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Syrie : Alep entre ciel et guerre

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Sylvain Dorient - publié le 17/04/15
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Un prêtre arménien, le père Yegliche Elias Janji, a créé une école dans les ruines d’Alep en Syrie : « L’Espace du ciel ». Cet établissement gratuit accueille tous les élèves, qu’ils soient chrétiens ou musulmans.
Alep, deuxième ville syrienne, ancienne et dense, voit les bombardements éclaircir chaque jour l’horizon de nouveaux immeubles. Ces derniers s’effondrent et rejoignent le tapis de gravats qui couvre désormais le tiers de la ville… Les habitants qui survivent ici ont le sentiment qu’il n’y aura bientôt plus rien entre le ciel et eux. Le père Janji, en visite en France, retourne à Alep dans deux semaines, sans savoir ce qu’il va trouver à son retour. Il suit avec angoisse les nouvelles des bombardements : ses parents sont restés là-bas et il est sans nouvelles d’eux depuis 20 jours maintenant, Internet ne fonctionnant plus.

« Si les rebelles prennent la ville, nous sommes tous morts »

La récente offensive d’al-Nosra et de l’organisation État islamique terrorise les chrétiens restés sur place. Ils constatent qu’ils sont tout particulièrement visés par les frappes d’artillerie des « rebelles », dont les moyens en armes lourdes et en munitions semblent illimités. Plus aucune ambassade ne délivre de visa pour fuir cet enfer. Même le Liban ferme ses portes et beaucoup de chrétiens perdent espoir, comme l’explique le père Janji à Aleteia. « Les chrétiens d’Occident nous ont abandonnés. Nous sommes bloqués, nous n’avons nulle part où aller. Si les rebelles gagnent la bataille d’Alep, nous sommes tous morts. Beaucoup d’entre nous n’ont plus d’espérance. »

Alep est en guerre depuis trois ans et plus personne ou presque ne peut travailler. Ceux qui n’ont pas réussi à fuir dépendent d’ONG comme Caritas qui leurs fournissent le minimum vital. Avec deux heures par jour d’électricité, une eau potable coupée parfois pendant 15 jours, les combattants qui encerclent la ville rendent la vie des habitants impossible. Le père Janji s’inquiète en particulier pour les enfants et adolescents livrés à eux-mêmes, sans instruction.

« L’Espace du ciel »

Il a créé une école destinée aux 14-18 ans avec 45 professeurs et des moyens de fortune. Deux immeubles sont loués pendant la journée et les salles de classe improvisées sont éclairées par des LED alimentées par des batteries. Les horaires ont été adaptés pour que les 350 élèves ne soient jamais dehors après la tombée de la nuit : les enlèvements sont en effet fréquents. Malgré cette précaution, en 2014, trois élèves ne sont jamais revenus parmi leurs camarades, tués dans les bombardements. Dans cette école laïque dirigée par un prêtre, il n’y a pas de cours de catéchisme : 60% des élèves sont musulmans, mais le père Janji donne des cours de « soutien psychologique ». Il s’agit d’apprendre à tolérer l’autre dans sa pensée, de s’adapter aux différences de coutumes et de religion… Un chantier loin d’être inutile en Syrie.

93% de réussite au Bac

Ces salles de classes improvisées, qui ne peuvent pas contenir plus de 15 élèves, produisent des résultats étonnants, dont un taux de réussite au baccalauréat de 93% – alors que la moyenne nationale n’est que de 60% ! Être admis dans cette école est un privilège, et chaque nouvelle candidature est examinée avec soin après un entretien avec les parents de l’élève aspirant. Mais cette école gratuite dépend des dons, et le prêtre voit les mois s’écouler comme un souci perpétuel : « J’ai de quoi payer les professeurs jusqu’au mois de juillet. Après il faudra l’aide de la Providence ».

Une chorale dans les ruines

Le père Janji a fondé la chorale Naregatsi, en référence à saint Grégoire de Narek, le tout nouveau Docteur de l’Église. Il reprend volontiers la citation de Friedrich Nietzsche dans le Crépuscule des idoles : « Sans la musique, la vie serait une erreur ». Certains morceaux joués sont disponibles via YouTube (ici, un extrait du Requiem de Mozart interprété par la chorale de l’Espace du ciel). Il tient le rôle de chef d’orchestre et, quand on le voit agiter sa baguette, les obus de mortiers semblent bien loin !

Pour venir en aide au père Janji, vous pouvez le joindre par email sur p.yeghiche@gmail.com
 

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