C’est un véritable coup de théâtre qui s’est produit au tribunal correctionnel de Perpignan quand, au premier jour du procès, le procureur a annoncé abandonner les charges retenues contre Denis Lambert.À l’ouverture de son procès, le 15 juillet dernier, Denis Lambert, accompagné de ses proches et d’une soixantaine de militants associatifs, n’en est pas revenu.
Convoqué pour avoir facilité le séjour illégal d’un couple d’Arméniens et ses deux enfants de 3 et 6 ans en les hébergeant chez lui entre janvier 2014 et juin 2015, l’homme de 57 ans a eu la surprise de voir, à l’ouverture de l’audience, le procureur de la République en personne se lever et prendre la parole pour annoncer la relaxe du prévenu : "J’abandonne les poursuites, a déclaré le magistrat. À aucun moment, je n’ai reçu de directive de quiconque. Je parle librement en vertu de ma seule conscience. Ces poursuites sont tirées d’une mauvaise interprétation des textes et des faits. L’immunité prévue par la loi concerne largement les faits reprochés à Monsieur Lambert".
"La solidarité, c’est quelque chose d’important"
Depuis le 31 décembre 2012 en effet, le délit d’hébergement de sans-papiers n’existe plus. "Je ne me sentais pas coupable, a confié M. Lambert à nos confrères de TV Sud à l’issue de l’audience, donc je trouve cela normal. Mais il paraît que c’est exceptionnel et je suis donc content que cela puisse servir d’exemple dans toutes les autres situations identiques et que les associations puissent travailler librement. La solidarité c’est quelque chose d’important."
De son côté, son avocat, Me Jean Codognes, a reconnu là "une grande décision" : "Je suis heureux que le parquet ait reconnu que Denis Lambert bénéficiait d’une immunité pénale. Je trouve que c’est à la fois honnête et courageux de la part du procureur de la République qui est venu en personne l’indiquer en demandant l’application de la loi du 31 décembre 2012. Aujourd’hui c’est chose faite".
"Le courage d’accueillir ceux qui cherchent un monde meilleur"
Un engagement personnel de Denis Lambert qui n’est pas sans faire écho aux différents appels que le pape François lance régulièrement à la communauté internationale face à ce qu’il nomme "le drame des migrants". Lors de sa visite à Lampedusa en juillet 2013, il avait interrogé le monde entier autour de deux questions bibliques : "Adam, où es-tu ?" et "Où est ton frère ?", s’indignant à plusieurs reprises de la "mondialisation de l’indifférence". À l’issue de sa visite, le Souverain Pontife avait remercié les habitants de l’île pour leur "exemple d’amour et de charité d’accueil" : "Lampedusa doit être un phare pour le monde entier, avait-il exhorté. Que nous ayons le courage d’accueillir ceux qui cherchent un monde meilleur. Merci pour votre tendresse".