Ce 30 juin, un collectif de responsables d'associations chrétiennes (Mouvement chrétien des retraités, Chrétiens dans le monde rural, Mouvement Laudato Si', Mouvement rural de la jeunesse chrétienne, Centre de recherche et d'action sociales), ont lancé dans La Croix un appel aux évêques de France pour leur demander de prendre des engagements plus concrets face aux défis écologiques. Cet appel fait suite au livre publié le 25 mai précédent par la Conférence des évêques de France, à l'occasion de la semaine Laudato Si', intitulé Ensemble pour notre terre (Bayard Éditions, Mame, Éditions du Cerf). Pourtant, dans la présentation de leur livre, ses auteurs, qui ont y rassemblé les conclusions de trois années de travail mené conjointement par l’Église et des acteurs de la société civile, ont insisté sur les pistes d'engagements très concrets adressées, à travers 44 propositions, aux diocèses, aux paroisses, aux mouvements et communautés catholiques.
Le compte n’y est pas
Les rédacteurs de l'appel ne contestent pas le document dont ils soulignent d'ailleurs le caractère exceptionnel "parce qu'une expression publique et collégiale des évêques français sur l'écologie est chose rare". Exceptionnel mais pas unique puisque, dès 2000, la Commission sociale des évêques de France appelaient déjà les chrétiens à revisiter leur théologie de la Création pour gérer la Terre avec sagesse et la rendre habitable pour tous. En outre, le texte de l'appel se félicite de l'expression directe de plusieurs évêques qui n'hésitent pas à parler de "changement radical" voire de "décroissance". Il ne méconnaît pas davantage les avancées déjà vécues au sein de l’Église notamment à travers la label Église verte auquel plus de 800 paroisses ont aujourd'hui adhéré et dont l'une des signataires, Laura Morosini, a d'ailleurs longtemps été la responsable.
Force est de constater que l'espèce la plus menacée aujourd'hui n'est pas la baleine bleue ou le rhinocéros blanc mais l'homme qui est contesté dans son anthropologie.
Néanmoins, les auteurs de l'appel estiment que le compte n'y est pas, surtout quand ils comparent la situation de la France à celle d'autres pays. Et de citer plusieurs diocèses, en particulier celui d'Assise, qui ont décidé de ne plus accepter un centime de l'industrie fossile ou de sortir leur épargne de cette industrie. Ou bien encore la Conférence épiscopale britannique qui s'est fixée l'objectif d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2038. En fait, Ensemble pour notre terre comporte bien des propositions sur le désengagement des énergies fossiles mais aussi pour la mobilisation des catholiques en faveur de la lutte contre les changements climatiques mais les signataires de l'appel s'émeuvent du fait "qu'aucun diocèse ne témoigne encore d'un engagement public parmi ces propositions". Pour autant, le texte ne comporte aucune injonction et se conclut par la mention de l'« espérance" même si on aurait aimé voir ce mot introduit par un E majuscule.
Absence de l’écologie humaine
Si cet appel est peu contestable dans ses intentions, on peut s'étonner que des mouvements disant se placer dans la continuité de l'encyclique Laudato Si' du pape François publiée en 2015, ne s'attachent qu'à la dimension environnementale de l'écologie intégrale prônée par le Saint-Père en omettant complètement sa dimension d'écologie humaine. Force est de constater en effet que l'espèce la plus menacée aujourd'hui n'est pas la baleine bleue ou le rhinocéros blanc mais l'homme qui est contesté dans son anthropologie. Au moment où le gouvernement français s'apprête à présenter une loi sur la fin de vie ouvrant la voie à l'euthanasie et que plane toujours le risque d'une réforme de la Constitution inscrivant dans son préambule le droit à l'avortement, on pourrait s'attendre à ce que l'indignation des écologistes catholiques soit focalisée en priorité sur cette menace.
De fait, "toute vie est un don pour le monde" a déclaré le Conseil permanent des évêques de France le 9 décembre 2022 au sujet de l'éventuelle inscription dans la Constitution de l'interruption volontaire de grossesse tandis que les évêques réunis à Lourdes le 28 mars 2023 ont réitéré leur opposition à l'aide active à mourir. Mais quel appel a retenti de la part des écologistes catholiques pour appuyer ces propos ou leur demander d'être plus concrets ?