À la veille d’un sommet d’urgence en Thaïlande, le 29 mai, ces découvertes confirment le caractère tragique du trafic des migrants en Asie du Sud-Est.
La découverte par la police nationale de 28 camps et 139 fosses à l’abandon dans le Nord du pays – zone frontalière avec la Thaïlande – dément ce que les autorités Malaisiennes n’ont cessé de répéter, à savoir qu’il n’existait pas de tels charniers ou camps sur leur territoire. "Les autorités ignorent pour le moment combien de corps contient chacune des tombes", a fait savoir le chef de la police. Mais à la taille des camps, révèle-t-elle, le plus grand pourrait avoir abrité jusqu’à 300 migrants, les autres une vingtaine chacun.
Des milliers de boat-people fuyant persécutions et pauvreté
Qu’il y ait un fort trafic d’êtres humain en Malaise, les Églises et plusieurs ONG n’ont cessé d’en faire état, demandant aux autorités de s’impliquer davantage dans la lutte contre ce fléau lié au drame de milliers de migrants fuyant les persécutions ou la pauvreté au Bangladesh et en Birmanie. D’après les organisations de lutte contre la traite des êtres humains, la région frontalière de Wang Kelian est bien connue pour être un point de passage clé des filières de bandes organisées qui acheminent ces migrants vers la Malaisie et au-delà.
Ces deux dernières semaines, plus de 3 500 boat-people ont réussi à accoster en Indonésie, en Thaïlande et en Malaisie. Cette nouvelle découverte de camps de détention et de fosses, quelques semaines à peine après celle de cinq camps dissimulés dans la jungle du Sud de la Thaïlande et de 35 corps, accentue la préoccupation des organisations de lutte qui accusent les autorités "d’être au courant de ce qui se passe et de savoir qui sont ces criminels". Les migrants sont l’objet de chantages par les trafiquants. "Une somme supplémentaire leur est demandée pour les autoriser à franchir la frontière. Si leurs familles ne viennent pas les délivrer en payant une rançon, ils restent prisonniers des passeurs. Les tombes découvertes étaient celles de ceux qui sont morts de maladie ou n’ont pas survécu aux conditions de vie imposées par les esclavagistes", rapporte Bruno Philip, le corresponsant en Asie du Sud-Est pour Le Monde.
La Thaïlande convoque un sommet d’urgence
La Thaïlande, après avoir été accusée de laisser faire ce trafic d’êtres humains sur son territoire, a réagi en convoquant pour le 29 mai prochain un "sommet d’urgence" avec une quinzaine de pays concernés, au premier chef la Malaisie, l’Indonésie, la Birmanie et le Bangladesh, mais aussi les États-Unis et l’Australie. Pour l’heure, l’Indonésie et la Malaisie ont renoncé à l’attitude qui était la leur jusqu’ici, à savoir repousser les bateaux chargés de migrants, et se sont mis d’accord pour accueillir temporairement les milliers de réfugiés qui sont actuellement en mer.
Le 19 mai dernier, le pape François s’était exprimé pour la première fois sur ce drame, évoquant "ces pauvres Rohingyas de Birmanie" chassés de chez eux, qu’il a comparés aux "chrétiens et yézidis" persécutés par l’organisation État islamique en Irak et en Syrie. "Au moment de quitter leurs terres pour fuir les persécutions, ils ne savaient pas ce qui leur arriverait. Et depuis des mois, ils sont sur des bateaux, là-bas… Ils arrivent dans une ville, où on leur donne de l’eau, de la nourriture et puis on leur dit : Allez-vous en d’ici", avait déploré le Souverain Pontife.