Quelle utilisation faisons-nous, en tant que croyants, des moyens de communication actuels, s’interroge Pierre-Albéric d’Alançon, consultant en communication et relations institutionnelles.
13/05/14
Dans une chronique sur Radio Notre-Dame, Monseigneur Michel Aupetit s’est récemment insurgé contre ces « chrétiens de l’ombre », qui se réfugient dans les réseaux sociaux pour critiquer les évêques qui n’agissent pas comme ils le voudraient. C’est l’occasion de nous interroger sur l’utilisation que nous faisons, en tant que croyants, des moyens de communication.
Le numérique a ouvert un nouvel espace de vie et d’interactions que nous fréquentons désormais tous les jours : Internet. Cet exceptionnel moyen de rencontre a été largement salué par le Pape François, qui l’a récemment qualifié de « don de Dieu » apte à « nous faire percevoir un sens renouvelé de l’unité de la famille humaine » au-delà de toutes les frontières. Hélas, c’est aussi un lieu ou la faiblesse de l’homme se manifeste avec une certaine violence, notamment lorsque « la vitesse de l’information dépasse notre capacité de réflexion et de jugement et ne permet pas une expression de soi mesurée et correcte ».
Force est de constater que la multiplication des moyens de communication n’a pas favorisé la qualité des contenus. Au contraire, la possibilité de s’exprimer librement, de relayer et de commenter a donné naissance à un phénomène de « horde », souvent anonyme, qui n’hésite pas à critiquer, voire à lyncher tout ce qui diffère de son schéma d’idée. Lorsque ces comportements sont le fait de chrétiens qui, avec le même profil, assurent la promotion de leur foi, il s’agit d’un contre-témoignage. Cette réalité nous force à nous interroger sur le sens de notre parole et le rôle que nous devons jouer sur internet.
Notre communication est un acte moral. Lorsqu’elle diffuse la vérité, lorsqu’elle prône le dialogue, la solidarité, la justice et l’amour, elle agit en vue du bien. À l’inverse, si elle diffuse le mensonge ou favorise la médisance, elle agit clairement dans le sens du mal. Nous avons la responsabilité de chercher à discerner le sens de nos paroles, que ce soit sur Internet ou dans la vie quotidienne, en ayant à l’esprit que « de notre bouche ne doit sortir aucun mauvais propos, mais plutôt toute bonne parole capable d’édifier, quand il le faut, et de faire du bien à ceux qui l’entendent ».
Notre comportement sur le « territoire numérique » révèle notre engagement dans la cité. A l’appel du Pape, nous devons tenter de « mettre la communication au service d’une authentique culture de la rencontre ». Quelques règles très simples peuvent nous aider à développer un comportement plus humain sur la toile :
– Privilégier la qualité à la quantité
Il s’agit de prendre du temps et de s’interroger sur la finalité de nos publications. Pour répondre à la crise des valeurs, il est nécessaire de développer – chacun selon notre talent – une parole qui ait du sens et qui soit adaptée aux questions de notre temps. Pour cela, il est important de s’arrêter pour prendre du recul et s’assurer que nos écrits ne soient pas la conséquence de réactions spontanées mais de réflexions structurées.
– Vérifier nos informations afin de garantir l’authenticité des propos que nous publions et rester porteurs de vérités
Sur Internet, il devient de plus en plus difficile de discerner le vrai du vraisemblable. Le Web colporte avec une rapidité fulgurante toutes sortes de rumeurs, d’erreurs et d’approximations dont nous ne mesurons pas forcément les conséquences. Notre volonté de faire du « buzz » ne doit en aucun cas aller contre la vérité.
– Eviter l’anonymat qui décrédibilise l’écrit
Si nous avons des convictions, il convient de les assumer. Les comportements les plus déviants sont souvent le fait d’utilisateurs anonymes et lâches qui se permettent toutes sortes d’insultes… en toute sécurité. A l’image du Pape François, pour qui
« l’implication personnelle est la racine même de la fiabilité d’un communicateur », nous devons essayer d’agir avec transparence, intelligence et force pour que nos propos puissent porter du fruit.
– Faire preuve de bienveillance même dans nos relations virtuelles
La distance ne doit pas justifier la malveillance. Au contraire, nous devons chercher à dépasser les clivages préétablis et favoriser l’échange respectueux des personnes. Trop souvent, les débats tournent à l’insulte et à la moquerie, au détriment d’une ouverture à l’autre indispensable à la qualité du contenu. Parce que nous avons besoin de notre prochain pour communiquer, nous devons apprendre à écouter l’autre, même sur les réseaux sociaux.
En essayant de mettre en application ces quelques règles élémentaires, notre comportement sur Internet pourra révéler concrètement notre foi et ainsi « témoigner d’une Église qui soit la maison de tous ». Nous pourrons alors irriguer l’âme du monde qui nous entoure, avec cette portée inédite que nous offre le numérique, par notre exemple et notre authenticité !