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Loi de programmation militaire : des promesses et des questions

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Des véhicules blindés Griffon de l'opération Barkhane se préparent à partir pour la dernière patrouille avant la remise de la base militaire de Barkhane à l'armée malienne, Tombouctou, le 14 décembre 2021.

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Jean-Baptiste Noé - publié le 07/04/23
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Après des années de réduction des budgets des armées, la nouvelle loi de programmation militaire (LPM) a acté un début de croissance budgétaire. Pour le géopoliticien Jean-Baptiste Noé, le défi n’est pas seulement de rénover un matériel vieillissant mais de préparer l’armée française à de nouveaux types de combats.

En 1991, au moment de la chute de l’URSS, les Européens, Français en tête, espéraient pouvoir toucher les "dividendes de la paix". Il s’agissait de baisser des budgets militaires qui avaient été au plus haut durant l’affrontement avec le bloc communiste, et d’affecter les économies effectuées à la baisse des impôts et au remboursement de la dette. Si les budgets militaires furent bien diminués, passant de plus de 6% du PIB dans les années 1960 à près de 2% dans les années 2000, les armées servirent surtout de variable d’ajustement pour les différents gouvernements. La paix étant là et la guerre une idée lointaine, il apparaissait inutile à beaucoup d’investir dans du matériel neuf. Au moment de la discussion sur la construction du Charles de Gaulle, nombreux furent ceux à estimer que posséder un porte-avions était désormais inutile. Les mêmes arguments revinrent au début des années 2020 quand il fallut acter la construction de son successeur. La guerre d’Ukraine mit un terme à l’illusion de la paix et rendit plus que nécessaire l’investissement dans une armée qui fut réduite à une portion congrue.

Nouvelle guerre, nouvelles armes

Le nouveau porte-avions désormais acté, sa construction devrait débuter fin 2025 pour des premiers essais en mer en 2036. Des délais de fabrication qui obligent à voir loin et à planifier très en amont les investissements nécessaires. Dans l’armée de terre, c’est le renouvellement de plusieurs véhicules blindés qui est à l’œuvre, les premières unités étant sorties des ateliers de Nexter. Les VAB, des véhicules blindés utilisés depuis les années 1970 et les chars légers AMX, qui datent des années 1980, sont retirés du service. À leur place, les Griffon, véhicules de transport de troupes, les Jaguar, engins blindés de reconnaissance, les Serval, véhicules blindés. Un saut de près de 40 ans dans le futur qui apporte non seulement du matériel neuf mais aussi de nouvelles façons de combattre, ce que les militaires appellent "le combat collaboratif". Ce type de combat est permis par le développement du système de communication Scorpion qui permet aux unités présentes sur le champ de bataille de mieux communiquer entre elles, le but étant d’accroître leur complémentarité. Ce système permet ainsi de coordonner les actions menées et de jouer sur les caractéristiques de chacun des véhicules afin de se répartir des rôles d’action. Une complémentarité qui permet ainsi aux militaires d’être plus mobiles et plus efficaces. 

Des promesses en attente

Si les premières livraisons de matériel sont effectives, les régiments ne sont pas rassurés pour autant. Beaucoup ont été déshabillés pour alimenter l’armée ukrainienne, certains sont vidés. À cela s’ajoute un cafouillage sur le montant exact de la LPM 2024-2030. Après une première annonce de 413 milliards d’euros (contre 295 milliards pour la LPM 2019-2025), des bémols ont été avancés par le gouvernement avec la possibilité d’une LPM qui serait moins importante que prévu. Ce sont en effet près de 30 milliards qui seront détruits par l’inflation. Autre possibilité évoquée par Matignon, faire porter le gros de l’effort budgétaire après 2027, c'est-à-dire après la fin de la législature actuelle. Ou comment promettre sans réaliser. Un bras de fer budgétaire est engagé entre le ministère des Armées, Bercy et Matignon où chacun essaye de faire pencher la balance en sa faveur. 

C’est d’autant plus dommageable qu’outre les besoins urgents pour une armée qui ne dispose plus des éléments nécessaires pour faire de longues opérations, l’industrie militaire porte une grande partie de l’économie nationale. Fabriquer des Serval, des Griffon et des Jaguar profite à une multitude de sous-traitants et d’entreprises industrielles, dans l’information, la composition des matériaux, la recherche-développement. Ces dépenses, loin de servir uniquement aux militaires, ruissellent dans de nombreux secteurs économiques et sont donc profitables à beaucoup, et pas seulement pour assurer la paix du pays. L’industrie militaire développe et a développé, des technologies désormais utilisées de façon courante dans le civil. S’il n’y a pas de bénéfices de la guerre, il y a en revanche des bénéfices certains à disposer d’une industrie militaire de grande qualité. 

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