separateurCreated with Sketch.

Chine, États-Unis, Ukraine : les grands défis de la diplomatie pontificale

POPE FRANCIS,SKIES,WEATHER
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
I.Media - publié le 21/07/22
whatsappfacebooktwitter-xemailnative
Dans un grand entretien en trois parties publié par la revue jésuite "America", Mgr Paul Richard Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États, dresse un vaste panorama de la situation internationale instable dans laquelle la diplomatie pontificale tente de faire entendra sa voix.

Secrétaire pour les relations avec les États, Mgr Paul Richard Gallagher a levé un coin du mystérieux voile qui entoure la diplomatie du Vatican. Interviewé dans la revue jésuite America il revient notamment sur l’évolution des relations entre Rome et Washington entre la présidence Trump et la présidence Biden, ainsi que sur la guerre en Ukraine, les relations avec la Chine, et les voyages du pape.

"Nos échanges avec l’administration Biden sont fréquents, notamment par le biais de l’ambassade des États-Unis auprès du Saint-Siège", assure Mgr Gallagher, qui explique aussi que des communications directes ont également lieu avec le département d’État et la Maison Blanche. Les divergences "bien connues" – notamment sur la question de l’avortement, qui n’est pas évoquée dans cet entretien – n’empêchent pas un "désir d’échange", explique le responsable de la diplomatie pontificale.

Il aimerait néanmoins voir Washington assumer "une approche plus positive" de l’arrivée des migrants. "Parfois, nous nous inquiétons de la façon dont les gens sont traités, de la façon dont certaines personnes qui sont aux États-Unis depuis de très nombreuses années finissent par être expulsées. Nous avons eu beaucoup de mal à comprendre cela", regrette Mgr Gallagher, qui exprime son soutien à la conférence épiscopale américaine pour les efforts qu’elle déploie sur cette thématique. Il estime aussi que la lutte contre la traite des êtres humains – un axe majeur de convergence entre Rome et Washington – demeure un chantier prioritaire au niveau mondial, notamment dans le contexte des migrations.

Le défi des relations avec la Chine

"Je pense que nous sommes un peu inhibés par la situation actuelle", estime Mgr Gallagher au sujet des relations avec la Chine, qui reconnaît que le résultat de l’accord de 2018 n’est pas "terriblement impressionnant", avec seulement six nominations épiscopales.

"Je suppose que nous aurions aimé voir plus de résultats, et il y a beaucoup de travail à faire", remarque-t-il en espérant une relance des contacts directs après une longue parenthèse liée, notamment, à la pandémie de Covid-19. Il révèle qu’après sa rencontre à Munich en 2020 avec le ministre des Affaires étrangères Wang Yi, la diplomatie pontificale a souhaité "préparer la voie à une rencontre entre Xi Jinping et le Saint-Père".

La route ne sera pas facile.

"Je pense que les Chinois sont d’accord sur le fait qu’il devrait y avoir une augmentation progressive du niveau de contact direct entre nous", explique-t-il, en estimant que l’accord provisoire de 2018 pourrait être reconduit pour une nouvelle période de deux ans. Prudent concernant la situation du cardinal Zen à Hong Kong, il espère que "l’affaire pourra être résolue de manière satisfaisante dans un avenir proche".

Pariant sur le temps long, Mgr Gallagher espère que les catholiques de Chine ont de nombreuses "richesses spirituelles" à offrir à leur peuple, qui, "au cours des dernières décennies, a fait d’énormes progrès dans la prospérité matérielle et dans la création de ses institutions et la solidité de sa société", souligne-t-il.

La guerre en Ukraine et son impact mondial

Il estime que la guerre en Ukraine est "la chose qui a causé la plus grande souffrance, la plus grande douleur et la plus grande anxiété au cours des dernières décennies" car elle "engendre diverses crises : la crise de la chaîne d’approvisionnement, la crise alimentaire, la sécurité [menaçante] en général, l’avenir de l’Europe".

