nationale et personnelle qui est formulé ? Il s’agit d’essayer bon an mal an, mais d’essayer quand même, qui que nous soyons, croyants ou non, où que nous soyons, d’ici ou d’ailleurs, chacune et chacun à sa mesure et selon ses possibilités, de faire triompher l’esprit de paix, en faisant vivre ses valeurs.

Si donc on essayait, au moins pendant la durée de la trêve olympique, de rengainer nos rancœurs et nos ressentiments, toutes nos étroitesses d’esprit, tous nos partis pris, jamais dénués d’esprit de règlement de compte, de procès d’intention, pour au contraire déployer la flamme de l’olympisme à nos fenêtres et offrir au monde qui participe à ces Jeux et qui nous observe, ce que nous avons de meilleur au fond de notre cœur ? Cette trêve pourrait alors, peut-être, faire se lever un printemps...

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