“Le poids du monde n’est que trop lourd pour nos épaules”, aimait à répéter Miriam Woldu.Il y a une tristesse en toutes choses, en ce monde où tout finit par disparaître. J’écris aujourd’hui en mémoire de Miriam, femme d’une beauté et d’une grâce extraordinaires, qui emplissait l’espace autour d’elle d’une lumière radieuse. Elle travaillait à la réception de la résidence Sainte-Marthe, là où le pape François réside depuis son élection il y a trois ans.
Chaque jour, elle le saluait. En ce sens, elle était un membre de « la famille du Pape ». Pour tous ceux qui ont été de passage dans cette résidence, Miriam a été une lumière, toujours prête à aider, une amie de confiance.
D’origine érythréenne, elle a toujours vécu en Italie. Elle parlait l’italien à la perfection, mais aussi l’anglais, avec une grande éloquence. La grâce de Miriam touchait même le pape François, qui aimait à l’appeler la « reine de la maison ». Il appréciait sa gentillesse et son sourire.
Je connaissais bien Miriam. Bienveillante à mon égard, elle m’encourageait souvent à ne pas être « si sérieux ». « Le poids du monde n’est que trop lourd pour nos épaules, Robert », me disait-elle. C’était une personne honnête. Elle avait cette capacité à toujours discerner le bien du mal avec une précision rare.
Elle s’est fiancée, et mariée à l’Église. Elle était « si heureuse » à l’idée de fonder une famille. Peu de temps après, elle a malheureusement perdu l’enfant qu’elle attendait avec tant de joie. Puis, pour des raisons sur lesquelles je ne reviendrai pas ici pour préserver son intimité, son mari et elle se sont séparés. Elle emménagea dans un appartement proche du Vatican.
Son histoire fait écho à celle de tant d’autres. Elle a connu la solitude, a lutté au quotidien pour travailler, payer son loyer, vivant au jour le jour. En décembre, elle était encore en poste à la résidence. Mais en janvier, elle demanda plusieurs jours de congé maladie, qu’elle renouvela en février.
Vers le 10 février, puisque la date et l’heure exactes de sa mort sont incertaines, elle a quitté ce monde. Plusieurs jours durant, allongée dans son lit, habillée, elle gisait seule dans son appartement.
Tel que déterminé par les enquêteurs par la suite, les portes étaient fermées de l’intérieur. Aucun signe d’agression ou d’intrusion n’a été relevé. Alerté par un silence trop persistent, ce sera son frère, Simon, qui contactera les autorités. Sur place, ils forceront la porte et découvriront son corps, sans vie depuis plusieurs jours.
L’enquête déterminera qu’elle est décédée des suites d’un coma diabétique, et, pour ajouter à l’immense peine, qu’elle était enceinte de sept mois d’une petite fille, décédée elle aussi. Elles ont été enterrées ensemble.
Les funérailles se sont tenues le 27 février à l’église de Saint Étienne des abyssiniens, juste derrière la Basilique Saint-Pierre. Le pape François s’est recueilli seul près de sa dépouille pendant 20 minutes, manifestement affecté par sa mort.
L’ironie aura voulu que, alors qu’était annoncé le décès de Miriam le 22 février dernier, le pape François prononçait une homélie devant la Curie romaine à l’occasion de la messe donnée pour marquer le Jubilé de la Miséricorde. « Sur notre lieu de travail, aussi, ressentons, cultivons et pratiquons un sens pastoral fort, notamment envers ceux que nous côtoyons au quotidien. Que personne ne se sente négligé, et au contraire, que tous puissent vivre, surtout ici, dans l’attention et l’amour du Bon Berger. »
La lumière de Miriam s’est éteinte de ce monde. Elle est partie sans dire au revoir. Miriam, merci pour ta gentillesse et la lumière que tu nous as donnée. Que ton âme trouve la paix dans le Seigneur. Que la lumière éternelle t’illumine, pour des siècles et des siècles. Amen.