Le synode sur la famille et ses débats parfois animés viennent de le montrer : l’équilibre peut parfois être difficile à trouver entre le Magistère de l’Eglise et son message de miséricorde et de grâce.
Après tout, il se pourrait bien que le Saint-Père soit bel et bien un révolutionnaire, à la recherche d’un nouveau type d’œcuménisme pour guérir la division entre gauche et droite. Nous sommes tellement habitués à cette division que tout ce que nous pouvons faire maintenant est de plisser les yeux à travers nos regards fatiguées – et voir le Synode en soi à travers ce même regard fatigué. Mais ce n’est pas là un chemin de sagesse. L’Eglise ne peut se comprendre à travers les catégories du chaos humain. Elle est au contraire l’unique planche de salut en dehors du chaos, la seule et unique institution qui puisse, de façon crédible, promettre un chemin vers l’unité.
Suivre le chemin de la miséricorde
Selon François, le chemin à suivre est celui de la miséricorde. Au cœur même d’Evangelii Gaudium, il cite ainsi : “Saint Thomas d’Aquin explique que, quant à l’agir extérieur, la miséricorde est la plus grande de toutes les vertus : ‘En elle-même la miséricorde est la plus grande des vertus, car il lui appartient de donner aux autres et, qui plus est, de soulager leur indigence’” (EG, 37) Quand il aborde les conséquences pastorales de ce chemin de la miséricorde, le Pape constate que “quand on parle plus de la loi que de la grâce”, le message de l’Eglise courra le risque de ne plus avoir “le parfum de l’Évangile”. (EG, 38-39)
Comment porter un message de grâce ?
Maintenant, dans un tel moment de confusion quasi universelle s’agissant de Dieu et des hommes, comment porter le message de grâce et de miséricorde sans pour autant négliger les enseignements du magistère de l’Eglise ? La principale difficulté réside sans doute dans le fait que l’enseignement de l’Eglise est choquant en soi, surtout en matière de mariage et de famille. Le simple fait de décrire ce que nous croyons donne l’impression d’être une attaque contre ceux qui vivent différemment. Une distance se crée entre nous, là même où nous sommes censés favoriser un lien maternel étroit. Le Pape nous pousse à résoudre la difficulté – à la façon de Newman – à propos de la mission évangélisatrice de l’Eglise. Une " difficulté " est différente d’un " doute ". Douter, c’est se demander si une chose peut être faite. En revanche, rencontrer une difficulté, c’est plutôt se demander comment la surmonter. Cette question part de la foi et demande des moyens. Un doute, en revanche, présuppose les moyens et questionne la foi.
Je soupçonne que c’est ce que François espère du Synode – le dur travail sur un chemin de miséricorde appliqué à ce qui est sans doute la crise humanitaire la plus urgente de notre temps : l’échec épidémique de vivre le mariage et la famille d’une manière compatible avec un authentique épanouissement humain. Considérez ces lignes de l’avant-propos du document préparatoire du synode :
Ces lignes confirment l’idée que le travail sur la tension pastorale entre loi et grâce via la miséricorde est précisément l’objet du Synode sur la famille. Dans cette optique, on pourrait proposer une analogie : tout comme Vatican II a proposé une position sur l’œcuménisme après des siècles de guerres religieuses, peut-être que cet "accent explicite mis sur la miséricorde " est destiné à mettre en lumière les guerres culturelles réelles et douloureuses des dernières décennies – la "désintégration" qui correspond à des modèles de la famille plus qu’à tout autre facteur politique ou idéologique.
Traduit de l’édition anglophone d’Aleteia par Elisabeth de Lavigne
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