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Pourquoi le pape François a-t-il parlé de risques de schisme ?

POPE FRANCIS IRELAND
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Xavier Le Normand - publié le 11/09/19
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“Il y a toujours le choix schismatique dans l’Église, toujours”, a affirmé le pape François le 10 septembre tout en assurant prier pour éviter de telles ruptures. Il a abordé ce sujet grave lors de la conférence de presse de retour de son voyage sur les bords de l’océan Indien.Ces propos du souverain pontife sont en réalité l’aboutissement d’un événement survenu six jours plus tôt, à bord de l’avion le conduisant vers le Mozambique, première étape du 31e voyage du pontificat. En saluant le successeur de Pierre, le journaliste français Nicolas Senèze lui offre son ouvrage Comment l’Amérique veut changer de pape, sorti le même jour. Selon le Français, une frange du catholicisme américain très opposée au pape argentin — en raison de ses critiques du libéralisme économique — a saisi l’occasion des scandales touchant l’Église catholique pour multiplier les attaques contre lui. “Pour moi, c’est un honneur que les Américains m’attaquent”, avait rétorqué avec humour le successeur de Pierre.

Voulant en savoir plus, les journalistes américains accompagnant le Pape au cours de son déplacement ont profité de l’habituelle conférence de presse tenue à bord de l’avion de retour vers Rome pour l’interroger à ce sujet. Ils ont ainsi questionné l’évêque de Rome sur sa perception de ces critiques et sur les risques de schismes qu’elles pourraient entraîner en dégénérant. Dans sa réponse, non préparée, le pape François affirme que les “critiques aident toujours” et assure y répondre le plus possible — en particulier quand la critique est “loyale” et constructive.


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Le chef de l’Église catholique n’a pas non plus éludé la question sur les possibilités de schisme. “Il y a toujours le choix schismatique dans l’Église, toujours. Le Seigneur laisse toujours le choix à la liberté humaine. Moi, je n’ai pas peur des schismes. Je prie pour qu’il n’y en ait pas parce qu’il y va de la santé spirituelle de beaucoup de gens”, a ainsi considéré le pape latino. En somme, le primat d’Italie affirme qu’il ne cessera pas d’enseigner ce qui lui semble conforme à l’Évangile — tout en écoutant les critiques — parce que certains agitent la menace d’un schisme.

La continuité de l’enseignement des papes

Selon lui, il y a risque de schisme lorsque “la doctrine ruisselle d’idéologie”, c’est-à-dire quand la doctrine catholique — aussi juste soit-elle — est soumise à une idéologie. Face à ce risque pouvant exister notamment dans les milieux ciblés par le livre de Nicolas Senèze, le chef de l’Église catholique a tenu à répondre à ceux qui considèrent qu’il serait “trop communiste”. “Les choses sociales que je dis, c’est la même que ce qu’avait dit Jean Paul II. La même chose !”, a-t-il ainsi soutenu.

Il est vrai que l’actuel évêque de Rome ne cache pas son opposition au libéralisme économique dérégulé. Dans son exhortation Evangelii gaudium (2013) par exemple, il dénonce une “économie de l’exclusion” portée par une “nouvelle idolâtrie de l’argent”. Il y dénonce “une exagération de la consommation” et y rejette les théories du “ruissellement” selon lesquels la croissance économique permet par elle-même une plus grande équité. De même, il approuve en 2008 la publication de document Œconomicae et pecunariae questiones qui dénonce un système économique et financier “parfois égoïste”.


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Par rapport à ses prédécesseurs, le pape latino emploie peut-être des mots plus clairs mais son enseignement ne fait pas rupture. Ainsi, Benoît XVI dénonçait en 2009 dans Caritas in veritate les “effets délétères” de la finance spéculative. Le pape allemand n’appelait certainement pas à moins de régulation, mais bien au contraire à une “rôle mieux ajusté des pouvoirs publics”. Dans son ouvrage, Nicolas Senèze rapporte que le philosophe américain Michael Novak avait commenté cette encyclique en considérant y avoir trouvé “beaucoup de caritas et moins de veritas“. Les critiques contre les positions des papes sur l’économie ne sont donc pas nouvelles.

Avant lui, Jean Paul II allait dans le même sens. Dans Centesimus annus (1991), le saint Pape se désole que “l’homme, saisi par le désir d’avoir et de jouir plus que par celui d’être et de croître, consomme d’une manière excessive et désordonnée les ressources de la terre et sa vie même”. Dans ce même texte, le Polonais note même que l’encyclique Rerum novarum — publiée en 1891 ! — “critiquait déjà les deux systèmes sociaux et économiques, le socialisme et le libéralisme”. Pour le Polonais, les passages critiques de cet important document “gardent leur valeur aujourd’hui”. L’Église n’a donc pas attendu son premier pape venu du continent américain pour dénoncer les puissances de l’argent et subir les foudres de celles-ci.



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