“Une autre Somalie à deux pas de nos côtes”, prévient le ministre italien des Affaires étrangères face aux affrontements sanglants et aux succès de Daesh en Libye.La guerre tribale libyenne flambe en face de l’Europe pour le plus grand profit de l’organisation État islamique. Deux gouvernements et deux parlements concurrents se disputent le pays. Le gouvernement reconnu par la communauté internationale est basé à l'Est du pays, à Beida, dans la région de Tobrouk ; le gouvernement rival, basé à Tripoli, est contrôlé par une coalition de milices armées dont certaines islamistes. Un terreau idéal pour la montée en puissance du pseudo État islamique qui s'est emparé de Syrte en juin.
"Une nouvelle Somalie"
"Les pourparlers de paix n'ont que 'quelques semaines' pour aboutir, sous peine de voir le pays se transformer de manière durable en une nouvelle Somalie, a prévenu le ministre italien des Affaires étrangères, Paolo Gentiloni. Soit on conclut dans quelques semaines, soit nous nous trouverons avec une autre Somalie à deux pas de nos côtes et nous devrons réagir d'une autre manière", a déclaré le ministre dans un entretien à La Stampa [17 août]" (Le Figaro).
Les succès de l’État islamique à Syrte, l’ancien bastion de Mouammar Kadhafi, ont provoqué un électrochoc chez les Occidentaux qui assistent depuis quatre ans à la guerre tribale qui ravage la Libye et à l’exode meurtrier et massif de "boat people" en Méditerranée. Si les pourparlers entre les factions libyennes n’aboutissent pas rapidement, "il faudra placer la Libye à l’ordre du jour de la coalition internationale anti-EI, en sachant qu’il ne s’agirait plus de stabiliser le pays mais de contenir le terrorisme", a ajouté Paolo Gentiloni. Quant au flot croissant de migrants, il "résulte directement de la chute de Mouammar Kadhafi qui de son vivant avait conclu des accords avec l’Italie et faisait office de rempart pour contenir les flux migratoires…" (Afrik.com).
Décapitations et crucifixions
Les djihadistes ont commis à Syrte les mêmes exactions qu’en Syrie ou en Irak, décapitant et même crucifiant une douzaine de prisonniers. Il s’agissait de "membres de la tribu Ferjani à laquelle appartient Khalifa Haftar, le commandant de l'armée de Beida, le gouvernement reconnu par la communauté internationale" (Le Figaro). En outre, l’EI a massacré 22 autres combattants blessés sur leur lit d'hôpital : "L'hôpital a été purement et simplement incendié (…). D’autres sources parlent de 150 à 200 morts et d'un véritable massacre" (Le Parisien).
La mission de l'Onu pour la Libye a condamné samedi, 15 août, ces exactions de Daesh à Syrte. Les États-Unis, la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne et la Grande-Bretagne ont fait de même hier, 17 août, dénonçant dans un communiqué commun les actes "barbares" commis par le prétendu État islamique en Libye et appelé les parties rivales à s'entendre sur un gouvernement d'union nationale (L’Orient Le Jour).
La Ligue arabe toujours divisée
Du côté de la Ligue arabe, la division règne. Elle tenait le 18 août, une réunion extraordinaire pour examiner le SOS du gouvernement libyen reconnu par la communauté internationale, demandant une intervention militaire contre l’État islamique à Syrte. Mais la cause semble perdue d’avance : "(…) si quelques pays arabes, dont l’Égypte, sont favorables à une intervention militaire, l’Algérie, quant à elle, campe sur sa position et demeure hostile à toute intervention étrangère sur le sol libyen avec lequel elle partage 982 km de la frontière" (El Watan). L’Algérie se contente jusqu’à présent de renforcer la protection de cette frontière, et s’entend avec la Tunisie pour qu’elle fasse de même sur les 965 km du tracé frontalier entre les deux pays.