Sévérité teintée d’accablement : les commentateurs de tous bords estiment que le président de la République s’est enfoncé davantage, hier soir, 6 novembre, sur TF1.Mais qu’allait-il faire dans cette galère ? Eh bien, ramer « comme un galérien », constate L’Express. Et sans convaincre : « Annonces compliquées, floues et stature présidentielle tirée vers le bas : le chef de l’État n’a pas été à la hauteur jeudi soir sur TF1 de la mission qu’il s’était assignée ». Pourtant, « son entourage avait prévenu, c’était ce soir ou jamais ». Le naufrage semble donc consommé. C’est fâcheux pour lui, encore plus pour la France ! Sa fonction n’en sort pas grandie : « L’émission est à peine commencée que le voilà déjà en train de s’expliquer sur sa cravate de travers, sur sa tendance à attirer la pluie : "On me reproche même de manger des frites", observe-t-il avant de lancer avoir "fréquenté les bistrots" pendant 30 ans. Du poste de commandement, François Hollande est tiré immédiatement vers le fond de cale ».
« Opération ratée, confirme Valeurs Actuelles. Au terme d’une émission laborieuse et poussive, François Hollande n’a pas plus éclairé les Français sur la politique qu’il compte mener pour les deux ans de mandat qu’il lui reste. » C’est la faute de l’embarcation de secours dont « le format s’est refermé sur lui comme un piège », plaide Libération : « L’échange entre François Hollande et les quatre Français qui se sont succédé sur le plateau de TF1 n’aura rien produit. (…) Ils sont tous venus avec leur problème spécifique. Et consciencieusement, Hollande a cherché à trouver une réponse adaptée à chacun. Quitte à perdre le téléspectateur en cours de route. Il a été successivement responsable de Pôle emploi (avec la retraitée au chômage et le jeune au RSA), conseiller fiscal (avec la patronne de PME), recteur de l’Éducation nationale (avec l’assistante maternelle venue dénoncer la fermeture de son collège), mais rarement président de la République ».
Le problème est bien là : sa stature, estime Christian Combaz. L’écrivain se demande dans Figaro Vox si le degré d’exposition narcissique de François Hollande n’explique pas, à lui seul, pourquoi les Français ont envie de lui donner une leçon : « Ce qui frappe une fois de plus, c’est la fréquence indécente du Moi-je. À l’écoute de ses annonces dont certaines semblaient improvisées, on était frappé par le nombre invraisemblable des : j’ai voulu, j’ai décidé, je veillerai, voilà quel est mon cap, je maintiens les crédits, je veux que la France. (…) Les gens ne sont plus dupes de ce caractère qui présente toutes les décisions toutes les initiatives comme issues de son cerveau fécond, et tous les efforts, les sacrifices, les concessions, les études préliminaires comme collectifs ».
Même impression d’Anne Sinclair dans le Huffington Post, qui avoue sa gêne : « Nous étions gênés, dès le début, d’entendre le président de la République disserter sur ses rêves et cauchemars quand les Français ont exprimé, depuis des mois, par les urnes et par les sondages, leurs frustrations, leur mal-être, leur désarroi, leurs difficultés de vie. Gênés de l’écouter parler des reproches qu’on peut lui faire, des douleurs qu’il a pu causer, des casques de scooter qu’il a pu porter, de la pluie qu’il ferait tomber. Gênés de le voir s’expliquer pour la énième fois sur sa "normalité" revendiquée dans une France "exceptionnelle" ».
Et sur le fond ? À part une très inquiétante persistance à promettre une loi sur la fin de vie (Huffington Post), une seule véritable annonce, positive celle-ci : « À partir de l’année prochaine, il n’y aura pas d’impôt supplémentaire sur qui que ce soit ». Toutefois, relève Le Figaro : « Pas sûr que cette promesse aille au-delà de l’impôt sur le revenu. Interrogé sur le projet, apparu ces derniers jours, de créer une surtaxe d’habitation sur les résidences secondaires peu occupées dans les zones tendues, François Hollande n’a d’ailleurs pas critiqué cette initiative, supposée libérer des logements, notamment à Paris. Sans compter que le premier Ministre a annoncé aujourd’hui que la possibilité donnée aux départements de relever leurs droits de mutation à titre onéreux (ou
« frais de notaires ») de 3,8 % à 4,5 %, censée être limitée à deux ans, serait désormais sanctuarisée. Le chef de l’État n’a pas non plus pu prouver que les hausses massives d’impôts depuis son arrivée au pouvoir avaient réellement servi à quelque chose… ».
Bref, l’annonce d’un arrêt des hausses d’impôts dès 2015 n’est pas plus crédible que le reste : « Le gouvernement avait déjà promis d’arrêter d’augmenter les impôts après 2013, avant que François Hollande admette que c’était impossible », rappelle Le Monde.