En approchant du gymnase paroissial de l'église Saint-Joseph à Maplewood, dans le New Jersey, pas besoin de tendre l'oreille pour entendre les ballons de basket rebondissants et les cris de joie. De l'extérieur, cela ressemble à un entraînement de basket-ball régulier, mais la scène dans le gymnase est pour le moins atypique : de jeunes adultes atteints d'autisme profond dribblent et lancent des tirs sur les paniers, sous la surveillance amicale d'élèves du secondaire et de quelques surveillants adultes. Dans ce gymnase, il règne une atmosphère de joie palpable.
Ouverte en 2022, cette clinique de basket-ball est l'initiative d’une paroissienne, Mary Beth Walsh, qui souhaitaient que son fils Ben puisse avoir accès à certaines choses qui lui manquaient à cause de son autisme. Il avait besoin d’interactions sociales régulières, de travailler le sens de l’orientation et de s'amuser. Mary Beth a alors pensé au basket comme solution pour son fils. Elle téléphone à un ami, Gerry O'Connor, qui dirige les programmes sportifs pour les jeunes de la paroisse, et lui propose son idée.
"Nous verrons comment ça marche"
Au début, Gerry hésite. "Je ne suis pas allé à l'école pour faire de l'éducation spécialisée", explique-t-il. Collecteur de fonds professionnel de jour, il n’avait aucune expérience de travail avec des personnes atteintes du spectre autistique. Gerry répond à Mary Beth qu'il n'a aucune idée de la manière d'exécuter le genre de programme qu'elle propose. "Vous vous chargez d'obtenir des entraîneurs", lui rétorque Marie Beth. "J'amènerai quelques joueurs et nous verrons comment ça fonctionne."
Et jusqu'à présent, cela fonctionne plutôt bien. Aujourd'hui, environ douze jeunes hommes et femmes atteints d'autisme profond participent régulièrement à la clinique de basket-ball de Saint-Joseph. Ils se rassemblent pendant huit semaines à chaque printemps et chaque automne. Du fait de leur condition, les activités restent simples. Pendant une heure, les participants reçoivent un enseignement individuel de basket-ball et participent à des exercices de groupe qui mettent l'accent sur les principes fondamentaux tels que les passes, les dribbles et les tirs. Gerry et ses entraîneurs ont appris sur le tas, identifiant les besoins individuels de chaque joueur et trouvant ce qui fonctionne pour eux. Par exemple, certains participants préfèrent tirer des paniers pendant toute une heure et ce n'est pas grave. Les entraîneurs rencontrent les joueurs là où ils se trouvent et sont toujours très compréhensifs et encourageants.
Un environnement accueillant
"Tous les entraîneurs, tous les bénévoles acceptent", assure Pat Miller, dont le fils John fréquente la clinique depuis le début. Comme les autres participants, John souffre d' autisme profond , ce qui signifie qu'il est confronté à des défis cognitifs et que ses compétences linguistiques sont limitées. Pat est impressionnée par la façon dont les bénévoles, qui n'ont aucune expérience professionnelle préalable avec des adultes autistes, sont capables de dialoguer avec son fils. "Ils travaillent avec lui, ils imitent, ils lui montrent quoi faire, ils le félicitent quand il fait les choses correctement", se réjouit-il. "Et ils prennent vraiment le temps de connaître chaque joueur individuellement pour s'assurer qu'ils réussissent à l'entraînement. C'est une chose passionnante parce que tout ce que nos fils et nos filles veulent, c'est pouvoir faire partie de quelque chose." Stephanie Fritsch, qui amène son fils Jackson, âgé de 24 ans, à la clinique, est d'accord. "De nombreuses personnes autistes sont maintenues assez isolées pendant leurs années d’études", explique-t-elle. "Ils travaillent en tête-à-tête avec les gens et n’ont jamais vraiment l’occasion de faire partie d’une expérience de groupe, comme le font la plupart des jeunes typiques."
Elle conduit une demi-heure aux heures de pointe pour amener son fils à Saint-Joseph. D'autres parents font plus d'une heure de route, mais ils pensent tous que cela en vaut la peine. "Il y a un besoin désespéré de programmes destinés aux adultes à partir de 21 ans", affirme Stéphanie. "Les programmes disparaissent ou deviennent des programmes auxquels les personnes atteintes d'autisme profond ne peuvent pas participer, comme des soirées sociales, où les gens discutent et prennent un café. Cela ne fonctionne pas pour la majorité des personnes du spectre, nous allons donc aller chercher très loin. Cela devient fatigant, mais je ne peux pas vous dire à quel point c'est bon de rester ici et de regarder mon fils."
Une excellente occasion
Alexis, 30 ans, est rayonnante lorsqu'elle parle de sa participation à la clinique. "J'aime beaucoup cet endroit", s'exclame-t-elle. "J'aime jouer avec mes autres amis et passer un bon moment." Triste que la saison en cours soit terminée, elle attend désormais avec impatience la session d'automne.Paul, un autre participant, informe que c'était sa première saison dans le programme et qu'il reviendra certainement. "C'est une excellente occasion pour moi de sortir, de socialiser et de jouer au basket-ball", assure-t-il. Tout comme les joueurs, les entraîneurs adultes et les adolescents bénévoles apprécient le temps passé à la clinique. Simon, un lycéen, avoue qu'il était "stressé" lorsqu'il s'est porté volontaire pour la première fois, ne sachant pas à quoi s'attendre. Mais l'adolescent a été agréablement surpris. "Quand vous jouez sur le terrain avec ces gars-là, vous voyez à quel point ils aiment vraiment ça", raconte-t-il. "Et c’est quelque chose d’inattendu, mais génial".
Gerry O'Connor le dit très simplement : "C'est la chose la plus gratifiante que j'ai jamais faite en 35 ans de coaching." Lui et Mary Beth Walsh espèrent que ce qui se passe à Saint-Joseph inspirera d'autres programmes similaires destinés aux jeunes adultes atteints de spectre autistique. L'archidiocèse de Newark a pris aussi note de cette situation. "D'autres paroisses devraient suivre l'exemple de Saint-Joseph", a déclaré le Dr Anne Masters, directrice du Bureau archidiocésain de la pastorale des personnes handicapées. Le Dr Masters a souligné que de nombreux autres types d'activités pourraient être mis à profit pour amener les personnes handicapées à s'engager auprès des autres. "Il existe d'autres bonnes idées d'intérêts communs pour les jeunes adultes avec et sans handicap, comme la musique, les jeux, le codage, le dessin, les trains miniatures", détaille-t-elle.
Pizzas et trophées
Comme il s'agit de la dernière soirée de la clinique printanière, Gerry a une surprise pour ses joueurs. Une table de trophées et des piles de pizzas ont été sorties. En regardant les entraîneurs remettre leurs prix à chacun des participants sous les applaudissements de leurs parents, il semble que la plus grande valeur du programme réside peut-être dans les liens d'amitié qu'il a tissés avec tous. Mais l'un des pères qui regarde la scène a une opinion légèrement différente. "Du basket, des pizzas et des trophées, on ne peut pas faire mieux !" Paul, Ben, Alexis, John, Jackson et tous leurs amis seraient certainement d'accord.