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Comment éprouver de la gratitude lorsqu’on souffre ?

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Mathilde de Robien - publié le 23/11/17
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Comment voir encore ce qui est beau, lorsqu’on est confronté à la maladie, à la souffrance ou à la barbarie ? Comment est-ce possible ? Comment ne pas se décourager, et rendre grâce, malgré l’épreuve ?Les études psychologiques invitent à pratiquer la gratitude en vue de notre épanouissement personnel, pour aller bien ou mieux. En revanche, elles ne traitent pas la question de la gratitude dans l’épreuve. Gratitude et épreuve semblent d’ailleurs être deux réalités antinomiques. C’est à ce moment-là qu’une démarche spirituelle peut prendre le relais, afin de continuer à remercier et louer malgré les difficultés. C’est cette démarche pleine de foi qui fait dire à Etty Hillesum, alors qu’elle est déportée à Auschwitz : « Pourtant, je trouve cette vie belle et riche de sens. »

Voir le positif dans le négatif

Le Père Pascal Ide, dans son livre Puissance de la gratitude. Vers la vraie joie, rappelle qu’en psychologie, on désigne par recadrage positif la capacité à tirer des bénéfices de l’adversité, à tirer les enseignements d’un échec ou d’une difficulté. La souffrance altère notre champ de conscience et nous focalise sur le mal subi. Une démarche volontaire de notre part peut cependant faire dévier notre regard et nous faire trouver des motifs de gratitude, en discernant le positif dans le négatif.

L’auteur donne plusieurs exemples : un enfant qui se réjouit d’une assiette non cassée alors qu’il vient de faire tomber toute la pile, Jacqueline de Romilly qui se réjouit d’avoir goûté la saveur de la compote gratinée avec du gruyère, « grâce » à ses problèmes de vue… Sur des sujets beaucoup plus douloureux, on peut parfois voir une forme de fécondité engendrée par la maladie, ou la perte d’un être cher : un message d’espérance qui touche des milliers de gens, le resserrement des liens familiaux…

Père Pascal Ide nous incite à faire de ce regard positif une habitude vertueuse, à l’instar de David Servan-Schreiber, neuropsychiatre, atteint d’un cancer du cerveau :

« Ma recette pour préserver mon capital d’optimisme, c’est de me concentrer sur ce qui va bien. Chaque jour, je passe en revue toutes les choses, grandes et petites, qui ont été agréables, qui m’ont apporté du plaisir, de la joie ou simplement de l’amusement, et j’éprouve de la reconnaissance. Je cultive consciencieusement mon sentiment de gratitude. » (On peut se dire au revoir plusieurs fois).


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Considérer nos « acquis » comme des dons

Une famille, une maison, une bonne santé, l’eau qui coule du robinet, des fruits et des légumes, de l’amour, des amis… Nous nous habituons à tout… en oubliant parfois d’y voir des dons. Le don ne nous apparaît pleinement que lorsqu’il nous manque. Soyons reconnaissants, apprenons à remercier, émerveillons-nous de ces bienfaits, plutôt que de nous comporter en enfant gâté et blasé.

« Se réjouir de ce que nous considérons comme des acquis : une famille, un toit, une bonne santé, nous fait apprécier notre vie, constate Phillip Watkins, chercheur à l’université de psychologie de Washington. Cette reconnaissance consciente nous amène à apprécier ce que nous avons, plutôt qu’à déplorer ce qui nous manque. »



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Entrer dans l’espérance

Sur le site Trilogies, le père Philippe Baud, fondateur du Centre Catholique d’études de lausanne, écrit à propos d’Etty Hillesum :

“Ce qui est extraordinaire chez Etty Hillesum, c’est cette capacité de voir la vie tout entière comme un don : tout ce qui arrive lui apparaît comme avoir un sens, être un cadeau. Ce n’est pas qu’elle ne veuille pas voir le mal, mais elle le regarde “autrement”. Au milieu des barbelés, elle écrit : “Au fond de mon cœur il y a encore le soleil des jours d’été dans la lande et le champ de lupins jaunes qui s’étendait jusqu’à la baraque d’épouillage…”.

Heureuse de cette perception de l’invisible, elle en devient rayonnante et les autres en témoignent. Ce faisant, elle incarne une forme d’espérance qui lui fait voir, sinon la réalité du « Royaume », du moins sa vérité. Car, lucide, Etty Hillesum n’a aucun espoir, mais incarne l’espérance. Elle vit dans le présent et le prend comme un cadeau, tout en étant parfaitement lucide vis-à-vis de la situation historique dans laquelle elle évolue.

L’espérance consiste à croire que tout n’est pas perdu quand, à vues humaines, il n’y a plus aucun espoir. L’espérance se situe hors de l’action, puisqu’il n’y a plus rien « à faire ». Elle reconnaît son absence de moyens, son impuissance, mais affirme une issue invisible en dépit des apparences. L’espoir s’inscrit dans un monde linéaire que l’on croit maîtrisable, tandis que l’espérance se déploie dans un temps où l’éternité fait irruption. »

 

Faire preuve de gratitude, c’est rendre amour pour amour. C’est aimer Dieu, le donateur ultime de toutes choses, et c’est garder toujours l’espérance de la vie éternelle, ultime cadeau qu’Il offre à chacun de nous.

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