En Occident, la culture du "jetable" et du "rentable" pousse à croire que la vieillesse est une période de dépendance et d’incapacité. La valeur d’une personne est déterminée par rapport à son rendement dans la société. En revanche, la sagesse biblique honore les anciens. Tandis que le monde clame que la vieillesse est un ennemi à combattre, la Bible révèle l’inverse : "C’est chez les vieillards que se trouve la sagesse ; dans le grand âge, le discernement" (Job 12, 12). Le Psaume 92 dit même que les justes sont encore féconds dans leur vieillesse, qu’ils sont pleins de "sève et verdoyants" (verset 15).
Il existe des stéréotypes de personnes âgées, plus ou moins positifs : certains, plaintifs, dominateurs et enclins à la critique, donnent plutôt envie de fuir. D’autres, en revanche, apparaissent comme des bénédictions pour leur famille, leur entourage, leur paroisse. Qu’ont-ils de plus par rapport aux autres ? Comment faire pour vieillir avec grâce, selon le plan de Dieu ? Au travers de la Bible, mais aussi de modèles de personnes âgées épanouies dans leur foi chrétienne, quelques pistes se dessinent pour "fleurir" avec grâce.
1Croire fermement en notre destination finale : le paradis avec Dieu
Ce que nous croyons au sujet de notre destination finale façonne notre caractère et notre existence quotidienne. L’Evangile de Luc met en lumière la prophétesse Anne âgée de 84 ans, qui restait fermement ancrée dans sa foi et ne quittait pas le temple, "participant au culte nuit et jour par des jeûnes et des prières" (Lc 2, 37). On peut imaginer qu’elle priait pour elle, pour les autres, pour la venue du Messie et pour le salut d’Israël. Elle était soutenue par cette espérance en la réalisation de la promesse (la venue du Messie) et par sa confiance d’être accueillie par Dieu à l’heure de sa mort.
2Offrir sa faiblesse à Dieu et croire en son projet de paix pour nous
La Bible nous présente plusieurs modèles de personnes âgées éprouvées et fragilisées. Dans le Livre de Ruth, Naomi dont le prénom signifie "la douce", a perdu son mari puis ses deux fils, et demande à être appelée par un nouveau nom : celui de "Mara", c’est-à-dire "l’amère, l’affligée". C’est dire combien elle se sent abandonnée de Dieu, et même condamnée par lui. "J’étais partie comblée, mais le Seigneur me ramène les mains vides. Pourquoi m’appeler encore Naomi ? Le Seigneur m’a humiliée, le Puissant m’a fait du mal !" (Rt 1, 21).
Le parcours de Naomi nous amène à réfléchir au sens de la vieillesse. Tandis que la jeunesse nous apporte la santé, des amis, des biens, une descendance, de l’espoir, la vieillesse au contraire nous retire peu à peu une grande partie de ces biens. On se sent vide, seul, démuni et on passe par un millier de petites morts.
Pourtant, Naomi va faire un choix de foi en prenant le risque d’un dangereux voyage vers son pays. Dieu va la combler de nouveau par l’intermédiaire de Ruth, sa belle-fille, qui se mariera avec Boaz, son "rédempteur", figure avant l’heure du Christ Rédempteur.
Naomi triomphera dans son combat intérieur. Comme elle, nous sommes appelés durant le temps de la vieillesse à ne pas céder à une vision étriquée de la vie mais à croire que Dieu a pour nous "un projet de paix et non de malheur, pour donner un avenir et une espérance" (Jérémie 29, 11).
En choisissant jour après jour de renoncer à soi-même, à toute amertume et à tout regret, nous nous abandonnons à Dieu et plaçons notre confiance en lui. Il rend alors l’épanouissement possible, car comme l’a expérimenté le couple âgé et stérile d’Elisabeth et Zacharie en mettant au monde le prophète Jean-Baptiste, "rien n’est impossible à Dieu" (Lc 1, 37).
3Apporter soutien, consolation et sagesse aux jeunes générations
L’Ancien Testament appelle à plusieurs reprises les plus âgés à instruire les plus jeunes. Le Psaume 145 (verset 4) encourage ainsi chaque génération à dire « à celle qui suit » combien les œuvres de Dieu sont belles. Comme le soulignent Sharon W.Betters et Susan Hunt, auteurs chrétiennes de l’ouvrage Vieillir avec grâce, "Dieu ne gaspille jamais une épreuve, un deuil ou une traversée du désert. Partager avec les autres les leçons qu’il nous apprend personnellement, voilà qui est épanouissant".
La vieillesse accompagnée de discernement et de foi nous qualifie en effet pour aider les plus jeunes à distinguer la beauté et le sens de chacun des chapitres de leur propre histoire…même si parfois, elle leur semble décousue.
C’est ainsi qu’Anne la prophétesse, lors de la présentation de Jésus au temple, a dû consoler la Vierge Marie, bouleversée par la prophétie de Siméon (Lc 2, 35). Celui-ci lui annonce en effet qu’une épée transpercera son cœur. On peut imaginer la compassion d’Anne pour Marie, et ses paroles destinées à fortifier l’espérance de la jeune vierge : elle dut certainement lui rappeler que le Seigneur n’abandonna jamais les saintes femmes d’Israël, et qu’a fortiori, il ne délaissera pas la mère de son Fils…
Comme la prophétesse Anne, comme le bon vieillard Siméon ou encore Zacharie et Elisabeth qui ont espéré au-delà de toute espérance, nous pouvons faire le choix d’une vieillesse épanouie dans la grâce et l’amour de Dieu et du prochain.
Au final, réfléchir à la dernière étape de son existence avant la grande rencontre de notre vie (celle du Christ), c’est se demander "comment est-ce que je veux vivre mon voyage vers le Ciel ?", et donc aussi vivre plus intensément chaque instant de notre brève existence.
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Aliénor Strentz est fondatrice du blog « Chrétiens heureux » et Missionnaire de l’Immaculée Père Kolbe. Elle est aussi docteur en ethnomusicologie et formatrice pour adultes.