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Brésil : L’Église est contre la destitution de Dilma Rousseff

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Jean-Claude Gerez - publié le 23/04/16
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Les députés brésiliens ont voté en faveur de la destitution de l’impopulaire présidente du plus important état catholique du monde.« Le pays passe actuellement par une crise politique et morale, mais d’après les informations que nous possédons du Suprême Tribunal Fédéral (n.d.l.r. l’équivalent de la Cour Suprême), il n’y a pas d’indices qui justifient une demande de destitution de la présidente Dilma Rousseff. » Les propos du cardinal Raymundo Damasceno Assis, président de la Conférence des Évêques du Brésil (CNBB) ne pouvaient guère être plus clairs, au sortir de la 54ème assemblée générale de la Conférence de l’Épiscopat du géant sud-américain, le 14 avril dernier.

Confronté à une crise politique sans précédent, le Brésil a vécu, dimanche 17 avril un épisode qui marquera à jamais l’histoire de cette jeune démocratie. Pour rappel, 367 députés, ont, au cours d’un scrutin qui a duré plus de six heures et dans une ambiance particulièrement tendue, voté pour la procédure d’impeachment de Dilma Rousseff, soupçonnée d’avoir maquillé les comptes publics afin de masquer l’ampleur du trou dans les caisses de l’État. Des opérations pratiquées par la plupart de ces prédécesseurs, et qui, d’un strict point de vue juridique, ne justifieraient pas un impeachment selon la Constitution.

« Les pauvres sont les victimes de la corruption »

C’est d’ailleurs l’avis exprimé par Mgr Leonardo Ulrich Steiner, le Secrétaire Général de la CNBB. « Il existe des règles pour entrer dans un processus initial d’impeachment, a t il indiqué, en marge de la 54ème assemblée générale. Et je crois que nous ne sommes pas arrivé à ce niveau. Nous avons également le sentiment que les manifestations de la rue expriment des points de vue idéologiques opposés, ce qui est normal dans une démocratie. Mais ce processus, a t il rajouté, pourrait fragiliser les institutions. »

Revenant également sur les multiples scandales de corruption qui secouent le pays depuis plusieurs mois – et pour lesquels 60 % des députés des deux camps qui ont voté dimanche font l’objet de poursuites – les évêques se sont interrogés  sur les grands perdants de la corruption. «  Ce sont les pauvres, ont-ils souligné, « les martyres de la corruption », comme l’a évoqué le Pape François. » Les évêques ont aussi réaffirmé que « comme pasteurs, nous sommes solidaires des souffrances du peuple ». Pour les responsables de la CNBB, tous les soupçons de corruption doivent d’ailleurs continuer à faire l’objet d’enquêtes rigoureuses. Objectif ? « Permettre aux institutions de regagner leurs crédibilité ».

Pour une profonde réforme politique

Face à ce qui est de plus en plus qualifié de « coup d’État parlementaire », de nombreuses figures de l’Église et de la théologie brésilienne ont exprimé leur préoccupation. Notamment Léonardo Boff, « Père » de la Théologie de la Libération au Brésil, qui a rappelé que de nombreux parlementaires de la « bancada évangelica » (élus de tout parti mais se revendiquant évangéliques) « avaient précédé leur vote de discours au ton religieux et justifié leur choix au nom de Dieu. » Mais il y a pire, au yeux du théologien. « Ce vote rappelle le climat qui avait précédé le coup d’État militaire en 1964 (n.d.l.r. le Brésil a vécu un régime militaire entre 1964 et 1984). Car on a vu une chambre 367 députés d’une assemblée qui n’a que très peu de crédit aux yeux de la population annuler le vote de plus de 54 millions de citoyens qui ont élu Dilma Rousseff, en 2014. »

Pour la Conférence des évêques du Brésil, la crise actuelle met en évidence la nécessité d’une profonde réforme politique. « Cette réforme doit assurer une réelle participation populaire, favoriser l’indépendance des pouvoirs de la République, restaurer la crédibilité des institutions, garantir la gouvernabilité et garantir les droits sociaux », ont martelé les évêques. Et d’appeler à l’unité et à a solidarité nationale. « La Nation requiert que de la part de tous la nécessité de passer outre les intérêts personnels, partisans et corporatiste. Car les divisions et les violences peuvent menacer gravement la paix sociale. »

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