Les cérémonies de la fête nationale et l’intervention du chef de l’Etat ont été éclipsées par le bain de sang provoqué par l’attentat islamique de Nice. Les interrogations sur la sécurité se multiplient.A l’issue du feu d’artifice du 14 juillet, un tueur islamique a malheureusement réussi un attentat monstrueux à Nice, en fonçant sur la foule au volant d’un camion sur la promenade des Anglais où se pressait la foule, dont beaucoup de familles. Bilan provisoire : 84 morts, 18 blessés en urgence absolue. Au total, 188 patients ont été pris en charge, selon le ministère de la Santé.
De nombreux enfants parmi les victimes
« Nice a vécu une nuit d’horreur et d’épouvante. Les scènes auxquelles on a assisté cette nuit étaient terrifiantes”, a témoigné Eric Ciotti, le député LR des Alpes-Maritimes » au micro d’Europe 1. « Je n’oublierai jamais le regard de cette policière qui a stoppé le tueur ». « C’est un spectacle absolument dramatique. » a aussi déclaré Christian Estrosi, ancien maire LR de Nice, évoquant “au moins une dizaine d’enfants tués” » – près d’une cinquantaine d’autres figurent parmi les nombreux blessés dont une vingtaine sont en état d’urgence absolue. Parmi les 84 morts, au moins une dizaine de touristes étrangers.
« Le président de la République, qui s’est rendu à Nice vendredi après-midi (15 juillet) a annoncé qu’une “cinquantaine de personnes” se trouvaient encore “entre la vie et la mort”. Par ailleurs une cinquantaine d’enfants ont été hospitalisés à la fondation Lenval, hôpital pédiatrique de Nice » rapporte L’Express. Vingt heures après l’attentat, de nombreuses personnes cherchaient des nouvelles de leurs proches sur les réseaux sociaux, annonce Nice Matin.
Le joyau de la Côte d’Azur est aussi un foyer de l’islamisme
« Nice, cinquième ville de France et haut lieu du tourisme hexagonal depuis le début du XXe siècle, n’a jamais connu de tragédie d’une telle ampleur » souligne le Huffington Post. Toutefois, poursuit ce journal, ce joyau de de la Côte d’Azur, particulièrement sécurisée, n’est pas pour autant une ville de tout repos : « Nice est considérée comme un des foyers français du radicalisme jihadiste. Mohamed Sifaoui la considère comme l’un des cinq berceaux du recrutement des terroristes avec Toulouse, Lyon, le nord et la région parisienne. C’est notamment de cette ville qu’est originaire Omar Omsen, un jihadiste que l’on croyait mort et qui est réapparu à la fin du mois de mai. Dans son groupe lié au front al Nostra, une cinquantaine de Niçois seraient entraînés. »
Le curriculum classique du terroriste
Qui était le tueur ? Mohamed Lahouaiej-Bouhle, l’homme qui a foncé sur la foule puis tiré sur elle était un Tunisien de 31 ans bénéficiant d’un permis de travail en France. « Il n’avait jamais été repéré par les services de renseignement pour sa radicalisation » relève Valeurs Actuelles, « il était en revanche connu des services de police pour des faits de délinquance, (violences avec arme, violences conjugales et vol). « Il faisait l’objet d’un contrôle judiciaire, après une bagarre l’ayant opposé à un automobiliste, au mois de janvier » rapporte France Info. Délinquance, condamnation, radicalisation islamique…un « itinéraire » désormais classique !
L’indignation et la solidarité internationales exprimées par les dirigeants du monde entier se sont aussitôt fait entendre, rapporte Le Figaro. De Obama (« «Nous sommes solidaires de la France, notre plus vieil allié, au moment où elle fait face à cette attaque») à Poutine ( «La Russie est solidaire avec le peuple français en ce jour difficile») sans oublier le Vatican («Nous exprimons de la part du Pape François notre participation et notre solidarité avec la souffrance des victimes et du peuple français tout entier» et les 15 pays membres du Conseil de sécurité de l’ONU qui ont «condamné avec la plus grande fermeté l’attaque terroriste barbare et lâche» de Nice dans une déclaration commune. Notons que l’Arabie saoudite « a pointé du doigt une attaque «terroriste ignoble». Le royaume saoudien, frappé il y a une dizaine des jours par des attentats meurtriers, assure la France «amie» de sa «solidarité et de sa coopération pour affronter ensemble les actes terroristes sous toutes leurs formes».
