Les passeurs se lancent dans le transport de masse en Méditerranée : à quelques jours d’intervalle, ils ont abandonné en mer deux cargos chargés de centaines d’immigrants clandestins.
Deux jours après le sauvetage du Blue Sky M, un cargo battant pavillon moldave qui fonçait, moteur bloqué à pleine puissance, vers les côtes italiennes sans pilote ni équipage avec plus de 760 migrants à bord, un autre navire, L’Ezadeen, immatriculé au Sierra Leone, a été secouru par l’armée italienne. Des marins ont été héliportés à son bord en pleine tempête, alors qu’il dérivait, à court de carburant, au large des côtes des Pouilles, dans le sud-est de l’Italie, avec 450 migrants à son bord dont des femmes et des enfants. Lui aussi avait été déserté par son équipage. « Les migrants, incapables d’en prendre le contrôle, avaient alerté les autorités italiennes par téléphone satellitaire » (Actu Orange).
Depuis le canot pneumatique et le rafiot rafistolé jusqu’au cargo, tous les moyens sont bons pour les négriers du XXIe siècle qui n’ont pas plus de scrupules que ceux de jadis.
« Les passeurs ont changé de tactique ces derniers temps, préférant quitter les navires en cours de traversée, notamment du fait de l’abandon par l’Italie de son opération de secours et de recherche Mare Nostrum, et en raison de l’intensification des combats en Libye, a déclaré à Reuters Carlotta Sami, porte-parole du HCR (Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés). Les passeurs activent le système de pilotage automatique du navire, dans les eaux internationales, puis prennent la fuite à bord d’un plus petit bateau, a-t-elle expliqué » (France 24).
Pas de police maritime internationale
Pour que la mer « cesse d’être une zone de non droit », « il faut absolument revoir le droit maritime international » et instaurer une police maritime internationale en haute-mer, remarque Christian Buchet, le directeur du Centre d’études sur la mer, sur France Info : « On a éradiqué ces navires-poubelles en Europe il y a quelques années à la suite de catastrophes comme l’Erika. Ces vieux cargos aujourd’hui ne fréquentent plus les eaux européennes. Dans ces deux cas, ils ont été achetés par une bouchée de pain par des armateurs douteux qui les envoient une ultime fois pour une traversée en Europe avec des immigrants ».
Pas de politique européenne d’immigration
« Tant qu’il n’y aura pas de politique commune européenne d’asile et d’immigration avec un véritable projet derrière, tant que les politiques européennes se résumeront à la surveillance des frontières et à la lutte contre les passeurs, (…) ce genre de drame se reproduira », souligne François Gemenne, chercheur aux universités de Liège et de Versailles-Saint Quentin en Yvelines, interrogé par RFI.
Avec une moyenne de 450 migrants arrivant chaque jour en Italie, le total des arrivées dépasse 160 000, dont plus de la moitié sont syriens ou érythréens. Face à cet afflux croissant, l’Italie se sent abandonnée par l’Europe (Aleteia).