Tout juste rentré de Rome où il a déposé le dossier pour l’examen d’un miracle attribué à Marthe Robin, le postulateur de sa cause de canonisation revient sur cette figure mystique et l’impact qu’elle a eu sur sa propre vie.Pour quelles raisons avez-vous été choisi comme postulateur de sa cause de canonisation ?
Père Bernard Peyrous : La cause a été commencée par le père Jacques Ravanel, qui était le Père du foyer de la Flatière (Haute-Savoie) à l’époque. Il a été le premier postulateur, menant la partie romaine jusqu’en 1996. Il m’avait demandé d’être son adjoint en tant que vice-postulateur car il avait besoin d’un historien. En 1996, il était trop chargé, il ne voulait pas continuer et il m’a été demandé d’être postulateur… « bêtement » pour une question de diplôme !
Vous aviez rencontré Marthe de son vivant ?
Père Bernard Peyrous : Je l’ai rencontrée quatre fois dans le courant de l’année 1980. Je lui dois ma vocation de prêtre. C’est lors d’une discussion avec elle qu’elle m’a posé la question du sacerdoce alors que j’étais encore enseignant. Je suis un produit de Marthe Robin. À l’époque, je rencontrais un problème pour ma thèse avec mon patron. Je suis donc allé voir Marthe pour qu’elle m’aide à le résoudre. Ce qu’elle a fait en une phrase. Et en continuant à discuter avec elle, elle m’a posé la question du sacerdoce. Je n’y avais alors jamais pensé. C’était lié à une évolution intérieure qu’elle avait perçue. J’ai tout de même soutenu ma thèse deux ans plus tard et je suis rentré au séminaire.
Il peut paraître surprenant de se tourner vers elle pour une difficulté aussi concrète…
Père Bernard Peyrous : Je l’avais rencontrée une fois et j’avais trouvé que c’était un « monument de bon sens ». Et comme ma situation était assez complexe, je me disais que pour m’en sortir, il fallait vraiment avoir du bon sens, le sens du conseil. Et en effet, elle a trouvé la solution. Certains venaient la voir pour savoir s’ils devaient se présenter à l’Académie française et d’autres pour savoir dans quel établissement mettre le petit dernier ou quelles plantes semer dans les champs l’année suivante !
Quelles ont été les étapes pour en arriver à cette proclamation des vertus héroïques de Marthe Robin ?
Père Bernard Peyrous : Marthe est morte en 1981. La partie diocésaine du procès a commencé en 1986, car il faut attendre cinq ans avant d’entamer un procès. Ce chapitre local a été mené entre 1986 et 1996. Le dossier a alors été transmis à Rome. Nous venons de conclure toute cette première partie. La deuxième étape est la béatification, si un miracle est reconnu : Marthe serait alors déclarée bienheureuse. Et la troisième étape est la canonisation. Si un nouveau miracle est reconnu, la personne est déclarée sainte.
Quelles sont les prochaines échéances en ce qui concerne le cas de Marthe ?
Père Bernard Peyrous : J’étais à Rome mardi (11 novembre, ndlr). Nous avons demandé l’ouverture du procès sur un miracle. Cet examen peut prendre du temps. Nous avons un « bon miracle », largement documenté du point de vue médical. Nous l’avons déposé et attendons maintenant son approbation ou son refus par Rome. Mais j’espère qu’ils vont l’approuver !
Combien de temps cette étape peut-elle prendre ?
Père Bernard Peyrous : Impossible à dire. Je dirais un minimum de deux ans, peut-être cinq. Après nous pouvons parfois être surpris… Nous avons encore beaucoup de travail devant nous, nous n’en sommes pas au bout.
Que peut apporter le message de Marthe Robin à la France de 2014 ?
Père Bernard Peyrous : Marthe a beaucoup prié pour la France, elle avait beaucoup d’espoir dans l’avenir de notre pays, même si elle ne se faisait aucune illusion sur ses difficultés. D’une manière générale, le visage de Marthe est très touchant car c’est le triomphe de la faiblesse. Cette femme était gravement handicapée et elle a, depuis son lit, aidé des milliers de gens. Les chiffres sont énormes. Cela montre bien que même dans des situations d’extrême faiblesse, Dieu peut déployer sa force. Autrement dit, rien n’est impossible à Dieu et rien ne peut L’arrêter. Et cela, nous avons besoin de l’entendre.
Propos recueillis par Mathilde Rambaud