Les résultats de la dernière étude publiée par Amnesty International sont effrayants : 141 États font usage de la torture. Une pratique banalisée par nombre de séries TV.16/05/2014
Amnesty International a divulgué le 13 mai les résultats d’une étude sur l’attitude face à la torture, réalisée avec le bureau de recherche Globescan. Cette année 2014 marque en effet le 30e anniversaire de la Convention contre la torture, ratifiée par 155 pays. Cette étude a été menée dans 21 pays situés sur les 5 continents, et plus de 21 000 personnes ont été interrogés par rapport à l’utilisation de la torture.
S’il est difficile de connaître précisément le nombre de personnes torturées dans le monde (bien évidemment, aucun État ne dispose de statistiques officielles sur ce sujet), l’IRTC, l’International Rehabilitation Council for Torture Victims vient chaque année en aide à plus de 100 000 personnes ayant subi des tortures dans le monde. La torture est pratiquée dans 141 pays (soit un pays sur deux), dont 79 ayant signé la Convention de l’ONU.
80% des brésiliens disent craindre la torture
Les résultats du rapport d’Amnesty International sont alarmants : 44% des 21 000 personnes interrogées ne se sentent « pas à l’abri de la torture en cas d’arrestation », avec une crainte très forte au Brésil et au Mexique. A l’inverse, 36% des sondés estiment que « la torture est parfois nécessaire et acceptable lorsqu’elle vise à obtenir des informations susceptibles de permettre d’assurer la sécurité de la population », et cette proportion atteint 74% en Inde et en Chine.
Tout le problème est là : la banalisation de l’usage de la torture et son acceptation par l’opinion publique. Pour Salil Shetty, secrétaire général d’Amnesty International, il y a eu un basculement, lorsque, après les attentats du 11 septembre sur les Twin Towers, les États-Unis, par la voix du gouvernement Bush ont déclaré la guerre au terrorisme. Depuis, « c’est devenue la routine » déclare-t-elle. Au nom de la sécurité nationale, tout est désormais permis.
Les séries TV mises en causes
Pour Geneviève Garrigos, présidente d’Amnesty International – France interrogée par Radio Vatican, des dictatures se sont engouffrés dans cette brêche, et déclarent maintenant utiliser la torture pour « protéger » les citoyens. Elle pointe également du doigt le cinéma et les séries TV, comme 24H Chrono, ou encore le film sur l’arrestation de Ben Laden « Zero Dark Thirty », où les opérations de renseignement auraient été ralenties à cause du non-emploi de la torture.
Elle a également annoncé le lancement sur deux ans d’une importante campagne de communication dans 5 pays : le Mexique, le Maroc et le Sahara Occidental, le Nigéria, les Philippines et l’Ouzbékistan. Le choix de l’ONG s’est porté sur ces pays, « non pas parce que c’est là qu’il y aurait le plus de torture, déclare-t-elle, mais surtout parce que nous pensons que nous pouvons avoir un impact qui va faire bouger les choses au niveau de ces pays dans les deux ans, et derrière, avoir une influence au niveau de toute la région. » D’ailleurs, pour 82% des personnes interrogées par Amnesty International, « il est essentiel que des règles claires proscrivant la torture soient mises en place, car la torture est immorale dans tous les cas ».