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L’Église dénonce le “lent génocide” des chrétiens au Nigeria

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Messe au Nigeria (Kaduna).

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Filipe Avillez - AED - publié le 09/10/21
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L’Église catholique du Nigeria affirme que les chrétiens de ce pays sont victimes d’un processus de nettoyage ethnique effectué par les musulmans peuls, avec la complicité de l’État.

Les mots sont forts et témoignent de l’urgence de la situation au Nigeria. "Il ne s’agit pas seulement de questions de pâturage. Pour moi, c’est une guerre de religion", a déclaré Mgr Wilfred Anagbe, évêque du diocèse de Makurdi, dans l’État de Benue (Nigeria), lors d’une conférence organisée par l’Aide à l’Église détresse (AED). Plusieurs participants ont confirmé que la violence qui sévit dans le pays depuis plusieurs années n’est pas seulement due à des "affrontements" entre bergers musulmans et agriculteurs chrétiens pour la possession de la terre. "Ils ont un programme qui est d’islamiser ce pays. Et ils le font en éliminant méthodiquement tous les chrétiens et en occupant les territoires. S’il s’agissait de pâturage, pourquoi tuer des gens ? Et pourquoi brûler leurs maisons ?", interpelle-t-il.

Johan Viljoen, directeur de l'Institut sud-africain Denis Hurley Peace, qui œuvre à la promotion de la paix, de la démocratie et de la justice et qui étudie les attaques armées des Peuls dans le sud-est du Nigeria, parle d’une "occupation concertée et bien planifiée". "Tout cela se passe sous le couvert de Miyetti Allah, dirigée par le président Buhari", dit-il, faisant référence à une organisation qui prétend défendre les droits des bergers peuls.

L’implication des plus hautes sphères de l’État est l’une des raisons pour lesquelles les forces armées se sont montrées réticentes à intervenir et à contrôler la violence. "Je ne pense pas que l’armée essaie de résoudre quoi que ce soit. Ils chercheraient plutôt à encourager les choses", a déclaré Johan Viljoen, en rappelant une récente mission d’enquête au Nigeria au cours de laquelle des collaborateurs de son institut ont été arrêtés tous les cinq kilomètres par des soldats, tous peuls, qui se montraient menaçants et pointaient des armes sur eux. Après des années de violence, "pas un seul Peul n’a été poursuivi en justice pour violences", ajoute-t-il. 

Mgr Wilfred a souligné que les forces armées sont sous le contrôle direct du président, et que par ailleurs, "tous les chefs de service, de la marine, de l’armée de l’air et de la police, sont musulmans". Les chiffres officiels indiquent que cette vague de violence a causé environ 3.000 morts au cours des dernières années, mais les personnes présentes sur le terrain affirment que ce chiffre pourrait atteindre 36.000, sans compter les nombreuses personnes déplacées, démunies et profondément traumatisées par ce qu'elles ont vécu. De nombreuses ONG ayant quitté les zones dangereuses, l’Église catholique et ses institutions sont les seules alternatives fiables pour apporter de l’aide aux populations sur le terrain.

Les représentants de l’Église demandent aux occidentaux de contribuer à l’acheminement des secours, mais aussi d’aider autrement. "Il faut changer le discours, on ne peut pas suivre le récit du gouvernement nigérian", a insisté le père Remigius Ihyula, qui est également du diocèse de Makurdi. "Ils ont placé leurs protégés dans les ambassades du monde entier, si bien que la parole officielle donne l’impression qu’il ne se passe rien". 

Ce n’est pas un affrontement, c’est un lent génocide. Déplacer des personnes de leur terre ancestrale, les priver de leurs moyens de subsistance et les massacrer est une forme de génocide.

Le père Joseph Fidelis, du diocèse de Maiduguri, a expliqué pour sa part qu’il est irritant d’entendre parler "d’affrontements" ou de "conflits" entre groupes opposés. "Ce n’est pas un affrontement, c’est un lent génocide. Déplacer des personnes de leur terre ancestrale, les priver de leurs moyens de subsistance et les massacrer est une forme de génocide".

Le Nigeria est le pays le plus peuplé d’Afrique. Il n’y a pas de chiffres officiels, mais les estimations indiquent une répartition égale entre musulmans et chrétiens, les premiers étant majoritaires dans le nord et les seconds dans le sud. Cependant, la violence s’est maintenant propagée dans tout le pays, menaçant la stabilité de l'ensemble du pays.

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