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“N’ayez pas peur de l’islam, mais parlez avec les musulmans”

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Sylvain Dorient - publié le 14/01/16
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En Afrique du Nord, au Liban ou en Iran, le père Humblot a côtoyé les musulmans toute sa vie. Il raconte quelques-unes de ses rencontres.L’un des premiers contacts du père Humblot avec les musulmans a été la silhouette d’un “terroriste”, durant la guerre d’Algérie. Il était alors appelé au sein du contingent français, et il tenait la silhouette au bout de son fusil. Il devait tirer, mais il a choisi de ne pas presser la détente et s’est retiré sur la pointe des pieds. L’adversaire n’a pas tiré ! Encore séminariste, il décida de consacrer sa vie au service des musulmans. Il est devenu prêtre missionnaire au sein de l’association du Prado.

Alors qu’il finissait des études de théologie à Beyrouth au début des années 60, le père Humblot a choisi de vivre dans le bidonville qui jouxtait la décharge de la ville. Ses voisins, Libanais chiites du Sud-Liban ou Syriens étaient dockers ou travaillaient dans le tri des ordures. Séparé d’eux par un simple carton, il a été admis dans cette communauté de musulmans pauvres dont il partageait le travail, soit au milieu du dépotoir de la ville, soit comme docker au port. Son but était d’aider des séminaristes et jeunes prêtres qui voulaient servir les pauvres à ne pas seulement contempler la pauvreté de Jésus Christ mais à partager quelques jours celle des pauvres.

“Je donnais le biberon”

Il établit une relation de confiance avec ses voisins, qui savaient qu’il est prêtre catholique : “Mon oratoire était en évidence, tout le monde pouvait le voir”, se souvient-il. Un soir, le père de famille de l’habitation juste à côté de la sienne l’appelle à l’aide : sa femme étant partie, il ne sait pas comment nourrir son bébé qu’elle allaitait… Le prêtre bricole alors un biberon avec une bouteille qu’il a pris soin de faire bouillir. Et c’est ainsi que l’on vit un prêtre français faire boire son lait à un petit musulman entre deux cartons du bidonville de Beyrouth !

Lecture du Coran

Quand il pleuvait, les habitants du bidonville se retrouvaient la nuit, les uns chez les autres, évitant de sortir dans les ruelles boueuses. Ils écoutaient alors le Coran, rassemblés autour du meilleur lecteur d’entre eux. Le père Humblot fut choisi, donnant lieu à une nouvelle scène étrange : le prêtre catholique récitant des sourates, surtout celle de “Maryam”, qu’il expliquait à son assistance à la lumière des Évangiles. Deux cheikh ont eu vent des activités du prêtre et ont voulu les empêcher, mais ils ont été chassés par les voisins du père Humblot, qui s’étaient habitués à “leur” prêtre. Il apprendra à la fin de son séjour que ses activités et sa complicité avec la population locale lui valaient la méfiance de certains musulmans, mais que ses voisins l’ont protégé pendant la guerre de juin 1968 avec Israël. “Pendant plusieurs de mes trajets, j’étais suivi par deux voisins qui assuraient ma protection en toute discrétion ! Je n’en savais rien à l’époque.”

Jamais d’animosité

“Je n’ai jamais connu d’animosité de la part des musulmans que je côtoyais”, assure le prêtre, qui a passé 45 ans en Iran. Ses ennuis sont venus de la police politique, qui regardait d’un mauvais œil ses activités de prêtre missionnaire à Téhéran et qui l’a menacé au point que son évêque lui a demandé de partir d’urgence il y a cinq ans. Depuis 1969, après avoir appris la langue, il réalisait une activité scandaleuse : accompagner des musulmans qui souhaitaient se convertir au christianisme… et ils sont nombreux malgré les risques !

Ses voisins le savaient mais ne le lui ont jamais reproché. “Une seule fois, pendant la Révolution islamique, dans le climat électrique que vous pouvez imaginer, un groupe de jeunes m’a pris à partie alors que j’allais faire des courses chez l’épicier du coin : “Voilà un Américain ! On se le fait !”. À quoi je leur ai répondu que j’étais Français. Réponse : “Ah oui, depuis que l’Imam Khomeini s’est réfugié en France, tous les étrangers sont Français !”. Arrivés chez l’épicier qui me connaissait, on continue à discuter et pour finir, le meneur de cette bande de jeunes m’offre une cigarette, une Malboro ! Réponse immédiate : “Je ne fume pas américain… Prends une de celles-ci”. Et je lui offre une iranienne sortie de mes poches. Éclats de rire de toute la bande et on se quitte bons amis.”

Le Catéchisme de l’Église catholique traduit par les ayatollahs

Plus tard, le prêtre a été invité à la ville sainte de Qom où sont formés les ayatollahs et autres responsables chiites. Un groupe de religieux musulmans lui demande de vérifier leur traduction du Catéchisme de l’Église catholique. Quand le père leur demande pourquoi ils l’ont traduit ils répondent : “Parce que nous voulons présenter chaque religion avec des textes officiels de cette religion, et non pas selon ce que nous en pensons”. Dans la discussion qui suit, les religieux musulmans l’interrogent. “Quel est le plus important commandement dans le christianisme ?” Ce à quoi le père Humblot répond qu’il n’y a qu’un commandement : l’Amour qui résume tout. “Et nous voilà partis dans un échange sur ce Dieu unique qui est Amour, non pas parce qu’Il nous aime mais parce qu’Il n’est pas seul, solitaire et dangereux, surveillant et juge des hommes pécheurs…”, se souvient-il. Ce catéchisme fut imprimé et détruit une première fois par la police politico-religieuse, puis réimprimé à l’occasion de l’élection du nouveau président. Il est en vente dans les librairies de Téhéran et le père s’en sert souvent pour répondre aux questions des catéchumènes.

“Grâce aux musulmans, je suis conscient que Jésus est le Fils de Dieu”

Il continue désormais depuis Paris grâce à Internet son activité de dialogue avec les musulmans qui, en Iran, en Afghanistan ou en Europe souhaitent se convertir au christianisme, et reçoit des témoignages touchants d’amitiés comme celui d’Amin, un Iranien, qui lui écrit : “Je suis musulman mais j’aime les catholiques car ils sont respectueux de la personne et prêchent l’amour”. Le père Humblot remercie Dieu de l’avoir “converti à Jésus Christ grâce aux comportements de musulmans”. Il s’explique : “Élevé dans une famille très chrétienne, j’aimais l’Évangile et considérais Jésus comme mon meilleur ami. Jusqu’au jour où, dans cette léproserie où les malades souvent très infirmes et souffrants priaient et jeûnaient avec une grande soumission à la volonté de Dieu Tout Puissant, j’ai découvert l’adoration et la prosternation devant Jésus, non seulement mon ami mais aussi le Fils de Dieu”.

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