En première ligne sur le terrain, les maisons d’accueil Magnificat peuvent offrir une alternative déterminante aux femmes enceintes éprouvées ou fragiles. Si les pouvoirs publics portent atteinte à la libre expression sur les sites d’écoute, elles pourraient perdre, au préjudice de potentielles candidates, un précieux relais.
Un tiers ! Une proportion significative qui mérite notre intérêt et celui de nos dirigeants : près d’un tiers des femmes accueillies par les maisons Magnificat, à Laval (53) et Ligueil (37), sont aiguillées par les sites d’écoute, notamment ceux visés par le délit d’entrave numérique à l’IVG, fraîchement adopté par les députés. Ce texte de loi pose donc la question grave d’une entrave à l’information attendue par des femmes confrontées à une grossesse non désirée.
Au détriment des plus fragiles…
À l’heure où les élites de la nation s’acharnaient encore à dessiner le compromis hasardeux de ce texte brûlant, les 11 mamans et futures mères accueillies à Ligueil et Laval étaient bien éloignées de ces considérations, légitimement préoccupées par la vie naissante et la préparation de leur retour à une existence autonome. Dans ce cadre qu’elles se sont approprié, selon le souhait de l’association Magnificat Accueillir la vie (née sous l’impulsion du député André Mignot en 1975), les débats législatifs n’ont qu’un très faible écho. Tant mieux. La directrice et les salariées de la structure, qui assurent une présence 24 heures sur 24, scrutent en revanche l’actualité avec acuité et recul : « Nous ne craignons rien pour nous, il n’est pas question de préjudice pour l’association. Cette considération est sans importance, d’autant que les charges de structure sont assumées par nos donateurs. En revanche, nous sommes préoccupés pour les profils de femmes, souvent les plus fragiles, qui entrent en contact avec nous par l’intermédiaire des sites d’écoute », explique la directrice, Marine Cavalier.
« Le premier contact téléphonique (…) : le sas anonyme qui rassure »
Œuvre chrétienne dans ses fondements, l’association accueille des femmes de tous âges, de toutes confessions et de toute origine sociale. « Chacune a son histoire particulière. Ce n’est pas une généralité, mais il est fréquent qu’une femme envisage un avortement, à son corps défendant, si elle ne trouve pas une solution d’aide satisfaisante. C’est la marque d’une solitude profonde qui trouve ici une réponse. Mais pour ces femmes, les plus fragiles, un premier contact téléphonique est une étape déterminante, c’est le sas anonyme qui rassure. » Si le rôle d’intermédiaire est amoindri, ce sont donc les plus fragiles qui verront réduites leurs chances d’entrer en contact avec Magnificat. Ce préjudice pour le plus faible semble d’ailleurs être une constante depuis la multiplication des lois portant atteinte à la vie.
« Nos maisons seront toujours pleines… »
Du côté de Magnificat, on s’attend donc à une possible évolution du profil des mamans accueillies, au profit de celles dont le besoin est tout aussi réel, mais s’exprime différemment : « Beaucoup n’envisagent pas d’avorter, mais ont besoin d’un appui. Généralement plus décidées, elles nous trouvent par leurs propres moyens ou découvrent cette possibilité d’hébergement au bout d’un processus de discussion », explique la directrice. Diana, 23 ans, a vécu cette situation : « Face à une grossesse non désirée, j’ai commencé par une recherche sur les réseaux sociaux. Je ne voulais pas avorter, mais j’avais besoin de réconfort et de soutien, je ne pensais pas à un lieu d’accueil. Je suis entrée en contact avec un site d’écoute, qui m’a conduit vers Magnificat. Je ne m’attendais pas à cette solution concrète, j’ai trouvé bien plus qu’espéré. »
Au-delà de la polémique actuelle sur le délit d’entrave numérique, Magnificat poursuivra donc sans aucun doute sa mission. Son concept de maison à taille humaine, de micro-société où le soutien mutuel (à l’image de la Visitation) rend possible l’accueil de la vie naissante, répond sans conteste au désir de nombreuses femmes.
Un défi pour l’avenir…
Le défi pour l’avenir sera donc de rester accessible à toutes, y compris aux plus fragiles : « Face à cette entrave gouvernementale, qui résulte de cette loi, le lien avec les plus faibles passera par un renforcement de nos relations avec le maillage associatif, avec tous ceux qui sont proches du terrain. Attendons déjà la nouvelle lecture du texte par le Sénat et son retour à l’Assemblée, puis la publication du décret d’application et sa mise en œuvre effective… Mais s’il le faut, nous ferons de cette limite une opportunité », assure le président de l’association, Jean Pénaud.