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Régionales : le Front national séduit davantage l’électorat catholique

Leader of the French far-right party Front National (FN) Marine Le Pen raises her arms at the start of a campaign meeting for the upcoming regional elections in Corsica on November 28, 2015 in Ajaccio, on the French Mediterranean island of Corsica. / AFP / PASCAL POCHARD CASABIANCA

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Philippe Oswald - publié le 08/12/15
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Si l'on en croit un récent sondage, la "digue" qui empêchait des catholiques de voter Front national aurait cédé au premier tour des élections régionales, avec une forte progression du vote FN chez les pratiquants.

Si l’on en croit un récent sondage, la “digue” qui empêchait des catholiques de voter Front national aurait cédé au premier tour des élections régionales, avec une forte progression du vote FN chez les pratiquants.

“La digue catholique s’écroule”, selon une enquête IFOP/Pèlerin : “En effet, par rapport aux élections départementales de mars, plus du double des catholiques pratiquants réguliers ont voté pour le parti de Marine Le Pen. (…) 32% des interrogés se déclarant “catholiques” ont voté pour une liste frontiste, au-dessus de la moyenne des Français (28,4%)”.

La fin de l’exception catholique

Dans cet ensemble, 34% de catholiques non-pratiquants ont voté FN (34%) soit 6 point de plus qu’au premier tour des élections départementales, mais surtout, dimanche dernier, 24% de pratiquants ont fait le même choix, contre seulement 9% en mars 2015, soit 15 points de plus. “Certes, la droite (hors FN) reste la préférence de l’électorat catholique pratiquant régulier. Mais le transfert de vote en faveur du FN est éloquent.” Et ce d’autant plus que “c’est chez les pratiquants réguliers que cette hausse est la plus forte”, souligne La Croix.

Ce n’est pas vraiment une surprise, commente Le Figaro : “Depuis les élections européennes de mai 2014, des sondeurs avaient théorisé la fin de ‘l’exception catholique’ – traditionnellement marquée par une certaine modération politique ancrée à droite et au centre-droit – à l’égard du FN. C’est dans ce contexte que l’invitation de la députée FN Marion Maréchal-Le Pen à une université d’été catholique par l’évêque de Toulon avait fait grand bruit fin août. Si l’Eglise de France avait alors affirmé que “la ligne des évêques n’a pas changé” dans leur hostilité aux thèses du FN, le Premier ministre Manuel Valls avait déploré des ‘barrières qui tombent'”.

L’Église de France évite de nommer le FN

Mais y a-t-il encore un discours officiel de l’Église de France donnant une ligne de conduite aux électeurs ? “Lors de la dernière assemblée des évêques à Lourdes en novembre, le président de la Conférence épiscopale, Mgr Georges Pontier, avait appelé les fidèles à regarder ‘de près les programmes politiques’ pour les régionales et à penser ‘au sort des petits et des humbles’, sans cibler directement le FN”, relève Challenges.

Notable exception : la mise en garde de Mgr Ulrich, archevêque de Lille, dans un entretien à La Croix le 2 décembre, quatre jours avant le premier tour des élections régionales. Au vu des résultats, on peut penser qu’elle n’aura guère eu plus d’effets que les prises de position de La Voix du Nord contre le Front national ou celle du “patron des patrons”, Pierre Gattaz. Certes, l’archevêque de Lille ne nommait pas lui-même explicitement le Front national, mais La Croix titrait son interview : “Mgr Ulrich et le Front national : “On ne peut être catholique, c’est-à-dire universel, et xénophobe””.

“On est (…) en droit de se demander si les 40% d’électeurs qui ont apporté leurs suffrages au Front national dans le Nord peuvent se sentir coupables de réels sentiments xénophobes, relève Gérard Leclerc dans France catholique. Certes, il est de la responsabilité d’un pasteur de veiller aux normes morales et aux conseils évangéliques, dans le but d’éclairer ses fidèles. Mais lorsqu’un tel désaveu s’oppose à sa parole, il est aussi permis de reprendre le sujet, pour examiner s’il a été traité dans tous ses aspects, et de façon convaincante.”

Mgr Garnier : “Les choses ont changé”

La dernière fois qu’un évêque français avait condamné le FN en le nommant explicitement, c’était en 2002, rappelle Le Pèlerin : Mgr de Berranger, évêque de Saint-Denis, avait alors déclaré : “Le FN est infréquentable”. Une attitude inopportune aujourd’hui, estime Mgr François Garnier, archevêque de Cambrai (Nord) : “Les choses ont changé depuis les années 1980. J’ai aujourd’hui des proches, des baptisés, des membres de ma famille qui sont tentés par le parti de Marine Le Pen. Si je pars en guerre contre le FN, je semble partir en guerre contre eux. Le rôle d’un pasteur est au contraire de les comprendre, de les rencontrer et de les laisser libres. Ce qui me tient à cœur, c’est de garder le contact avec ces chrétiens qui ne sont pas majoritaires, mais ont désespéré des autres partis politiques. Lorsque l’Église appelle à ne pas voter Front national (FN), elle fait paradoxalement de la publicité à ce parti”.

Mgr Rey : “Seul un langage de raison peut relever le débat”

Loin de condamner un parti en stigmatisant ses électeurs, il faut dialoguer sur les vrais enjeux politiques car “seul un langage de raison peut relever le débat”, explique pour sa part Mgr Dominique Rey, évêque de Fréjus-Toulon à Famille Chrétienne : “Dans le contact avec les politiques, je préconise le dialogue et la conviction. Le dialogue suppose de pouvoir débattre avec toutes les personnalités – non pas pour cautionner tel point de vue, mais pour faire émerger une vérité non partisane. La conviction relève des principes d’humanité de la doctrine sociale de l’Église”.

C’est ce double objectif qui avait conduit l’Observatoire socio-politique du diocèse de Fréjus-Toulon à inviter la députée FN Marion Maréchal-Le Pen à participer à son université d’été.

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