« Monsieur le Président de la République, considérez-vous que les chrétiens de France soient des membres à part entière de la République ? », demande l’abbé Jean-Claude Brunetti.
« À Paris et à Copenhague, on tue des Français ou des Danois parce qu’ils sont juifs. Mais en Libye, on tue des Égyptiens… » L’abbé Jean-Claude Brunetti, prêtre du Prado, du diocèse de Chambéry, a écrit le 18 février une lettre ouverte à François Hollande. Une lettre que vous pouvez consulter dans son intégralité en cliquant ici.
« Je ne vous écris pas dans un esprit de revendication, ma lettre est simplement l’expression d’une déception et d’une peine sincère, celle de me sentir en tant que membre d’une institution et en tant que personne particulière, non reconnu et pratiquement méprisé par les responsables de mon pays.
Ces derniers temps vous avez souvent parlé de "nos compatriotes musulmans", des "juifs de France", pour lesquels vous avez multiplié les gestes de solidarité, et vous avez eu entièrement raison, compte-tenu des événements tragiques des 7 au 9 janvier. Deux personnes qui se reconnaissaient dans le christianisme ont perdu la vie dans ces événements. On a peu parlé d’elles, rien d’anormal à cela, car elles n’ont pas été tuées en raison de leur religion, elles assuraient simplement la sécurité des autres…
Mais, lorsque 21 coptes d’Égypte sont assassinés en Libye, assassinat clairement défini comme une menace adressée "au peuple de la Croix, fidèle à l’Église égyptienne ennemie" et que l’Élysée parle à deux reprises de "l’assassinat sauvage de 21 ressortissants égyptiens"… cela me blesse profondément.
A Paris et à Copenhague, on tue des Français ou des Danois parce qu’ils sont juifs. Mais en Libye, on tue des Égyptiens… Ce parti-pris d’ignorance est vraiment le signe d’un mépris pour les chrétiens, c’est du moins comme cela que je le ressens, monsieur le Président. (…) Il ne faut pas oublier que, de par le monde, le christianisme est la religion la plus persécutée (très souvent par les tenants d’un islam sinon terroriste, du moins fondamentaliste), comme le souligne l’étude documentée récemment parue aux éditions XO, intitulée Le livre noir de la condition des chrétiens dans le monde. (…)
Il est souvent question des dégradations de mosquées ou de synagogues, ce qui est déplorable, bien évidemment, mais le fait que l’évêque de l’Ain ait été amené à prendre la décision de laisser les tabernacles dans toutes les églises de son diocèse, vides et portes ouvertes pour dissuader les auteurs de profanations de ciboires et d’hosties, ne mérite pas qu’on en parle…
Je comprends très bien que l’institution Église ne vous attire pas spécialement, elle n’a pas toujours eu une histoire glorieuse, Mais c’est le propre de toute institution, en connaissez-vous une de parfaite ? La République elle-même n’a-t-elle pas quelques cadavres dans ses
placards ? Est-ce une raison pour ne pas l’aimer, pour ne pas souhaiter qu’elle s’améliore ?
Il y a aussi le fait que récemment certains chrétiens aient pu prendre des positions qui vous agacent… Que des citoyens ne pensent pas comme vous, c’est la gloire de la République et de la liberté d’expression dont vous êtes un ardent défenseur.
J’ai simplement voulu vous dire, en tant que citoyen d’un pays que j’aime au moins autant que vous, combien votre humanisme rétréci et votre laïcité à géométrie variable me déçoivent, conclut le père Jean-Claude Brunetti. Je vous conserve le respect dû à vos fonctions, cette lettre en est d’ailleurs un signe. Je vous souhaite la meilleure fin de mandat possible. »