« Vous ne pouvez pas servir à la fois Dieu et l’Argent » (Mt 6, 24). Cette parole de Jésus n’a peut-être jamais été aussi pertinente qu’aujourd’hui, à une époque où le consumérisme a élevé l’argent au rang de divinité. Il suffit de se rappeler combien les temples de l’argent - les hypermarchés - ont reçu de fidèles lors des fêtes de Noël. Ces derniers y étaient plus nombreux que dans les églises le soir de la fête de la Nativité. On peut aussi penser aux Bourses des capitales économiques qui ont tout soumis au règne de l’argent. Il participe au premier chef à ce que saint Jean Paul II appelait la « structure de péché » dans lequel notre monde est engoncé. Cette question est de tous les temps, évidemment. Elle renvoie au vœu de pauvreté que tout chrétien est appelé à prononcer. Les moines et les religieux sont là pour le rappeler : faire le choix radical de Dieu, c’est faire le choix de la pauvreté. Mais attention : pauvreté n’est pas misère !
Une belle résolution de carême
La misère, c’est souffrir du manque de nécessaire. La pauvreté, c’est le choix de ne vivre que du nécessaire pour que personne ne soit lésé. « À l’affamé appartient le pain que tu gardes, à l’homme nu le manteau que tu conserves dans tes coffres, au va-nu-pieds la chaussure qui pourrit chez toi, au besogneux l’argent que tu conserves enfoui. Ainsi tu commets autant d’injustices qu’il y a de gens à qui tu pourrais donner », disait au IVe siècle saint Basile de Césarée (Homélie VI, VII).
La pauvreté, ce n’est donc pas de ne pas avoir d’argent. Ni même de ne pas gérer les sommes inimaginables qui circulent dans le monde. Il est d’ailleurs excellent que des chrétiens acceptent d’être dans ces rouages dangereux. Mais il s’agit, pour soi comme pour les siens, de faire le choix de la pauvreté, de sorte que l’argent soit rendu disponible à ceux qui en ont besoin afin qu’ils ne vivent pas dans la misère. Durant ce temps de carême ce choix peut devenir une belle résolution à suivre (et à poursuivre après Pâques). Mais attention, pour cela, les bonnes intentions ne suffisent pas. Il faut faire le choix de Dieu, un choix non négociable.
Père Alain Dumont