Une première lecture rapide de la longue et foisonnante exhortation post synodale du pape François sur la famille en montre le réalisme et le dynamisme missionnaire. Jamais sans doute un texte pontifical n’aura été autant commenté… avant sa publication ! Force est de constater après un premier survol de ce vaste panorama que la focalisation des médias sur “l’accès à la communion aux divorcés remariés” ou “la reconnaissance des couples homosexuels” était à côté de la plaque. Si l’exhortation recommande avec insistance non seulement aux pasteurs mais à toute l’Église de veiller tout particulièrement à ce que nul ne se sente exclu de la communion ecclésiale et appelle les pasteurs à un discernement au cas par cas, on n’y décèle aucune remise en cause de l’indissolubilité du mariage ou d’une rupture avec la discipline des sacrements… Le contraire eût été renversant !
La révolution permanente de la miséricorde
En revanche, le Pape “exhorte” en effet toute l’Église, clercs et laïcs, à cette révolution permanente qui consiste à vivifier la lettre par l’esprit, invitation particulièrement pertinente, insiste-t-il, en cette année de la Miséricorde : “Encourager chacun à être un signe de miséricorde et de proximité là où la vie familiale ne se réalise pas parfaitement ou ne se déroule pas dans la paix et la joie”. Pas de laxisme ni de relativisme dans ce texte, mais une “autocritique” pour rejoindre les familles “comme elles sont”, a commenté le cardinal Schönborn, archevêque de Vienne mais aussi principal maître d’œuvre du Catéchisme de l’Église catholique (I.Media). Étant entendu que “plus important qu’une pastorale des échecs est l’effort pour consolider les mariages et prévenir ainsi les ruptures” (§ 307).
Une synthèse dynamique
Le pape François offre à toute l’Église une synthèse dynamique des travaux des pères synodaux au cours des deux synodes tenus sur la famille en octobre 2014 et 2015, relus à la lumière de l’enseignement de ses prédécesseurs – Paul VI, Jean Paul II, Benoît XVI – sur la famille, le mariage et la vie. La longue expérience pastorale du jésuite donne chair, pour ainsi dire, à ce panorama de la famille considérée sous tous ses aspects : théologique et sacramentel, évidemment, mais aussi psychologique, éducatif, sociologique, politique… Depuis le dessein de Dieu sur la famille, l’union de l’homme et de la femme, la sexualité, la procréation, l’éducation des enfants, jusqu’à l’accueil des personnes âgées ou handicapées, toutes les étapes et les péripéties de l’aventure familiale sont décrites et analysées.
Si les maux de la société – divorces, refus de la vie, avortements, idéologie du genre – sont dénoncés sans ambages, la perspective est résolument constructive ou, pour mieux dire, missionnaire : la “bonne nouvelle” de l’amour vainqueur des ténèbres doit mobiliser toute l’Eglise pour que soit redécouverte, notamment par les jeunes générations trop souvent traumatisées par les mésententes et divorces de leurs parents, la joie féconde de l’union indissoluble entre un homme et une femme, fruit et image de l’amour trinitaire.