C’est le nom d’une “tribu solidaire” de jeunes nés après 1975, qui entend bien remettre le sujet de l’avortement sur la table.Fomenté par une poignée de jeunes français en mars 2016, ce mouvement qui emprunte ses codes visuels aux campagnes publicitaires n’a pourtant rien à vendre. Fomenter, du latin : attiser un feu ou calmer une douleur… Le mot est bien choisi. Les Survivants soufflent sur les braises du politiquement incorrect et se battent pour apaiser les souffrances liées à un acte devenu banal : l’avortement.
L’IVG un bien de consommation comme un autre ? L’avortement, un droit fondamental incontestable, indolore, inodore ? Contre cette idée largement répandue dans les médias, les Survivants partent en campagne.
À lire la plupart des termes dont leur site est truffé, la campagne prend des airs de croisade : “guérilla marketing”, “injustice”, “révolte”, “agit-prop” (agitation-propagande), bref, une technique de diffusion des idées révolutionnaires proche de l’action directe et du militantisme.
Leur démarche qui se veut aussi humaniste et solidaire, vante dans un curieux mélange la “non-violence”, la “compassion” et la “compréhension”. Apaiser les souffrances liées à un acte devenu banal. Les souffrances de qui au juste ? De ceux qui n’ont pu être là et de ceux qui en souffrent ? Des victimes collatérales ?
De la solidarité envers ceux qui n’ont pas eu droit à la vie
Une génération née après la Loi Veil prend la parole pour replacer l’acte d’avorter au centre des débats. Elle veut faire valoir “sa joie de vivre” et s’insurge contre “la planification froide et injuste des naissances”. Elle a pris conscience de son privilège d’être en vie et le manifeste ! Elle éclaire d’un jour nouveau le syndrome du survivant qui frappe l’entourage familial du petit être disparu. Les victimes sont aussi ceux qui restent, car les autres leur manquent.
L’avortement existe depuis longtemps, depuis toujours. De nos jours il frappe une grossesse sur 5. 1/5e des enfants à naître disparaissent avant l’accouchement. Le mouvement suscite une levée de boucliers sans précédent sur les réseaux sociaux chez les défenseurs de l’IVG. Il interpelle une génération individualiste et matérialiste. Une génération au rapport à la famille, à l’engagement et à la transmission perturbé.
Un mode d’action ou une action à la mode ?
Le coup de crayon, le slogan choc ou la création graphique ou artistique sont le moyen d’expression choisi par les Survivants pour sensibiliser le grand public aux solutions alternatives.
Ce mouvement d’”agit-prop” est présent dans chaque grande ville de France. La rue est leur théâtre d’expression créative et pacifique pour “rendre hommage aux frères et sœurs qui devraient vivre à nos côtés”.
Les constats dressés par les Survivants sont clairs, argumentés et accablants. Mais si la révolte de ces jeunes apparaît légitime, quelle place réservent-ils vraiment à la compassion et à l’humanité ? Un certain malaise s’installe au fil de la navigation sur le site. Entre une invitation à signer un pacte et une autre à rejoindre le mouvement, le sentiment de passer à côté de l’essentiel vous traverse l’esprit. L’image évoque un film post-apocalyptique (noir, blanc, vert) dont les héros sont les survivants.
La vie vaut la peine d’être vécue par tous, à l’évidence. Mais ce combat ne réconfortera pas le cœur blessé des mères qui n’accouchèrent jamais. Une guérilla, c’est bien quand le peuple souhaite une insurrection, mais à quoi sert-elle quand il s’agit de toucher les âmes ?