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Fin de vie : les conditions d’accès à “l’aide à mourir” se précisent

FRANCE - POLITICS - ELYSEE - EXIT - COUNCIL - MINISTERS

Catherine Vautrin, ministre de la Santé, après le Conseil des ministres du 10 avril 2024.

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Cécile Séveirac - publié le 10/04/24
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Le texte sur la fin de vie légalisant à la fois suicide assisté et euthanasie a été présenté ce mercredi 10 avril en Conseil des ministres. Entré avec 14 articles, le nouveau projet de loi en sort avec 36.

La machine législative est donc officiellement lancée : présenté ce mercredi 10 avril en Conseil des ministres, le projet de loi sur la fin de vie entame son itinéraire parlementaire. "C'est maintenant le début d'un débat parlementaire indispensable pour un texte, bien évidemment, qui va nécessiter énormément d'écoute, énormément d'humilité quand on touche à la vie et à la mort et énormément de respect de la liberté de conscience de chacune et chacun d'entre nous", a souligné Catherine Vautrin, ministre de la Santé, au sortir du Conseil des ministres.

Le texte, examiné par le Conseil d'Etat début avril, comporte un total de 36 articles, contre 14 initialement. Sans utiliser les termes "suicide assisté" et "euthanasie", cachés sous la benoîte formule "aide médicale à mourir", ce sont pourtant bien ces deux procédés qui seront autorisés par la nouvelle législation. Alors qu'une première mouture du texte avait été dévoilée en décembre 2023, Emmanuel Macron a lui-même précisé les contours du projet de loi dans un entretien à La Croix, en mars 2024, le décrivant comme un texte d'équilibre comportant "des conditions strictes".

Discernement, souffrance intolérable...

Ces conditions ont été confirmées par la ministre de la Santé qui a énuméré l'ensemble des critères devant être réunis pour prétendre à l'aide à mourir. Ainsi, l'administration d'une "substance létale" ne sera possible que "pour les personnes majeures", françaises ou résidant en France. A cela, il faut ajouter "trois conditions qui feront l'objet d'un examen par un médecin ": premièrement, souffrir d'une "affection grave et incurable engageant son pronostic vital à court ou moyen terme". La ministre de la Santé a précisé les délais auxquels renvoie la mention "court et moyen terme", donnant la définition de la Haute Autorité de Santé selon laquelle "court terme" équivaut à "quelques jours ou quelques semaines" de vie, là ou "moyen terme" équivaut à six à douze mois.

Deuxièmement, il faudra "souffrir d'une douleur insupportable et réfractaire au traitement". Enfin, le patient devra "être en capacité d'exprimer sa demande de façon libre et éclairée". C'est le patient uniquement qui fera la demande d'aide médicale à mourir à un médecin. Ce dernier devra prendre seul sa décision en ayant simplement pris l'avis d'un autre médecin ainsi que d'un infirmier avant de rendre sa réponse. S'il est admis que le patient répond aux cinq critères cumulatifs, le patient "réitèrera ou non sa demande d'aide à mourir", et "à tous les stades de la demande, on vérifiera que le patient a bien demandé". Il se verra alors prescrire le "produit létal" qui sera, précise Catherine Vautrin, valable pour une durée de trois mois. C'est le patient lui-même qui se l'administrera, sauf s'il n'est pas en état de le faire, auquel cas il pourra désigner un proche.

Des réactions dissonantes

Si l'Association pour le Droit à Mourir dans la Dignité (ADMD) se réjouit de cette "avancée" vers un "nouveau droit", nombreuses sont les voix qui continuent de dénoncer une réforme sociétale dangereuse, à commencer par l'Eglise catholique. La Conférence des évêques de France (CEF) a ainsi annoncé avant le Conseil des ministres la nomination de quatre évêques porte-parole sur le thème particulier de la fin de vie : Mgr Matthieu Rougé, évêque de Nanterre, Mgr Emmanuel Gobilliard, évêque de Digne, Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours, ou encore Mgr Pierre-Antoine Bozo, évêque de Limoges. Pour ce dernier, ce projet de loi signe un "glissement progressif vers une autonomie absolue dans le choix de vivre ou de ne pas vivre. Cette loi va fragiliser considérablement la société, déclare-t-il à Aleteia, car elle pousse tout le monde à se poser une question que nul ne se posait avant : faut-il ou non continuer à vivre ? C'est une mise en danger très grave du bien commun."

"Cette loi dit implicitement aux plus fragiles que l'on n'a pas besoin d'eux, qu'ils sont un poids pour la société et que leur fragilité leur fait perdre leur dignité", abonde Mgr Gobilliard entre deux tournées dans les EHPAD de son diocèse. "Je leur dis l'inverse : leur fragilité est rédemptrice. C'est dans l'ultime souffrance qu'il a vécue, cloué sur la Croix, que le Christ a été fécond" poursuit l'évêque de Digne en plaidant pour un meilleur accompagnement des malades, notamment par les soins palliatifs. Le développement de ces soins constitue le premier volet du projet de loi, ce qui risque de mener à de graves cas de conscience pour les parlementaires, alerte Mgr Bozo. "Mélanger euthanasie et soins palliatifs dans un même projet de loi est problématique, car en voulant voter pour améliorer les seconds, les députés et sénateurs devront aussi dire oui à l'aide médicale à mourir", relève l'évêque.

Ce projet de loi doit être accompagné d'une stratégie décennale pour les soins palliatifs, abordée par Catherine Vautrin dans les colonnes du Monde. Le gouvernement veut notamment attribuer aux "soins d'accompagnement" une enveloppe de 1.1 milliard d'euros supplémentaires pour les dix prochaines années, afin d'augmenter l'accès aux soins palliatifs dont sont privés à ce jour 20 départements. Le projet de loi doit être examiné en séance publique à l'Assemblée nationale à partir du 27 mai, deux semaines avant les élections européennes.

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