De nouvelles interrogations sur les mesures de sécurité
La sécurité était-elle vraiment à la hauteur de la menace ? Vraisemblablement pas, vu le bilan. « La ville s’était pourtant préparée » souligne Le Monde : « La ville, qui accueille chaque mois de février le troisième carnaval le plus fréquenté du monde après Rio et Venise, avait mis en place un dispositif de sécurité spécifique, coordonné par le ministère de l’intérieur » renforcé en raison des afflux de touristes pour le festival de Cannes et pour l’Euro de football. » Mais l’attentat de Nice « aura déjoué toutes ces prévisions ». « La méthode utilisée montre que le terrorisme islamiste peut frapper n’importe où et à n’importe quel moment. Le temps de deuil et de sidération passés, il faudra se poser collectivement toutes les questions qu’appelle ce nouvel attentat et y apporter des réponses » souligne sur son blog Bruneau Retailleau, Président du groupe Les Républicains au Sénat.
Mais l’Etat est pointé du doigt par le Président Les Républicains de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur et ancien maire de Nice, Christian Estrosi : il « reproche notamment à François Hollande d’avoir annoncé la fin de l’état d’urgence avant de le prolonger de trois mois après l’attaque terroriste, rapporte L’Express.
« Ça fait 230 morts depuis le mois de janvier »
Président de la commission d’enquête parlementaire sur les attentats de 2015, le député LR Georges Fenech est le plus incisif. «L’état d’urgence ne règle rien. Ça rassure, c’est tout. La force Sentinelle ne règle rien non plus. C’est psychologique», a-t-il estimé, selon 20 minutes. Sur RMC/BFMTV, Georges Fenech a déclaré que Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur, « “doit rendre des comptes. Ça fait 230 morts depuis le mois de janvier. Les réponses que nous avons sont à chaque fois les mêmes: l’état d’urgence, la force Sentinelle, les frappes qu’on va augmenter. On voit le résultat.” Le député du Rhône rappelle que 13.000 individus sont fichés radicalisés, que 2.000 ressortissants français sont actuellement sur les théâtres extérieurs et qu’ils vont revenir tôt au tard. “Il faut savoir ce que l’on veut. Soit on continue à se faire massacrer (…) ou on se donne les moyens d’empêcher ces passages à l’acte, c’est le but de nos propositions, insiste-t-il, estimant qu'”aujourd’hui (…) la politique pénale, sécuritaire et de renseignement n’est plus adaptée à ces menaces nouvelles. ” »
« Dénonçant des “aberrations” relevées pendant ces cinq mois d’auditions, le député LR a formulé, avec son collègue socialiste Sébastien Pietrasanta, une série de propositions, résume Europe 1 : clarifier le rôle des forces d’intervention, renforcer le rôle de la DGSI, utiliser les services territoriaux, créer une Agence nationale de lutte contre le terrorisme, renforcer le renseignement pénitentiaire et redéfinir l’opération Sentinelle. » Mais il se dit « sidéré de n’avoir pas été entendu par l’exécutif ».
« Les bougies et les marches blanches, ce n’est pas suffisant, confie au Monde la députée (FN, Vaucluse) Marion Maréchal-Le Pen. Le président nous annonce la prolongation de l’Etat d’urgence : encore faudrait-il appliquer les mesures qui vont avec, comme par exemple les perquisitions administratives. Notre politique pénale est inefficace. Il y a une radicalisation en prison à cause du manque de place. Il faut des bâtiments réservés pour les terroristes islamistes pour éviter qu’ils soient avec les autres. »
Deux heures et demie de retard pour l’application « alerte attentat »
Ce qui est d’ores et déjà avéré, dénonce Sud-Ouest, c’est que la toute nouvelle application “alerte attentat” de l’État ( le SAIP -Système d’alerte et d’information des populations lancé à l’occasion de l’Euro 2016 de football) « censée prévenir la population d’une attaque… dans les 15 minutes » a été envoyée « plus de deux heures et demi après le début de l’attaque sur la Promenade des Anglais » !
Dommage collatéral : le tourisme. « Dans les hôtels de la vieille ville, les annulations se succèdent depuis ce matin, témoigne Le Figaro (…) “La saison est foutue. Elle aura duré de juin à juillet grâce à l’Euro”, commente un taxi. (…) “Nous devions rester jusqu’à dimanche” explique un couple de Japonais initialement venus pour le festival de jazz, désormais annulé. “Nous n’avons plus le cœur à faire du tourisme” expliquent-ils. »
A l’issue du conseil de sécurité réuni à l’Elysée par François Hollande, vendredi matin avant qu’il ne s’envole pour Nice, Manuel Valls a annoncé que le président de la République a décidé de déclarer trois jours de deuil national, les 16, 17 et 18 juillet, en hommage aux victimes.