separateurCreated with Sketch.

Une tension qui n’en finit plus entre un PS fracturé par la guerre des roses et François Hollande hué par les agriculteurs…

whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Philippe Oswald - publié le 29/02/16
whatsappfacebooktwitter-xemailnative

Brûlot de Martine Aubry, tir de barrage contre la réforme du Code du travail, la scène politique française est accaparée par une crise majeure de la majorité.Commençons par la fin avec ce qui est traditionnellement un rendez-vous convivial, typiquement français, où à défaut de “construire des villes à la campagne”, comme le préconisait Alphonse Allais, c’est la campagne qui s’installe dans la capitale : le Salon de l’agriculture a été inauguré ce samedi 27 février par le président de la République. Un désastre, résume Alba Ventura sur RTL : “L’image est passée en boucle tout le week-end, celle de François Hollande hué, sifflé, insulté au Salon de l’Agriculture”. C’est certes arrivé à d’autres avant lui, “mais l’image est terrible”. D’autant que “les agriculteurs ce n’est qu’un apéritif, vous allez voir l’accueil de la loi El Khomri sur le code du travail. (…) Les étudiants de gauche à l’appel de l’UNEF, se préparent eux, à manifester la semaine prochaine, la jeunesse dans la rue, ce n’est pas un bon signe pour un Président socialiste. Et sans doute les syndicats devraient entrer dans la danse à la fin du mois. Si le Président pense qu’il a vu le pire au Salon de l’Agriculture, on peut d’ores et déjà lui prédire que ça ne fait que commencer”.

Les évêques solidaires des paysans

Une délégation d’évêques s’est rendue au salon pour exprimer le soutien de l’épiscopat aux acteurs du monde rural, comme l’avait annoncé le site de la Conférence des Évêques de France. “La surproduction, la chute des cours, le travail à perte, le sentiment d’être tenus pour responsables de la dégradation de l’environnement, les exploitations qui ferment, la lourdeur de la fiscalité… tout cela engendre un profond désarroi”, déplore Mgr Olivier de Germay, évêque d’Ajaccio. “Reconvertissons notre agriculture”, plaide Mgr Philippe Ballot, archevêque de Chambéry, fils de paysans : “Une agriculture qui refuse de dévaster ses propres bases productives, qui ne veut pas participer à l’oppression de la terre et des hommes, c’est aussi une agriculture plus nécessiteuse de soins, donc de travail humain, donc de rémunération, donc de redistribution et d’équité”. “C’est une conversion sociale et écologique de notre système agroalimentaire” à laquelle invite l’encyclique Laudato Si’ du pape François. Avis à la FNSEA !

Martine Aubry sonne la charge

“Trop, c’est trop !” Au Parti socialiste, le feu a été mis aux poudres par Martine Aubry le 24 février dans une tribune du Monde : “C’est un affaiblissement durable de la France qui se prépare”, a-t-elle dénoncé avec d’autres personnalités de gauche. En cause, le Pacte de responsabilité, la déchéance de nationalité, le refus d’accueillir davantage de réfugiés et la réforme du code du travail. La cible de Martine Aubry, c’est avant tout Manuel Valls. Pour Laurent Neumann, de BFMTV, “l’idée est en train de s’installer à gauche” que François Hollande renoncerait à se présenter en 2017. En conséquence, la maire de Lille veut donc tout faire pour que Manuel Valls ne soit pas le candidat naturel de la gauche.

“Une prise de position ressemblant quasiment à une déclaration de guerre”, constate la chaîne de l’Assemblée nationale LCP. “Un coup de poignard dans le dos !”, déplore dans Le Parisien Jack Lang  qui reconnaît :”Le parti est en danger, c’est certain. Il y a une sorte de suicide collectif”. “C’est bien de protester mais c’est mieux de modifier le cours des choses”, objecte pour sa part la sénatrice PS Marie-Noëlle Lienemann, membre du mouvement “Maintenant la Gauche”, sur la chaîne Public Sénat. Avis partagé par Hervé Favre dans La Voix du Nord : Martine Aubry “devra répondre plus clairement à la question que se posent ses soutiens au sein de l’électorat socialiste : et maintenant, qu’est-ce qu’on fait ?”.

Le PS résistera-t-il à “la guerre des roses” ?

