“Nous sommes testés, et nous avons échoué.” L’actrice et ambassadrice de l’ONU a rendu visite aux réfugiés de Khanké, au nord de Mossoul.
Tout a changé en Irak, en pire. Angelina Jolie n’y était pas retournée depuis 2002, avant la déferlante islamiste. L’ambassadrice de bonne volonté du Haut-commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a cette fois visité le camp de réfugiés de Khanké, au nord de Mossoul, dans le Kurdistan irakien. Un camp qui abrite des dizaines de milliers de Yezidi et de réfugiés ayant dû fuir leur maison à Mossoul, après l’invasion de l’auto proclamé Etat Islamique.
Selon l’actrice, venue par surprise afin de donner un large écho médiatique à la situation des réfugiés sur place, "trop d’innocents paient le prix du conflit en Syrie et de l’expansion de l’extrêmisme. La communauté internationale doit faire plus. Nous sommes testés, ici, en tant que communauté internationale. Et pour l’instant, malgré d’immenses efforts et de bonnes intentions, nous avons échoué."
Lors d’une conférence de presse au sein du camp, elle le reconnaît : "Rien ne vous prépare aux histoires horribles de ces survivants, kidnappés, abusés, exploités, et au fait de voir qu’ils ne reçoivent pas l’aide dont ils ont besoin et qu’ils méritent." Angelina Jolie ne cache rien des difficultés vécues au quotidien par les centaines de milliers de réfugiés : " J’ai rencontré des femmes qui ont été kidnappées puis qui ont fui et qui sont maintenant trop traumatisées pour parler. J’ai vu des familles avec des enfants qui vivent sans tente alors qu’il reste encore deux mois d’hiver, des enfants dont les parents ont été tués et qui sont maintenant seuls."
"Qui peut les blâmer de penser que nous les avons abandonnés ?"
" Je suis allée en Irak cinq fois depuis 2007 et je n’ai jamais vu une souffrance telle que celle dont je suis témoin aujourd’hui", a-t-elle également souligné dans une tribune publiée à son retour par le New York Times. "Cela fait des années que je visite des camps. Je m’assois dans les tentes et j’écoute leur histoire, je fais de mon mieux pour les aider, pour exprimer ma solidarité. Cette fois, je suis restée sans voix. Que pouvez-vous dire à une mère en pleurs qui vous dit que sa fille est entre les mains de l’État islamique, et qui vous dit qu’elle voudrait être avec elle ? Que même si elle devait être torturée et violée, ce ne pourrait être pire que de ne pas être avec sa fille. Que pouvez-vous dire à une adolescente de treize ans qui décrit l’entrepôt où elle vivait avec d’autres, et d’où on la tirait trois fois par jour pour la violer ? Que voulez-vous dire à une femme de votre âge qui vous regarde dans les yeux et vous dit que toute sa famille a été tuée devant elle, et que maintenant elle vit seule sous une tente, avec le minimum à manger ?"
23 millions de personnes déracinées
En quatre ans, près de la moitié de la population syrienne, 23 millions de personnes, ont été déracinées. Rien qu’en Irak, plus de deux millions de personnes ont fui le conflit et la terreur des groupes extrêmistes. "Au total, ce sont 13 millions de personnes qui ont été chassées de chez elles par les violences en Irak et en Syrie", a souligné Neil Wright, le représentant du HCR en Irak, Plus de deux millions de personnes ont été déplacées en Irak en 2014 et près de la moitié d’entre elles ont trouvé refuge dans la région autonome du Kurdistan irakien, au nord de Bagdad. Une situation ingérable, alors que les fonds ne suivent pas : "Le HCR n’a reçu que la moitié des financements dont il avait besoin en 2014 pour ses programmes en Irak et en Syrie, et il est très inquiet du rythme très lent des promesses de dons cette année", a souligné Angelina Jolie. Pour la star hollywoodienne, fortement et sincèrement impliquée dans l’aide humanitaire, "l’aide est venue, mais elle est loin en dessous des besoins sur le terrain", affirme-t-elle. En tant que parent, je ne peux pas imaginer une pire horreur."