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Un joli conte pour le Nouvel An : Sylvestre et l’ange gardien

Eiffel Tower fireworks
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Ronald Barakat - publié le 30/12/17 - mis à jour le 22/12/22
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Une belle histoire pour aider ceux qui appréhendent le 31 décembre à passer le cap de la nouvelle année.

En cette fin du mois de décembre, Sylvestre rechigne à franchir le seuil de la nouvelle année. Il s’était juré de ne plus renouveler l’expérience. Il en avait même fait sa résolution. Alerté, son ange gardien dut interrompre ses vacances et lui apparaître :

– Qu’est-ce que j’apprends, Sylvestre ? Tu ne veux plus entrer dans la nouvelle année ? Tu veux bloquer le calendrier ? Arrêter le temps ?  Est-ce que c’est toi qui décides ou le patron ?

– Franchement, je suis fatigué du même scénario, de cette rebelote morbide, année après année : des conflits, des guerres, de la misère, des drames, des catastrophes… À chaque Nouvel An, j’espère une année meilleure, mais rien à faire. Le genre humain n’apprend pas, ni de son passé, ni de ses erreurs, ni de ses égarements. Il y aura immanquablement encore des morts violentes, des querelles, le plus souvent de clocher, des attentats, au nom de je-ne-sais-quel-dieu, des représailles, de l’injustice, de l’exploitation, de la pauvreté… Il faut que ça s’arrête ! J’en ai marre ! J’en ai marre ! Je ne veux plus être partie prenante dans ce fiasco planétaire.

– Quoi qu’il en soit, la décision ne te revient pas. Tu as un devoir à accomplir. Le patron ne sera pas content.

– Dis au patron que j’ai remis ma démission, et qu’il veuille bien l’accepter. Je prends ma retraite. Les candidats pour me remplacer ne manquent pas, comme ce Père Noël qui serait ravi de prendre la relève, lui qui aime tant les publicités. Lui donner un second rôle principal, à quelques jours d’intervalle, l’enchantera sûrement, surtout qu’il n’aura pas pour rival, cette fois-ci, l’Enfant de la crèche.

– Ne sois pas cynique ! Depuis quand tu portes des jugements ? Es-tu à ce point amer ?

– Tu ne vois pas l’état du monde ?

– Ne te fais pas plus royaliste que notre Roi ! Il est le premier à en souffrir, et sa miséricorde infinie le pousse à patienter, et à maximiser les chances de salut. Au lieu de bouder, tu peux aider à gagner des âmes !

– Gagner des âmes ? Moi ? Que je commence par gagner la mienne !

– Tu peux toujours faire la différence, cette année, contribuer à changer les choses, à rendre le monde meilleur…

– Moi ? Sylvestre ? Comment ? Avec quoi ? Ma baguette magique, par hasard ?

– Oui, en commençant par porter ton premier coup de baguette sur toi-même, et changer d’humeur. Sors de ta maussaderie, de ton blasement, de ta routine, de cette humeur taciturne et entre dans la nouvelle année avec entrain, gaieté, optimisme, joie de vivre. Fais ton devoir avec plaisir, dans un esprit missionnaire, par vocation et non obligation. Par ta morosité, tu apportes la guigne au monde au lieu de lui porter chance !

– Je n’en reviens pas de ce que j’entends ! C’est moi le responsable de l’état désastreux du monde ?

– Un peu, oui, sans vouloir te culpabiliser. Je suis ton ange gardien. Écoute mes conseils et tu en tireras fierté et récompense. Ressaisis-toi et fais une entrée fracassante, cette fois-ci, dans la nouvelle année.

– Que puis-je faire de spécial, en ce Réveillon ? Mon rôle a toujours été de couper le ruban pour inaugurer la nouvelle année, qui sera la même et ressemblera fatalement aux précédentes… en pire.

– Tu vois ? Toujours aussi fataliste ! Change de mentalité ! Sois positif et ta nouvelle attitude fera contagion ! Ne sous-estime pas le rôle que le patron t’a assigné et les pouvoirs qui y sont rattachés. Tu n’es pas un simple "coupeur" de ruban. Tu es investi d’un très grand privilège. Il faut savoir en jouir, en tirer le meilleur parti pour soi et pour autrui. Ce n’est pas pour rien que le Père Noël lorgne de ton côté !

