"À chaque fois que des fiancés viennent me voir, m’a dit un jour un prêtre, je leur laisse ces trois “P” : Parler, Pardonner, Prier". Un programme de vie conjugale qui tient en trois mots, comme les trois piliers de l'amour. Parler, pardonner, prier. Ces trois mots peuvent constituer de nombreux points de repère pour nous aider à avancer dans notre couple, nous interroger et faire le point : où en sommes-nous de la communication entre époux ? Ne reste-t-il pas des pardons à donner ? La prière est-elle au cœur de notre vie ?
Parler
Nous savons tous que l'on peut parler pour ne rien dire, et que la communication dans le couple n'est pas proportionnelle au nombre de paroles échangées. En témoigne le cas extrême de certains couples où l'un des conjoints ne peut plus parler, à cause d'une maladie ou d'un accident, et qui, pourtant, communiquent en profondeur. Pour que la parole soit au service de l'amour, il faut commencer par écouter l'autre.
"C'est le manque d'écoute qui a supprimé le dialogue"
Beaucoup de couples se plaignent du manque de dialogue, mais peu de l'absence d'écoute. Or, c'est le manque d'écoute qui a supprimé le dialogue : à peine l'un a-t-il ouvert la bouche que l'autre, sachant ce qu'il va entendre, prend un air agacé avant la fin de la phrase. On cherchera alors un autre sujet d'échange, puis un autre, etc., jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus. On tombera dans l'anonymat et dans un silence pesant n'ayant rien de commun avec l'écoute du cœur.
C'est en reprenant le temps de goûter cette présence l'un à l'autre que pourra surgir un mot d'amour, puis l'échange sur un sujet peut-être difficile, mais acceptable au creux de l'amour. Et ce sera le partage retrouvé. Pour se parler, il faut du temps. Il faut savoir « perdre du temps » à bavarder de choses et d'autres, prendre le temps d'être vraiment disponible à son conjoint. Entre époux, on ne prend pas rendez-vous pour parler des sujets les plus graves... Cela vient souvent de manière imprévue, au fil des mots, parce qu'on a pris le temps de s'apprivoiser par une écoute réelle.
Pardonner
On peut appliquer au mariage ce que Jean Vanier disait de la vie communautaire en général : « Si on entre dans une communauté sans savoir qu'on y entre pour apprendre à pardonner et à se faire pardonner soixante-dix-sept fois, on sera vite déçu ». Il est probable que beaucoup de divorces viennent de ce que la plupart des fiancés ne réalisent pas du tout que le mariage est sans doute le lieu où l'on a le plus de pardons à donner et à recevoir. Beaucoup imaginent au contraire que « l'amour, c'est n'avoir jamais à dire qu'on est désolée », disait Erich Segal dans « Love Story ». Lorsque surgissent des griefs - et il en surgit tôt ou tard, justement parce qu'on s'aime et que l'amour rend vulnérable -, les époux commencent par faire semblant de ne pas les voir et finissent par penser qu'ils ne s'aiment plus.
Le pardon n'est pas un échec de l'amour, c'est même exactement le contraire : c'est le signe d'un amour vrai. Je me souviens d’un prêtre qui en regardant un vieux couple se promener main dans la main s'émerveillait : « Un amour qui dure ainsi, ça représente des centaines et des centaines de pardons échangés ! ».
Prier
Un couple d'une cinquantaine d'années reçut un jour ce conseil : « Tous les soirs, sans exception, dites un Notre Père et un Je vous salue Marie ensemble, main dans la main, pour offrir votre journée à Dieu, ainsi que la nuit pour un bon repos ». Un peu sceptique devant une demande aussi simple, le mari accepta néanmoins de prier ainsi avec son épouse.
Et quelques années plus tard, il témoignait : « Notre couple est transformé. C'est dû en grande partie à ce temps si court mais fidèle ensemble devant Dieu et pour Dieu. C'est à cet abandon de nous-mêmes dans la main de Dieu que nous devons toute la simplicité que nous avons maintenant dans notre vie de couple ».
Beaucoup de couples n'arrivent pas à prier ensemble parce qu'ils adoptent des résolutions inapplicables à long terme. Pour prier ensemble - et pour durer dans la prière conjugale -, il ne faut pas chercher des choses très compliquées : quoi de plus simple que de réciter un Notre Père et un Je vous salue Marie ? Ce n’est presque rien, et ça change tout. Parce que ce « presque rien » est comme les cinq pains et les deux poissons de l'Évangile : le Seigneur le multiplie à l'infini.
Christine Ponsard