L’exposition “Chrétiens d’Orient : 2 000 ans d’histoire”, organisée à l’Institut du monde arabe du 26 septembre 2017 au 14 janvier 2018, retrace l’histoire des différentes communautés chrétiennes de l’Égypte à l’Irak. Et prouve que, malgré les menaces, elles ne sont pas près de mourir.L’exposition s’ouvre sur un miracle : la marche sur les eaux de Jésus et de Pierre. On y voit Jésus sur l’eau, aux côtés d’un Pierre hésitant auquel il tend la main, rejoindre la barque des apôtres. Une traversée du lac de Tibériade qui a le mérite de planter immédiatement le décor en Terre sainte, au milieu de la zone géographique retenue pour “Chrétiens d’Orient : 2 000 ans d’histoire” de l’Irak à l’Égypte.
Tronquée, dans un style primitif, la scène est peinte sur une fresque de Doura-Europos, en Syrie, en 232, à une époque où la religion chrétienne était interdite. Les chrétiens devaient alors se réunir dans des lieux privés afin de vivre leur foi — des domus ecclesiae. L’occasion de rappeler au visiteur que vivre sa religion caché n’a rien de nouveau pour un chrétien d’Orient. C’est aussi une première en France — la fresque n’était jamais sortie des États-Unis jusqu’à présent — qui annonce le reste des œuvres exposées : des trésors, inédits, témoins d’une histoire qui remonte aux origines du christianisme lui-même.
Très vite, dès la salle suivante, apparaît le visage lumineux d’un christianisme libre, celui d’après l’édit de Milan, signé en 313, qui autorise la liberté de culte à toutes les religions, celui d’une foi vécue librement, à la vue de tous. Place à la construction d’églises, symbolisée ici par l’installation de mosaïques et de chapiteaux provenant d’églises libanaises et syriennes, ainsi que par la présentation d’objets liturgiques rares et extrêmement bien conservés. Preuve en est ce calice syrien datant du VIe ou VIIe siècle :
C’est à ce moment-là que se constituent les églises orientales — qui peinent à s’accorder sur la nature divine ou humaine du Christ — et le monachisme dans la foulée, auquel est consacré une salle entière, qui se focalise sur la Syrie et l’Égypte. À la présentation d’un habit de moine, vide, les bras tendus, fait face une vidéo d’une messe copte dans le même monastère, l’an dernier. Comme pour montrer que les reliques exposées ne sont que les supports d’une histoire qui continue, imperturbable, depuis deux mille ans.
Au loin déjà se font entendre des chants arabes, syriaques, coptes qui émanent d’une salle circulaire où sont présentés des manuscrits prêtés par diverses Églises orientales. Un contraste saisissant : les chants d’une intensité rare donnent vie aux évangéliaires millénaires, tandis que saint Ephrem, Syrien à l’origine de la plupart des hymnes syriaques, veille sur les visiteurs, du fond de la salle, paisiblement.
Des pièces originales parviennent à montrer les relations qu’ont pu entretenir chrétiens et musulmans. Parmi les plus étonnantes, un folio d’un Évangile syriaque irakien du XVe siècle, illustrant le baptême de Jésus-Christ par Jean-Baptiste, dans un style oriental, marqué par l’influence musulmane :
Passe alors l’Empire ottoman et avec lui l’ouverture à l’Occident et l’arrivée de l’imprimerie arabe — d’abord au Liban puis dans tout le reste du Moyen-Orient — pour arriver à la dernière partie de cette histoire bimillénaire, sobrement intitulée “Être chrétien dans le monde arabe d’aujourd’hui”.
Là où l’on s’attendrait à voir finir l’exposition sur les drames vécus par les chrétiens d’Orient depuis quelques années, s’affichent une série de photos. Celles d’un couple égyptien notamment et de son amour, ses craintes mais surtout ses espérances, qui pose dans un champ de ruines. En parallèle de ces photos, un livre : 300 pages de témoignages recueillis par Vincent Grelot, parti en voyage pendant deux ans à la rencontre des communautés chrétiennes d’Orient. La preuve écrite que ces chrétiens sont encore bien vivants, malgré tout — la conquête musulmane, l’Empire ottoman, les guerres, le terrorisme. Le miracle des chrétiens d’Orient ?
Informations pratiques :
Institut du monde arabe, 1 rue des Fossés Saint-Bernard 75005 Paris
Ouvert du mardi au vendredi de 10 heures à 18 heures et samedi, dimanche et les jours fériés de 10 heures à 19 heures. Fermé le lundi.
Plein tarif : 12 euros, tarif réduit : 10 euros.
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