Selon la tradition provençale, Marthe s’est installée aux Saintes-Maries-de-la-Mer avec sa fratrie et d’autres disciples. C’est elle qui aurait fondé la première communauté chrétienne de Tarascon, vers l’an 50. Au-dessus de l’emplacement supposé du tombeau de Marthe, une collégiale royale a été édifiée et porte son nom.
Parmi les récits que la tradition rapporte, à prendre donc avec d’infinies précautions, la sainte aurait vaincu la Tarasque, qui terrorisait la population de Tarascon. La Tarasque ? Jacques de Voragine, l’auteur de "La légende dorée", évoque à son sujet un "dragon, mi-animal, mi-poisson, plus gros qu’un bœuf, plus long qu’un cheval, avec des dents aigües comme des cornes, et de grandes ailes aux deux côtés du corps ; et ce monstre tuait tous les passagers et submergeait les bateaux".
Marthe lui jeta de l’eau bénite et lui montra la croix. Le monstre devint doux comme un agneau, la sainte lui passa sa ceinture autour du cou. Conduite au village voisin, la Tarasque fut tuée par les habitants à coups de pierre et de lance. Grâce à Marthe, la région est définitivement débarrassée de la terrible créature. Marthe devient la protectrice de la ville. Et depuis des siècles, des fêtes et processions rappellent son intervention pour débarrasser la ville du dragon.
Des commandes pour honorer Sainte Marthe
La ville se devait d’honorer celle qui la protégeait. Le père Chérubin de Noves, général de l’Ordre des capucins avait été envoyé au début du XVIIIe auprès du pape Clément XIV, à Rome. Il y fit peindre des tableaux de grande dimension destinés à orner l’église du couvent de Tarascon. Tous racontent l’histoire de Sainte Marthe. Deux sont commandés à Carle Van Loo, dont celui qui rapporte l’épisode de la Tarasque.
En 1730, date de la commande, Carle Van Loo était alors à Rome où il a effectué plusieurs longs séjours. Il peint cette grande huile sur toile (230 cm par 140 cm) sous le titre "Marthe domptant la Tarasque". L’œuvre est envoyée au couvent des capucins. On y voit une Marthe pleine de douceur faire face à une créature enragée que rien ne permet d’identifier. Pour la maîtriser, la sainte a pour seules armes la croix et l’eau bénite.
Les conditions dans lesquelles le tableau se retrouve maintenant, avec les autres toiles de la même série, dans la collégiale royale de Tarascon ne sont pas précisées. Le vent de l’histoire, des péripéties lors de la Révolution… Peut-être était-ce tout simplement car il a semblé que l’histoire de Sainte Marthe devait avoir une place privilégiée dans l’église qui lui est consacrée.