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Comment être un bon père lorsqu’on travaille beaucoup ?

Father; Son; Goodbye ; Work;
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Edifa - publié le 22/08/20
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Entre les réunions, les déplacements professionnels et divers engagements, certains pères peinent à trouver du temps pour leurs enfants. Comment éviter que ces derniers pâtissent de ces absences ? Quand on est un homme très occupé, comment transmettre des repères à ses enfants ? Le psychanalyste Jacques Arènes aide les pères à passer plus de temps avec leurs enfants et souligne l’importance d’accueillir leur différence, voire leur fragilité.

On connaît le risque de projection des parents qui n’ont pu accomplir leur ambition professionnelle. Est-ce vrai pour le père qui a « réussi sa vie » ?
Jacques Arènes : Il existe des trajectoires étonnantes, des coups de génie, des bourreaux de travail. Certains hommes vivent leur engagement comme une vocation et ne comprennent pas que les autres ne fonctionnent pas de la même façon. Ils peuvent avoir un côté écrasant. Et un autre, aussi, très attirant. Dans tous les cas, le père veillera à établir une barrière entre sa vie publique et sa vie privée, de manière à n’être pas seulement un homme public aux yeux de ses enfants.

Lorsque le père a une forte personnalité, de quelle façon peut-il transmettre ses convictions à ses enfants sans les écraser ?
Il est des intelligences qui brassent beaucoup d’air ou qui n’arrivent pas à accepter des points de vue contradictoires. On peut très bien être volontaire, très décidé, et pour autant attentif à la différence de l’autre. Le problème n’est donc pas tant d’avoir une forte personnalité, il s’agit plutôt de laisser sa place à l’autre et à sa fragilité. Ceci est possible lorsqu’on connaît et qu’on accueille sa propre fragilité. Si l’on ne se considère pas comme « arrivé », si l’on est capable de se remettre en cause.


FATHER
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Pas besoin de grands discours : le père transmet aussi par ce qu’il est. Par son attention aux autres, en veillant à ne pas dénigrer les centres d’intérêt de son enfant, en s’employant à rester ouvert au dialogue, capable de répondre à des questions sans invoquer toujours l’argument d’autorité. Paradoxalement, il transmet aussi beaucoup par l’écoute.

Justement, comment prendre le temps d’écouter lorsqu’on ne voit pas ses enfants de la journée ? La qualité du temps passé ensemble durant le week-end suffit-elle ?
L’accord entre les conjoints sur l’équilibre trouvé s’avère primordial. Même si ces temps sont restreints, la disponibilité est essentielle. On peut être un cadre très pris et rester disponible. C’est une forme de liberté intérieure, de disposition d’esprit. Au père d’offrir un temps où il est réellement présent. L’enfant ressent très bien la présence à l’autre. Pour certains hommes, la vie ne semble pas intéressante en dehors de leur vie professionnelle. Cela étant, la quantité joue un minimum. Et ce minimum varie d’un enfant à l’autre, selon son caractère et son âge. Il n’est pas nécessaire d’offrir la même chose à chacun : certains ont besoin de temps, d’autres, au contraire, qu’on les « lâche ». Aux parents d’évaluer et d’expliquer : « Vous êtes différents, vous n’avez pas la même histoire, chacun a ses propres besoins, etc. ».

Pour pallier leur absence, certains pères privilégient des « temps forts », rares mais intenses. Qu’en pensez-vous ?
Il faut que ce temps fort ait du sens, que ce ne soit pas l’invention d’une connivence qui n’existe pas au quotidien. Qu’il s’agisse d’une passion partagée et non d’un choix paternel unilatéral.


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Chef de groupe scout, responsable d’association… Comment éviter que l’enfant pâtisse de ces engagements ?
Pour commencer, le couple doit être d’accord. Si l’un des conjoints est négligé au profit des engagements de l’autre, l’enfant a conscience de ce déséquilibre. Par ailleurs, des activités très nobles peuvent être une forme de fuite. Mais pas toujours. Cela se vérifie selon le critère de dépendance : peut-on s’en passer, s’arrêter ?
On a toujours d’excellentes raisons d’être indispensable. Reste à savoir qui choisit-on de faire passer en premier : notre engagement ou notre famille ? Une bonne question à se poser : « Si mon fils ou ma fille demande à me parler, suis-je prêt à laisser tomber une réunion ? »

Et si l’on ne peut pas annuler sa réunion ?
Si ce n’est pas possible, pourquoi ne pas prendre un rendez-vous ? Pourvu que ce soit avec plaisir et non comme une contrainte supplémentaire. Lorsque le père débordé arrive à coincer un horaire dans son agenda, il témoigne de son envie d’offrir du temps. Et l’enfant est touché par cette volonté. Mais la clé pour le père reste la souplesse et l’adaptabilité. Où, sinon en famille, vivre la gratuité avec bonheur ? L’enfant est aussi sensible à la cohérence des adultes. Si son père dépense son temps sans compter pour ses divers engagements et ne prend pas celui d’accompagner les devoirs scolaires, il a tôt fait de mettre le doigt sur les dysfonctionnements !

Comment réagir lorsque l’enfant rejette les valeurs qu’on essaie de lui transmettre ?
Certains enfants sont comme des Martiens pour leurs parents ! On est spontanément plus proche de l’un ou de l’autre, simplement parce qu’on fonctionne de la même façon. On met davantage de temps à comprendre ceux qui sont plus différents de nous. Mais c’est une occasion de dialoguer. Il faut être humble et avouer : « Je m’inquiète, je ne te comprends pas ce que tu fais, ce que tu vis, je n’imaginais pas cela pour toi » Peut-être est-ce aussi l’occasion de se remettre en cause : « Qu’est-ce que je souhaite vraiment pour mes enfants ? Suis-je plus soucieux de l’apparence extérieure de la réussite ? Où est l’essentiel ? Existe-t-il une seule voie pour l’atteindre ? »


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Qu’apporte de spécifique un père à l’enfant ?
Le père est un « étranger intime ». Il apporte à la fois une grande proximité et quelque chose d’extérieur. Il est proche par son amour, ses caresses, ses jeux, ses encouragements. Il donne confiance. Mais il sort aussi l’enfant de lui-même, l’invite à prendre des risques. Il lui insuffle le désir de se dépasser et de s’ouvrir au monde.

Un dernier conseil aux pères de famille ?
Qu’ils dé-cul-pa-bi-li-sent ! Qu’ils ne s’en veuillent pas de manquer de temps ou de se trouver maladroits avec leurs jeunes. Les pères d’aujourd’hui sont globalement plus proches de leurs enfants. Ils s’intéressent davantage à leur vie, à leurs études. Je leur souhaite de savoir observer la relation qu’ils entretiennent avec chacun d’eux. Et d’en prendre soin par des moyens très simples : en posant une question, en invitant au restaurant ou au cinéma. Ces petits moments partagés créent des affinités particulières avec chacun !

Propos recueillis par Stéphanie Combe

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