Vendredi, les djihadistes ont expulsé les derniers chrétiens de Qaraqosh. Mais ils ont gardé Cristina, une enfant chrétienne âgée de trois ans…
Alors que, chaque jour qui passe, les actes innommables s’enchaînent, que l’insoutenable n’est plus à prouver, le calvaire des chrétiens d’Irak se poursuit. Qui les finance ? Qui les soutient ? Y aura-t-il, au nom de l’humanité, un nouveau tribunal de Nuremberg pour juger les responsables de ces actes ?
Pour l’instant, une quarantaine de réfugiés chrétiens d’Irak ont été accueillis en France. Mais sur place, les demandes d’asile se comptent par dizaines de milliers. "Les chrétiens surtout ont le sentiment qu’ils n’ont vraiment plus leur place dans la société irakienne", estime Sébastien de Courtois, journaliste indépendant et spécialiste des minorités chrétiennes d’Orient, à son retour d’Irak et du Kurdistan.
Vendredi dernier, les combattants de l’Etat Islamique ont expulsé manu militari les derniers chrétiens encore présents à Qaraqosh. Dépouillés de leurs derniers biens, ils sont une petite centaine à avoir été entassés dans deux bus avant de devoir marcher sous la chaleur jusqu’aux premières lignes kurdes. Des personnes âgées, des malades…
Mais d’après des témoignages concordants, les islamistes n’ont pas pris que l’argent, l’or et les papiers d’identité des derniers chrétiens de Qaraqosh. Comme le relate l’envoyé spécial Eric Biegala sur l’antenne de France Info (un reportage à retrouver ici), ils ont aussi kidnappé femmes et enfants, encore une fois.
Parmi elles figure Cristina, la petite fille de Toba et Aida Hreler Azor, à peine âgée de trois ans. Ses parents n’ont eu le choix qu’entre la laisser ou être tués sur place. Ce sont au total des milliers de femmes et de jeunes filles chrétiennes et Yezidi qui ont ainsi été enlevées ces dernières semaines par les islamistes, qui se comportent en cela comme leurs coreligionnaires de Boko Haram. Selon différents témoignages fiables, autour d’un noyau de quelques chefs cinquantenaires, ce sont moins de 200 hommes qui tiennent Qaraqosh, dont bon nombre ne sont en fait que des jeunes garçons de 16 à 17 ans. Le récit est le même sous la plume de Laurence Desjoyaux, pour l’hebdomadaire La Vie, qui signale que l’on parle aussi de l’enlèvement d’une jeune femme de 30 ans, Rita. Un récit de terreur, de fuite éperdue, de menaces d’exécution, parfois par d’anciens voisins sunnites ayant rejoint les forces islamistes : « J’ai une famille de chrétiens qui ne veut pas se convertir, qu’est-ce qu’on en fait ? ». Un homme témoigne : "Ils ont fait tomber la croix du clocher de l’église Mar Yohanna, juste à côté de chez moi. J’ai tout vu depuis mon toit.» Une femme raconte qu’elle ne sait pas où est sa mère, partie de Qaraqosh dans une autre voiture. Elle répète en boucle en se tordant les doigts : «Maryam El Azra, Maryam El Azra», «Vierge Marie, Vierge Marie…»