Ces temps-ci, nous nous représentons volontiers notre Église comme une entité plurielle, pécheresse, identitaire et repliée. Des voix autorisées annoncent un schisme et suggèrent que la trahison de certains clercs discrédite le message ecclésial pour "au moins quarante ans", et même, je cite, que nous avons devant nous une "génération perdue".
À quoi songez-vous, chaque dimanche, quand vous affirmez à haute voix que l’Église est une, sainte, catholique et apostolique ?
Hommes de peu de foi ! À quoi songez-vous, chaque dimanche, quand vous affirmez à haute voix que l’Église est une, sainte, catholique et apostolique ? Car vous ne dites pas que vous désirez de tout votre cœur que l’Église soit une, sainte, catholique et apostolique ; vous ne dites pas qu’il faut absolument que l’Église soit une, sainte, catholique et apostolique : vous dites qu’elle l’est. Vous le dites tous ensemble. C’est dans votre credo.
Contre toute apparence
Alors de deux choses l’une, soit le symbole de Nicée-Constantinople énonce des erreurs, et dans ce cas mieux vaut aller à la pêche qu’à la messe, et mieux vaut définitivement se taire et passer à autre chose, soit il énonce la Vérité, et alors oui, contre toute apparence, notre Église est bel et bien une, sainte, universelle et envoyée pour enseigner les nations. Pas pour séduire les nations : pour les enseigner. Pas pour plaire aux puissants : pour leur dire la Vérité. Pas pour asséner une vérité qu’elle possède, mais pour témoigner de la Vérité qui la possède. Pas pour battre sa coulpe devant tous les tribunaux médiatiques de la terre : pour annoncer le Christ. Pas pour se lamenter sur les péchés : pour les pardonner. Mais comment enseigner le Christ lorsqu’on a cessé de croire à ce qu’Il enseigne ? Comment enseigner le Christ quand on s’imagine que c’est le péché qui décide de tout ? En retrouvant la foi.
Beaucoup des nôtres estiment que notre Église traverse, avec le drame des crimes sexuels, les églises vides et les chrétiens divisés, une crise de l’identité. En réalité, elle traverse une crise de la foi, aboutissement logique de trois siècles de déconstruction de Dieu par la culture occidentale. On pourrait même affirmer que cette crise de la foi était parfaitement prévisible. Et donc que, les causes cessant bientôt, cette crise sera un cap à passer, comme il y en a eu et comme il y en aura d’autres.
Le Christ est venu sauver ce qui était perdu
Nous passerons ce cap au moyen de la foi. Pourquoi croyons-nous saint Paul quand il proclame que dans le Christ, "il n’y a plus ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme", et restons-nous persuadés qu’il y aura toujours des musulmans et des chrétiens, et parmi ces derniers (à qui Jésus a dit : "soyez un") des tradis et des progressistes, des abonnés à Famille chrétienne et des lecteurs de Golias, des catholiques de droite et des catholiques de gauche ? On nous parle aussi de "génération perdue". Mais c’est une idée du diable, que de perdre une génération.
Le Fils de l’homme est venu "sauver ce qui était perdu" (Lc 19, 10). Il n’est pas venu condamner une génération. Il est venu sauver toutes les générations. Il n’abandonne aucun pécheur, fût-il clerc, fût-il mitré. Nos évêques dans la tempête crient leur détresse : "Au secours Seigneur, nous périssons !" (Mc 4, 38). Et nous pensons que le Seigneur ne les sauverait pas ? Bien sûr qu’Il les sauvera. Il les a déjà sauvés. Quand les clercs crient au secours, quand un instant ils cessent de faire du jus de crâne pour supplier Jésus du fond de leur détresse, alors notre Église se met à ressembler à ce qu’elle est : une, sainte, catholique et apostolique.