– Ah ! Tu vois ! Je m’en doutais ! Que puis-je faire de différent cette fois-ci ?

– Comme je t’ai dit, y aller avec plus d’ardeur, d’enthousiasme, de désir de réussite. Tu pourrais insuffler ta bonne humeur à ceux qui en ont le plus besoin : les solitaires, les mélancoliques, les laissés-pour-compte, les malades… inspirer aux fêtards une joie plus profonde, plus durable, plus généreuse, une joie charitable. Puisque le Nouvel An est célébré entre amis, tu pourrais renforcer les liens d’amitié de sorte à les rendre plus sincères et même provoquer des rencontres entre ennemis pour en faire des amis.

À cette occasion, les "défenses" tombent et les gens sont plus réceptifs à l’amour, plus enclins au pardon. Il arrive que des inconnus se donnent des accolades dans les bars et les restos, au milieu d’une nuée de confettis et de serpentins. Il faut en profiter ! Prolonger cette atmosphère dans les esprits. Les étrennes pourraient se convertir en étreintes, plus précieuses. Pourquoi ne pas jouer avec les mots qui ont un effet magique ? Tu pourrais profiter des feux d’artifice qui accueillent la nouvelle année et invoquer l’Esprit saint pour qu’Il y mêle son propre Feu ! C’est le moment le plus propice, au moment où tous les fêtards du monde se retrouvent sous ces gigantesques parapluies crépitants !

– Un genre de Pentecôte ?

– Et pourquoi pas ? Faut-il attendre la Pentecôte pour invoquer l’Esprit saint ? Tu pourrais ramener les cœurs adultes, endurcis, à leur cœur d’origine : leur cœur d’enfant. Et même les faire battre au diapason du Cœur sacré de l’Enfant, toujours couché dans sa mangeoire si nourricière ! Tu peux faire beaucoup si tu y crois ! Il faut juste s’armer de foi, et tout l’arsenal bénéfique suivra. Et quel que soit le résultat, tu te diras au moins que tu as fait ton possible. Le patron en sera ravi et tu recevras une prime de rendement.

– Quelle prime ? On est des bénévoles ici.

– Tu deviendras "saint", pour de vrai, pour de bon !

– D’accord, par où commencer ?

– Commencer par se décrasser de sa mauvaise humeur, se vêtir de ses plus beaux atours de gaieté et d’amour et faire son entrée remarquée dans la nouvelle année, avec sa « hotte » pleine des meilleures intentions et de bonne volonté. Il te reste encore quelques heures pour te préparer. Bonne chance !

– Tu seras avec moi pour m’aider ? La tâche est énorme ! Le défi est grand !

– À présent que je suis de retour prématuré de vacances, que tu m’as gâchées, je n’ai pas d’autre choix. Mais j’espère que le sacrifice en vaudra la peine ! Ce qui devrait ajouter à ta motivation.

Effectivement, cette année fut célébrée sous de meilleurs auspices. Les festivités se prolongèrent "anormalement" sur plusieurs jours. Les citoyens de tous les pays, toutes cultures confondues, n’en finissaient pas de festoyer, contre toute habitude. Les feux d’artifice étaient plus éclatants, plus colorés que d’ordinaire. On voyait de drôles de languettes de feu tournoyer et tomber sur les fêtards. L’esprit des fêtes prit cette fois-ci une tournure très spirituelle. Les gens prolongeaient leurs accolades, des inconnus s’embrassaient, des ennemis ne l’étaient plus, des adversaires se réconciliaient, des couples brisés se raccommodaient. Les orphelinats, les asiles, les crèches et les hôpitaux étaient submergés de visites et de donations. Et, surtout, les églises étaient bondées. La nouvelle année s’annonçait plus que prometteuse.

Décidément, Sylvestre avait dépassé ses propres attentes, et son ange gardien n’en revenait pas. Ils croyaient tous deux rêver. Jamais la Saint-Sylvestre n’avait aussi bien porté son nom. Quant à Sylvestre, il avait enfin mérité sa prime : son titre de saint.

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