D'après une vénérable tradition, la Vierge Marie a vu le jour à l'emplacement où fut bâtie la basilique Sainte-Anne à Jérusalem. Or cet édifice est proche de la piscine de Bézatha dont parle l'évangile selon saint Jean (Jn 5, 1-9). Des fouilles ont confirmé l'authenticité de cet édifice. Sa proximité avec le lieu de naissance de la Vierge n'est pas un hasard. Tout dans la vie de la Vierge est signe. Cette proximité ne fait pas exception. Cette piscine possédait cinq portiques au-dessous desquels "étaient couchés quantité d'infirmes, aveugles, boiteux, paralytiques qui attendaient que l'eau s'agitât. Car un ange du Seigneur descendait de temps en temps dans la piscine et agitait l'eau ; et le premier qui y descendait après l'agitation de l'eau était guéri" précise l'évangile. Mais qu'a donc voulu nous dire Dieu en faisant naître Sa fille de prédilection à côté de cette piscine ?
Si l'Immaculée est venue au monde à proximité de cette cour des miracles avec sa foule de misérables, cela tient à ce que Dieu voulait former le cœur de Notre Dame par la rencontre quotidienne, dès son enfance, des infirmes et des malades. Par-là, Il la préparait à son rôle maternel et à son ministère de miséricorde. Les premières impressions de l’enfance restent gravées indélébilement dans l’esprit. Il est vraiment émouvant d'imaginer la petite fille pleine de grâce ainsi mêlée sans cesse au monde misérable et miséreux de la piscine probatique. Quel contraste entre la Création dans toute sa pureté en la personne de la Vierge, et ce spectacle de la déchéance physique ! Sa prière se faisait l’écho de celles des pauvres et des infirmes. N'est-ce pas la meilleure enfance que Dieu pouvait réserver à l'Immaculée, à Celle à laquelle l'Ange dira à l'Annonciation que "rien n'est impossible à Dieu" ?
Surtout, la jeune Marie pouvait mesurer à Jérusalem son incapacité de venir au secours des misères qui s'étalaient sous ses yeux. Combien son cœur compatissant a dû alors en appeler à Dieu ! Sa prière ne fut pas étrangère à la venue du Messie en la personne de... son propre fils. Voilà qui explique également son zèle à obtenir de Jésus un geste de grâce en faveur des mariés de Cana ! Ayant mesuré l'incapacité des hommes durant sa jeunesse, elle n'en devint que plus empressée à prier Jésus de guérir les infirmes qui venaient à lui de toute part.
Durant sa jeunesse à Jérusalem, pure et bien portante au milieu des pauvres et des misérables, Marie a tant ressenti son incapacité de changer le cours des choses qu'elle laissa éclater une joie surnaturelle lorsque l'Ange lui apprit qu'elle serait la mère de Celui qui rétablirait la Création dans son intégrité. Pour la jeune femme de Nazareth, le Messie n'était pas une idée abstraite lorsqu'elle se remémorait le spectacle navrant des infirmités humaines dont elle avait été témoin à Jérusalem !
De plus, initiée dès sa jeunesse à la reconnaissance et au cri de jubilation du malheureux qui, le premier plongé dans la piscine probatique, sortait libéré de sa misère physique, Marie sera cette femme eucharistique qui passera sa vie à rendre grâce au Seigneur. La proximité de cette piscine, le contact permanent avec la misère furent son école de miséricorde. La Vierge n'aura de cesse de s'identifier à tous les miraculés de l'Évangile : la veuve de Naïm, l'hémorroïsse et tout le cortège des malades des récits évangéliques. N'est-ce pas ainsi que se la représentent les pèlerins de Lourdes qui viennent la supplier devant la grotte de Massabielle ? "Je n'ai personne pour me plonger dans la piscine", dit le paralytique à Jésus. Désormais, nous avons Marie pour nous mener aux sources du salut, c'est-à-dire à son Fils.