“Eh bien, on fait “la guerre des roses”, épisode 2 337”, raille RFI. “L’affrontement entre “deux gauches” est une figure classique (…). Dans le cas qui nous intéresse ces jours-ci, deux caps s’opposent au sein même de la gauche réformiste : sociale-libérale d’un côté, avec Manuel Valls ; sociale-démocrate de l’autre, avec Martine Aubry. (…) Mais cet affrontement se joue aussi au niveau des alliances. Quand Martine Aubry veut une gauche rassemblée “rouge, rose, vert”, la fameuse “gauche plurielle” des années Lionel Jospin, Manuel Valls entend de son côté dynamiter les configurations traditionnelles, regarder vers le centre et repousser toutes les oppositions et les critiques dans le camp d’une gauche qui serait “archaïque”.” Et c’est lui qui “sort pour l’instant gagnant de cet épisode. Il sculpte son image de grand réformateur, que les “archaïques” veulent brider. Et reprend au passage, enfin, l’avantage sur Emmanuel Macron, son fougueux ministre de l’Economie qui semblait lui avoir volé le feu de la modernité”. Et le PS, dans tout ça ? “Il ne reste plus que l’immeuble de la rue de Solférino pour faire croire que le PS existe”, ironise le sénateur LR Roger Karoutchi sur LCP.

“Aujourd’hui, le PS ne sert à rien”

En tout cas, il n’y a plus d’ “aubristes” à la direction du PS, constate le Huffington Post : “Leur décision est irrévocable. Bras droit de Martine Aubry à Solférino, député de l’Essonne qu’elle a fait venir auprès d’elle dans le Nord, François Lamy a confirmé lundi 29 février que les aubristes vont prochainement quitter la direction du Parti socialiste”. C’est Martine Aubry elle-même qui est repartie à l’offensive dimanche dans le JDD : “Nous allons sortir de la direction du PS, nous souhaitons en discuter avec Jean-Christophe Cambadélis”, explique la maire de Lille. Ainsi, deux de ses proches, François Lamy et Jean-Marc Germain devraient partir de Solferino. L’eurodéputé nordiste Gilles Pargneaux a déjà confirmé sur le site de la Voix du Nord dimanche son souhait de quitter ses fonctions de secrétaire national aux relations Nord/Sud : “Aujourd’hui, le PS ne sert à rien””.

“Si la loi El Khomri est votée, le PS est mort”

Au cœur de la discorde, la réforme du Code du travail. “Si la loi El Khomri est votée, le PS est mort”, avertit dans Le Parisien le député PS du Cher, Yann Galut, qui ne fait pourtant pas partie des frondeurs : “Le projet de réforme du Code du Travail n’a pas encore été présenté au Conseil des ministres qu’il met déjà le feu à la majorité, exaspère les syndicats et désoriente les salariés”, résume Le Nouvel Obs. Cette réforme indispensable est en effet bien mal engagée par Manuel Valls  : “La majorité qu’il dirige est arrivée à un stade paroxysmique de division et, en quelques jours, la pétition lancée contre le projet El Khomri a mobilisé plus d’un demi-million de signataires”, rappelle Stéphane Siret dans Paris-Normandie. Elle est relayée sur Facebook par un appel à la manifestation “des salariés, des chômeurs, des retraités, des jeunes, contre la loi Gattaz-Hollande-Valls-Macron-El Khomri et toutes les régressions sociales” avec un appel à une première manifestation le 9 mars, jour de présentation du texte de réforme du code du travail en Conseil des ministres, puis une deuxième le 10, et ainsi de suite jusqu’ “au retrait total de ce projet de loi !” qui prend de court les syndicats, rapporte Libération. “Les soutiens au projet de loi Travail ont perdu la bataille de communication, constate le JDD. Pétition, vidéo et risée des réseaux sociaux : on n’entend depuis quelques jours que les détracteurs du projet.”

“Cet obstacle, c’est François Hollande lui-même”

Le fond du problème, relève Jean-Pierre Denis dans son éditorial de La Vie, c’est que “pour réformer, il faut un cap, il faut une vision, il faut une légitimité. En un mot, un vrai leadership. Voyez ­Matteo Renzi en Italie, qui a aussi engagé une refonte du Code du travail. Au fond, on retrouve le même obstacle à chaque grand projet de loi. Et cet obstacle, c’est François Hollande lui-même, son irrésolution, ses ambiguïtés ou ses duplicités érigées en méthode, cette façon de défendre ses idées d’une voix si atone qu’il semble toujours sur le point de s’en détacher”.

Vous avez aimé cet article et souhaitez en savoir plus ?

Recevez Aleteia chaque jour dans votre boite e−mail, c’est gratuit !

Vous aimez le contenu de Aleteia ?

Aidez-nous à couvrir les frais de production des articles que vous lisez, et soutenez la mission d’Aleteia !

Grâce à la déduction fiscale, vous pouvez soutenir le premier site internet catholique au monde tout en réduisant vos impôts. Profitez-en !

(avec déduction fiscale)
Newsletter
Vous avez aimé cet article et souhaitez en savoir plus ?

Recevez Aleteia chaque jour dans votre boite e−mail, c’est gratuit !