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Saint Bernard (1090-1153), chevalier de Notre Dame

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Fêtée le 20 août, cette âme de feu qu’on considère souvent comme le dernier docteur de l’Eglise professait que « la volonté de Dieu est que nous ayons tout par Marie ».
Du blogue de Jacques Gauthier

De 1973 à 1977, j’étais novice à l’abbaye cistercienne d’Oka, près de Montréal. C’est là que j’ai découvert saint Bernard et la spiritualité cistercienne. Figure importante de l’Occident chrétien, Bernard de Clairvaux demeure actuel aujourd’hui. Sa doctrine, comme ses actes, reflète les inspirations d’une nature mystique et contemplative, prompte à s’irriter contre tout ce qui peut éloigner de Dieu. Celui qui a donné le véritable envol à l’Ordre cistercien ne dissocie jamais le discours de l’expérience, la théologie de la spiritualité. Pour certains, il est le dernier des Pères de l’Église par sa connaissance amoureuse de la Bible, de la liturgie et de la tradition.
 
L’aventure cistercienne

Bernard de Clairvaux est né en 1090 dans une famille noble, au château de Fontaine, près de Dijon. Son père, Tescelin, était le seigneur de Fontaine et chevalier du duc de Bourgogne. Sa mère, dame Aleth de Montbard, sera vénérée comme bienheureuse. Ils eurent de nombreux enfants. À la mort de sa mère en 1112, Bernard entre avec trente compagnons, frères et cousins, à l’abbaye de Citeaux, fondée en 1098 par saint Robert. Le monastère était dirigé par saint Étienne Harding.
Après quinze années de dur labeur à construire le monastère, il n’y avait qu’une poignée de moines, et plusieurs doutaient de plus en plus du bien-fondé de leur mission : revenir à la pureté de la Règle de saint Benoît. Le nouveau monastère avait besoin de jeunes hommes en santé qui délaisseraient les fêtes, les joutes et les guerres pour affronter le désert de Cîteaux. Aussi est-ce avec grand soulagement que l’abbé Étienne voit arriver Bernard et ses amis. Son père et ses autres frères le suivront plus tard.
En 1115, Bernard est chargé de fonder l’abbaye de Clairvaux, la claire vallée. Il y restera abbé jusqu’à sa mort. Assoiffé de contemplation, il sera pourtant appelé à parcourir les chemins de l’Europe. Au concile de Troyes, il reconnaît l’Ordre des Templiers et rédige leur Règle de Vie.
 
Un guerrier spirituel

À partir de 1130, Bernard règle les conflits qui existent dans la papauté, ralliant le roi de France et l’empereur d’Allemagne à la cause de l’unité de l’Église. Homme de vérité, il s’oppose au théologien Abélard, l’amant d’Héloïse, et obtient sa condamnation au concile de Sens, en 1140. Il conseille le pape Eugène III, ancien moine de Clairvaux, qui lui demande de prêcher la seconde croisade. Sa voix est si forte à Vézelay qu’on l’entend très loin dans les champs. À Noël 1146, il prêche à Spire. Il intervient à Mayence pour empêcher les massacres de juifs par les fanatiques. On le consulte de partout.
Durant ce temps, de nouvelles abbayes cisterciennes surgissent un peu partout en Europe. Celui qu’on appelle le second fondateur de l’Ordre cistercien meurt en 1153. Il laisse derrière lui plus de 160 moines à Clairvaux, tandis que la nouvelle famille cistercienne compte près de 350 abbayes.
Grand meneur d’âmes, animateur de la vie spirituelle, conseiller des évêques, gloire du XIIe siècle, Bernard est canonisé en 1173 par le pape Alexandre III, puis déclaré docteur de l’Église par Pie VIII en 1830. L’oraison du jour de sa fête, le 20 août, résume bien la place déterminante qu’il occupa dans l’Église et le zèle qui le dévorait : « Seigneur, tu as voulu que saint Bernard, rempli d’amour pour ton Église, soit dans ta maison la lampe qui brûle et qui éclaire; accorde-nous, par son intercession, la même ferveur de l’esprit, afin de vivre comme des fils de la lumière. »
 
La connaissance amoureuse de Dieu

Saint Bernard a non seulement vécu intensément, il a aussi beaucoup écrit. Ce fin lettré a une plume alerte qui suit le mouvement de son cœur aimanté au Christ et à Marie, sa Dame qu’il aime beaucoup. Vrai chercheur de Dieu, il se livre à une connaissance amoureuse de Dieu, qu’il traduit dans une prose superbe. Le traité de l’amour de Dieu et ses quatre-vingt-six Sermons sur le Cantique des cantiques, chant nuptial où il décrit l’union mystique de l’âme-épouse avec le Verbe-époux, demeurent des œuvres d’une grande beauté littéraire et d’une profondeur spirituelle où transparaît son désir de Dieu.

Ce désir caractérise la nature humaine et grandit avec l’alternance de présence et d’absence de l’Époux dans l’âme et dans l’Église. Il décrit à merveille ce cache-cache divin dans sa somme de théologie spirituelle que sont ses Sermons sur le Cantique des cantiques. Pour Bernard, influencé par saint Augustin, « l’amour est à soi-même son mérite et sa récompense ». Il écrit : « La raison d’aimer Dieu, c’est Dieu même; la mesure de l’aimer, c’est de l’aimer sans mesure. »
Le saint moine montre que l’être humain est par nature capable de s’unir à Dieu. L’unique moyen pour y arriver est l’amour, ce qui implique une connaissance de soi-même et de Dieu. Il écrit dans son Traité de l’amour de Dieu : « Mon Dieu, mon soutien, je vous aimerai pour tout ce que vous m’avez donné, avec ma mesure qui, certes, ne correspond pas à celle qui vous est due en justice, mais qui, cependant, n’est pas au-dessous de ce que je peux. »
 
Le troubadour de Notre Dame

L’enseignement de saint Bernard aura une grande postérité dans l’Église. Sa mystique nuptiale inspirera la vie carmélitaine. Sa vie d’oraison, axée sur la méditation des mystères de Jésus, aura une influence sur les franciscains. L’art roman, où sont privilégiés le silence et la lumière, doit beaucoup à saint Bernard. Et que dire de sa grande dévotion à Marie, à qui il réserve de beaux chants d’amour. Il ajouta ces dernières paroles au Salve Regina : « Ô clémente, ô toute belle, ô douce Vierge Marie. » Il nomme Marie « l’étoile de la mer » :
 
« Regarde l’étoile, appelle Marie. Dans les périls, les angoisses et les doutes, pense à Marie, invoque Marie. Que son nom ne s’éloigne jamais de tes lèvres, qu’il ne s’éloigne pas de ton cœur; et, pour obtenir le secours de sa prière, ne néglige pas l’exemple de sa vie. En la suivant, tu es sûr de ne pas dévier, en la priant, de ne pas désespérer; en la consultant, de ne pas te tromper.»

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