Dans une interview accordée au quotidien La Croix, le Premier Ministr affirme vouloir lutter contre la GPA. Mais ses promesses ne convainquent pas, ni ceux qui vont manifester, ni son propre camp.
C’est ce que les spécialistes en communication politique appellent une opération de déminage médiatique. (lire notre article ici). Fallait-il lui offrir cette vitrine à trois jours d’une double manifestation familiale qui promet d’être conséquente ? Et faut-il accorder du crédit à ses promesses dignes d’un Janus d’interdire GPA et PMA quand, au contraire, le gouvernement ne fait pas appel de la récente décision de la CEDH ? Les réactions politiques dubitatives quant à cette interview se multiplient.
Inefficace et incohérent
Pour Madeleine de Jessey, porte-parole de Sens Commun, « prétendre vouloir lutter contre la GPA tout en refusant de poursuivre en justice les couples recourant à des mères porteuses est inefficace et incohérent. La manœuvre des gouvernements de gauche depuis des années est claire et ne trompe plus personne : multiplier les états de fait pour finir par contraindre le législateur à leur donner un cadre légal. Cette prétention est d’autant moins crédible qu’elle est proférée par celui-là même qui déclarait il y a trois ans : « Contrairement à ce que disent ceux qui sont par principe hostiles à la GPA, je crois que si celle-ci est maîtrisée, elle est acceptable, et j’y suis donc favorable. » Des centaines de milliers de Français ont défilé dans les rues pour avertir le gouvernement des conséquences désastreuses d’une telle loi : le gouvernement n’a pas voulu les voir, en a nié les répercussions et feint de réaliser maintenant les insécurités juridiques que son texte crée. Le réveil vient trop tard et ne convainc plus personne.Face à ces contradictions permanentes, le gouvernement, s’il veut être crédible, doit passer des paroles aux actes ! »
Ambivalence ? Ambiguïté ? Hypocrisie ?
Pour Le président du Parti Chrétien Démocrate, Jean-Frédéric Poisson, Manuel Valls et la GPA, c’est un remake d’« Au théâtre ce soir » : "Le Premier ministre affirme dans le journal La Croix ce matin que la GPA demeurera interdite en France. Mais le Gouvernement qu’il dirige n’aura rien fait pour contrecarrer les récentes décisions judiciaires qui, sans légaliser la pratique de la GPA en France, en légitiment pourtant les effets. Ambivalence ? Ambiguïté ? Hypocrisie ? A choisir… Ce qui est certain, c’est que depuis l’origine, ceux qui comme nous ont alerté sur les conséquences inéluctables du mariage pour tous avaient effectivement raison. Les dénégations de Madame Taubira à l’époque, et celles de Monsieur Valls aujourd’hui n’y changent rien. Le Gouvernement est menotté par la nécessité de tenir au calme les éléments les plus libertaires de sa « majorité » : en réalité, la protection des personnes contre la marchandisation du corps humain est le cadet de ses soucis. C’est un renoncement supplémentaire de cette pseudo gauche qui sacrifie de plus en plus souvent ses idéaux aux logiques de marché."
Ces annonces ne seront jamais appliquées
De l’autre côté de l’échiquier politique, Sergio Coronado, député EELV des Français de l’étranger, est encore plus clair, à sa manière, en soulignant que ces annonces resteront lettre morte : "d’un point juridique, ces annonces ne seront jamais appliquées. D’abord parce que la décision de la CEDH du 26 juin s’impose à notre pays. Rappelons que la CEDH a pour objectif de défendre les citoyens contre l’arbitraire des Etats. Ensuite, la convention de New York, dont l’objet est la protection de l’intérêt de l’enfant dont nous sommes signataires, s’impose également à nous. Même si le Premier ministre souhaite abroger la circulaire Taubira, ces deux textes cités contredisent sa position."
Enfin, au sein de son propre parti, Juliette Méadel, l’une des porte-parole du PS, a affirmé vendredi que la question de la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples homosexuels n’était "pas tranchée au PS" estimant que le parti devrait "aborder à un moment donné" celle de la gestation pour autrui (GPA).