Dans une société contractualiste, quel critère décidera du consentement de tous à l’autorité, en l’absence de toute vision commune de ce qu’est l’homme et la collectivité qu’il habite ?
Depuis les attentats islamistes de ce début d’année à Paris et à Copenhague, la question du « vivre ensemble » devient plus brûlante que jamais, en s’invitant dans tous les débats. Cependant ce n’est pas d’aujourd’hui que cette problématique a surgi.
Bien avant que les terribles événements des tueries djihadistes ne viennent ensanglanter l’actualité, l’installation durable du communautarisme dans notre pays avait déjà dessillé les yeux des plus lucides des analystes. Les autres marinaient dans un confortable déni, jusqu’à ce que la réalité ne se rappelle à leur bon souvenir.
Indétermination
Les attendus du problème sont assez simples à comprendre : lorsque deux groupes de population ne pensent pas la même chose au sujet de réalités essentielles (telles que l’homme, la transcendance, la vie, la mort), le plus probable est qu’ils finissent par vivre leur vie chacun de leur côté.
C’est ainsi que la fin des grands modèles humanistes, l’indétermination de l’idée de l’homme qui s’en est suivie, le recul des pratiques religieuses qui homogénéisaient la culture, l’éclatement du monde rural, la mobilité géographique professionnelle, l’immigration massive, le repli des classes moyennes vers les zones périurbaines (phénomène magistralement analysé par Christophe Guilluy), ont rendu ce « vivre ensemble » très problématique en France.
À ces facteurs est venu s’ajouter le danger de l’islamisme, lui-même issu d’une religion pour laquelle l’articulation du spirituel et du temporel reste encore très problématique.
Assentiment
Dans ces conditions l’homme de la rue est fondé à s’interroger au sujet des valeurs communes sur lesquelles pourrait s’édifier une société dans laquelle il ferait bon vivre, dans laquelle aucune
« communauté » ne se sentirait à l’écart, ne serait conséquemment tentée par le réflexe sécessionniste.
Face à la menace d’éclatement de la société en communautés repliées sur elles-mêmes, notre pays ressent l’urgence de renouer avec des « valeurs » fédératrices capables de ressouder une unité nationale qui menace de se fissurer. Mais lesquelles ? Le « vivre ensemble » en postmodernité ne peut s’accommoder d’une unité qui serait cimentée par la seule contrainte, insidieuse ou plus directe. À l’ère des réseaux sociaux et de la « détraditionalisation », une idéologie imposée unilatéralement, et « de haut », n’a aucune chance d’obtenir l’assentiment des citoyens. Lire la suite sur Liberté Politique