"Quand Frédéric nous a annoncé qu’il allait divorcer, nous avons ressenti une grande déception et une tristesse, se souvient Anne-Lise. En premier on a pensé aux petits-enfants. Nous avions un sentiment de gâchis. Nous nous disions que les choses auraient pu être autrement. Dans la vie, il y a des épreuves qu’on ne choisit pas, par exemple un accident, une guerre ou un tremblement de terre. Dans ce cas, on n’a qu’à constater. Mais la division, cela dépend de la volonté des gens."
Lorsque des parents apprennent que leur enfant va divorcer, "c’est rarement une bonne nouvelle, sauf dans certains cas où les parents sentent que leur enfant est malheureux ou est en danger, alors cela peut être un soulagement", explique Sophie Passot, conseillère conjugale et familiale au cabinet Raphaël à Cluny. Ainsi par exemple, la fille de Françoise lui avait soufflé, à la naissance de son troisième enfant, qu’elle ne tiendrait pas le coup face à un mari devenu violent. La séparation était inévitable pour la protéger, ainsi que ses enfants.
De larges répercussions
Tout divorce ébranle les parents. "Pour ceux qui sont chrétiens, cela peut être encore plus compliqué car cela heurte leurs valeurs. Certains peuvent condamner ou rejeter leur enfant, mais c’est ajouter du malheur au malheur", constate Sophie Passot. C’est aussi un motif d’inquiétude : on se fait du souci pour son enfant et pour les petits-enfants dont on sait qu’ils souffriront, quel que soit leur âge, de la séparation de leurs parents. C’est enfin une grande souffrance : "Nos enfants, c’est la chair de notre chair, se souvient Françoise. Quand je voyais ma fille souffrir, c’est comme si on me piétinait le cœur. Une maman, ça sent tout."
Les répercussions se font aussi sentir sur les parents et la famille élargie. "Il est vécu en premier lieu par les personnes concernées mais aussi par l’entourage, observe la conseillère conjugale. Frères et sœurs, beaux-frères, belles-sœurs,… peuvent être touchés dans leurs convictions et ébranlés dans leur foi. Cette épreuve met le doigt sur leurs forces, mais aussi sur les points de fragilité personnels ou de couple, en fonction de là où chacun en est." Anne-Lise par exemple, avait une fille encore célibataire quand son frère a divorcé. "Ingrid m’a dit que cela l’avait un peu refroidie et l’a incitée à être très prudente dans sa décision d’aller plus loin avec son amoureux. De tels cas peuvent inquiéter."
Ressentir les émotions du deuil
Le divorce provoque des émotions comparables à celles du deuil. "Il y a beaucoup de deuils dans la vie qui ne sont pas liés à des morts, mais à des attachements, explique Sophie Passot. Dans le cas du divorce des enfants, les parents peuvent connaître les mêmes phases : sidération, colère, tristesse, honte, déni. Puis à un moment, vient l’acceptation. Cela conduira, entre autres, à réaménager la relation avec la pièce rapportée." Certains parents par exemple culpabilisent et se demandent ce qu’ils ont mal fait dans leur éducation pour conduire leur enfant à une telle décision, d’autres sont tellement sidérés qu’ils sont incapables d’en parler, certains cachent la situation, de peur d’être mal jugés ou rejetés par leurs amis…
Bien évidemment dans un couple, les époux ne ressentent pas les mêmes émotions au même moment. Ainsi Éric a été longtemps en colère, tandis que sa femme Laurence ressentait une grande tristesse et était dans l’accueil inconditionnel de sa fille. "Il est souhaitable que les parents en parlent ensemble, et beaucoup, conseille Sophie Passot. Cela désamorce tous les pétards, permet de se comprendre, de voir où en est l’autre et aussi d’accueillir leur enfant les bras grands ouverts."
"S’ils sont chrétiens, les parents peuvent prier ensemble, aller à la messe pour leur enfant, pour leurs petits-enfants. Cela peut être l’occasion de se soutenir dans la foi." Ainsi, Anne-Lise et son mari ont redoublé de prières "pour implorer que les choses s’arrangent au mieux et soient vécues dans la foi et l’espérance."