Il peut arriver que, par inertie ou tout simplement parce que nous nous sommes laissé déborder par le temps, nous n’ayons pas encore pris sérieusement la route de Pâques. La tentation est grande de se dire : « Tant pis, nous ferons mieux l’année prochaine. » Aidons les enfants à découvrir qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire et jamais trop tôt pour commencer.
Un calendrier ludique pour avancer vers Pâques
Rappelons qu’un calendrier permet à l’enfant, en visualisant le temps qui passe, de mesurer sa progression, jour après jour, sur la route de Pâques. Si ce n’est déjà fait, il est donc possible de réaliser pour lui un calendrier du Carême sur lequel il collera chaque jour une gommette (ou coloriera une case). Pour bien montrer que le Carême est une progression, une ascension, il est important que la route vers Pâques soit figurée par un chemin qui monte ou un escalier (une marche par jour).
L’enfant peut marquer ses efforts sur ce calendrier ou sur tout autre support symbolique : une grande croix qu’il colorie ou sur laquelle il colle des gommettes, un puzzle qu’il reconstitue, etc. Même s’il n’a pas commencé au début du Carême, nous pouvons le lui suggérer maintenant, si nous sentons qu’il a besoin de ce moyen concret pour persévérer. Bien entendu, cette manière de procéder a ses limites : l’enfant étant son propre juge est tantôt trop indulgent, tantôt trop sévère, il y a parfois une sorte de (regrettable) compétition entre les frères et sœurs, et surtout la valeur du Carême ne saurait se limiter à la somme d’efforts fournis et de sacrifices consentis. Mais ces risques peuvent être palliés si les enfants sont soutenus et guidés par leurs parents qui sauront apaiser les scrupuleux, inviter les « m’as-tu-vu » à plus de discrétion et aider les uns et les autres à découvrir que le Carême est d’abord une démarche de Dieu vers chacun de nous. C’est son Amour qui est premier, qui précède nos efforts et nos renoncements.
Ne pas choisir des efforts trop ambitieux
Lorsqu’on n’a pas le courage de persévérer dans l’effort, on se trouve souvent mille « bonnes excuses » du genre : « La résolution que j’avais choisie est trop difficile, ça ne sert à rien puisque je retombe toujours ». Il peut arriver que les enfants choisissent effectivement des efforts trop ambitieux. Dans ce cas, nous pouvons leur suggérer de définir plus précisément et plus modestement leur résolution. Au lieu de : « Je serai toujours de bonne humeur », décider : « Je ferai un effort pour être toujours souriant le matin ». De plus, l’enfant doit découvrir que ce qui est grave n’est pas de tomber mais de rester à terre. Car rester à terre c’est douter, non seulement de soi, mais surtout de Dieu et de sa miséricorde. Dieu ne nous demande pas d’avancer à pas de géants : il nous demande d’avancer, c’est tout. De faire un pas, si petit soit-il. Puis un autre. Et encore un autre.
Si certaines résolutions sont trop ambitieuses, d’autres peuvent ne pas l’être suffisamment. Pour relancer l’enthousiasme, ne pas craindre alors de « passer à la vitesse supérieure ». Dire à l’enfant : « Tu peux aller encore plus loin, tu en es capable ». Cela est vrai aussi sur le plan familial : on peut décider, au cours du Carême, de faire plus que ce qui avait été prévu au départ (en ce qui concerne la prière en famille, par exemple, ou le partage). En tout cas, il ne faut pas se scléroser ou se laisser enfermer dans les limites d’un « programme » établi une fois pour toutes. Le Carême, à l’image de toute la vie, doit toujours être vu comme une progression, une occasion de grandir.
Encourager les petits mais aussi les grands
L’enfant a besoin de concret, de palpable. Or il ne voit pas Dieu, il ne L’entend pas. Mais Dieu se révèle à l’enfant à travers les parents. Il compte sur eux pour qu’ils soient attentifs aux efforts des uns et des autres, aux sacrifices, aux générosités pleines d’ardeur et qu’ils sachent, tantôt rester silencieux et discrets, tantôt redonner confiance, approuver. L’enfant a besoin d’entendre dire : « C’est bien ». Il a besoin de se sentir compris et encouragé. Il suffit souvent d’un regard, d’un sourire, pour signifier à l’enfant que nous avons remarqué son effort et que, tout en respectant la discrétion joyeuse avec laquelle il l’accomplit, nous voulons lui montrer que nous sommes fiers de lui.
Aider les petits est relativement facile mais les plus grands, eux aussi, ont besoin d’encouragements tout en exigeant que nous ne nous mêlions pas de leurs affaires. Il revient alors aux parents d’effectuer un difficile dosage entre une présence attentive et une discrétion pleine de respect. Il suffit qu’on dise publiquement à un adolescent : « Tu ne prends pas de beurre ? C’est à cause du Carême ? », pour qu’il renonce aussitôt à cette pénitence qu’il voulait secrète. Mais s’il fait des efforts, même minimes, pour rendre service et que personne ne le remarque, il risque de baisser les bras rapidement.
Favoriser une atmosphère joyeuse
Le Carême n’est pas un temps de morosité. C’est un temps de conversion, donc de joie. De même qu’« un saint triste est un triste saint », « un Carême triste est un triste Carême ». Certes, la conversion implique la contrition et la pénitence. Pleurer ses péchés, avoir « le cœur brisé, broyé » à cause d’eux, est une des grâces du Carême. Mais ces pleurs n’excluent pas la joie, au contraire, car ils sont la porte qui ouvre vers le bonheur d’être sauvé.
La joie du Carême doit se traduire très concrètement, très quotidiennement, dans la vie familiale. Et cette atmosphère joyeuse est certainement un des plus sûrs moyens d’aider les enfants à persévérer jusqu’à Pâques.
Christine Ponsard