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La guerre des pagodes fait rage en Birmanie

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Sylvain Dorient - publié le 19/05/16
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Un moine bouddhiste tente d’étouffer les lieux de culte chrétiens en leur adjoignant des temples, bâtis sur les terrains de l’Église anglicane. Sayadaw U Thuzana, 73 ans, affirme qu’il “suit son karma” quand il construit un nouveau lieu de culte bouddhiste sur un jardin jouxtant une église. Le terrain appartient à l’Église anglicane, mais la construction n’a pas été dénoncée par les autorités.

Des temples bouddhistes comme armes

Ce n’est pas la première fois que le “karma” de moines bouddhistes s’exprime au détriment des chrétiens en Birmanie. Le 21 août 2015, un autre temple était bâti à proximité d’une église baptiste. Ses constructeurs se sont justifiés en affirmant qu’un temple se tenait là, au temps de l’empereur indien Ashoka. Il était de leur devoir de le rebâtir, en raison d’évènements importants advenus dans une vie antérieure de leur leader, le moine Sayadaw. Quant aux fidèles chrétiens, ils ont dû se réfugier dans la maison du pasteur pour les célébrations, car les bouddhistes faisaient trop de bruit en priant.

Bouddhistes extrémistes

Alors que la Birmanie semble sortir de la dictature militaire, le groupe extrémiste bouddhiste Ma Ba Tha, littéralement “Comité pour la protection de la race et de la religion”, réclame un pays unifié dans une seule religion. Il est surtout connu pour ses exactions à l’encontre des Rohingas, cette minorité birmane de l’Est du pays et de confession majoritairement musulmane. Mais certains bouddhistes s’en prennent aussi aux chrétiens, aux minorités ethniques, et en particulier les Karens.

Relents de guerres passées

Dans le cas du personnage de U Thuzana, son opposition aux Karens chrétiens remonte à 1994, en pleine guerre entre la junte militaire birmane et la résistance Karen, fédérée autour de la KNLA (Karen National Liberation Army). À cette époque, le moine bouddhiste s’était plaint de la surreprésentation des chrétiens dans la hiérarchie de la KNLA, et était devenu le chef spirituel d’une nouvelle entité, le DKBA (Democratic Karen Buddhist Army). Cette armée s’était empressée d’engager un cesser le feu avec la junte, avant de lui prêter main forte pour briser la résistance de la KNLA.

“Les Birmans nous regardaient et rigolaient”

Blé Di Pa, ancien combattant Karen de la KNLA, rencontré en Thaïlande où il est réfugié, confie que la trahison du DKBA a signé la fin des victoires des Karens. Il décrit avec enthousiasme qu’avant 1995, les Birmans malgré leur nombre et leurs armes n’arrivaient pas à entrer dans les montagnes tenues par ses frères d’armes. Mais quand des Karens ont commencé à tirer sur d’autres Karens, il a jeté l’éponge : “Les Birmans n’avaient qu’à s’assoir, nous regarder et rigoler ! Je ne voulais pas faire cette guerre-là !” Difficile, quand on connaît le passé belliqueux du moine bouddhiste U Thuzana, de ne pas voir dans son karma un solide acharnement anti-chrétien.

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