La loi de la charité est une ouverture qui suscite le changement et l’engagement dans le partage et le service. « S’approcher du lointain pour en faire son prochain, c’est accueillir le signe de l’infini qui nous rejoint. »Que faut-il faire pour avoir en héritage la vie éternelle ? Interroge le docteur de la loi qui la connaît par cœur, sans qu’elle ait touché son cœur. La réponse de Jésus lui est donnée, comme à nous, dans la parabole du Bon Samaritain : partager et servir. Mais avec qui partager ? La tentation de ce sachant est réductrice pour demander qui est mon prochain, témoignant de sa peur d’aimer au-delà de ce qui lui apparaît comme raisonnable. Seulement, l’amour authentique ouvre toujours de grands espaces. Jamais dans l’histoire, nous n’avons été aussi connectés. Si les proches sont nombreux, le prochain est l’absent. Le prêtre et le lévite sont passés à côté du moribond, se justifiant au nom de la loi pour l’avoir pensée comme un carcan, une rigidité, alors qu’elle est proposée non point pour se protéger mais pour secourir celui qui est en danger, quelles que soient son histoire et ses origines.
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À la gare, un homme d’un âge certain ayant perdu ses papiers me dit : « Je n’ai jamais vu autant de froideur. J’ai demandé de l’aide, on s’est détourné. Aucun n’a le temps de s’arrêter ; tous sont occupés à attendre le prochain… train. » Où est le prochain quand ce frère SDF parvient à être classé dans les invisibles ? L’actualité souligne l’indifférence quant à ces migrants dont l’état de santé nécessitait des soins. La capitaine du navire humanitaire Sea Watch, est arrêtée pour avoir accosté de force sur la petite île de Lampedusa. La loi aurait pu l’emporter sur le « prendre soin de la personne », mais le Samaritain est un homme libre qui, sans s’arrêter sur les différences, suscite une magnifique ouverture : celle où s’opère le changement, celui que nous voudrions voir dans le monde, pour reprendre les mots de Gandhi.
Le sacrement du frère
Que faut-il faire ? S’inscrire dans une charité inventive. Le Samaritain suscite une éthique de l’engagement. Il ne fait pas tout, tout seul ; il est un appelant pour avoir été appelé. Témoignant du goût de l’autre, il témoigne d’un autrement possible. Que faut-il faire ? La question est d’une singulière acuité si nous voulons donner une légitimité à ceux qui se pensent illégitimes pour être exclus. Il ne s’agit pas ici d’une option mais d’un appel à vivre la fraternité, alors seulement le sacrement du frère se propose à notre liberté.
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S’approcher du lointain pour en faire son prochain, c’est accueillir le signe de l’infini qui nous rejoint. Le docteur de la loi et nous-mêmes saisirons-nous que répondre à la question « Que faire pour avoir la vie ? », c’est se donner pour entrer dans l’inouï : l’homme perdu aux yeux des puissants nous fait entrer éperdument dans la vie pour lui donner du sens. La vie commence là où elle est bouleversée. Dieu parmi nous ne se laisse entrevoir que sous les traits du pauvre.