Quelques semaines après son déplacement à Kiev, Mgr Gallagher souligne "la résilience du peuple, sa détermination, son courage", et reconnaît qu’il est est "très difficile pour les Ukrainiens d’envisager de véritables négociations à l’heure actuelle en raison de la profondeur de la souffrance et du traumatisme de la population".

Il laisse entendre qu’une invitation du Pape à Moscou n’est pas d’actualité, et précise qu’en exprimant son soutien à "l’intégrité territoriale de l’Ukraine" lors de sa visite sur le terrain, il traduisait un point essentiel de la doctrine diplomatique du Saint-Siège, sans pour autant exprimer une position personnelle du pape François.

De nombreuses zones de tension

"Je parlais au nom du Saint-Siège, et le Saint-Père ne m’a pas encore corrigé sur ce que j’ai dit en son nom", précise l’archevêque britannique, laissant tout de même pointer l’impression d’une certaine distance dans le lien entre le Pape et la secrétairerie d’État.

Concernant d’autres zones de tension, Mgr Gallagher espère par ailleurs "une plus grande stabilité politique au Nicaragua, où le nonce a été expulsé", ce qui représente "une source de grand regret" pour la diplomatie du Saint-Siège. Le "rétablissement du régime démocratique" en Birmanie constitue une autre préoccupation centrale, tout comme la réforme du système multilatéral onusien.

Au sujet de la lutte contre le réchauffement climatique, Mgr Gallagher reconnaît que "la route ne sera pas facile", mais il souligne qu’il y a "beaucoup de bonne volonté". "Je pense que nous serons en mesure de poursuivre la décarbonisation à laquelle le Saint-Siège s’est engagé d’ici 2050 et d’apporter d’autres améliorations à l’environnement", assure Mgr Gallagher.

Les prochains voyages du Pape

"Je pense que la principale priorité du Pape en ce moment est de se rendre en Ukraine, de rencontrer les autorités ukrainiennes, de rencontrer le peuple ukrainien et l’Église catholique ukrainienne", assure Mgr Gallagher, qui précise qu’un éventuel projet de visite pourra être étudié après le retour du voyage du Pape au Canada, en fonction de son état de santé.

Cette visite du pontife au Canada, du 24 au 30 juillet, "attirera l’attention sur la souffrance et sur certaines des choses terribles qui se sont déroulées dans le passé, notamment à l’égard des peuples autochtones et en ce qui concerne le système des pensionnats", rappelle l’archevêque britannique, qui accompagnera ce déplacement.

"On ne peut pas prévoir exactement ce qui en ressortira. Mais nous espérons et prions pour qu’il s’agisse d’une nouvelle étape sur le chemin de la réconciliation que l’Église catholique du Canada a entrepris depuis longtemps", assure Mgr Gallagher, qui espère aussi que l’amélioration de la santé du pape permettra de reprogrammer les voyages prévus en République démocratique du Congo, au Soudan du Sud et au Liban.

Le Pape prévoit aussi de se rendre au Kazakhstan en septembre prochain pour le Congrès des religions mondiales, qui pourrait être une occasion de rencontre avec le patriarche Kirill. L’Inde est également "une des priorités" du pape François. "Nous devrons voir ce que 2023 apportera", explique Mgr Gallagher au sujet d’un projet de voyage du Pape dans ce pays qui devrait devenir, l’an prochain, le plus peuplé du monde.

Newsletter
Vous avez aimé cet article et souhaitez en savoir plus ?

Recevez Aleteia chaque jour dans votre boite e−mail, c’est gratuit !

Vous aimez le contenu de Aleteia ?

Aidez-nous à couvrir les frais de production des articles que vous lisez, et soutenez la mission d’Aleteia !

Grâce à la déduction fiscale, vous pouvez soutenir le premier site internet catholique au monde tout en réduisant vos impôts. Profitez-en !

(avec déduction fiscale)