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La championne de para tennis Diede de Groot, 3 septembre 2024.

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Agence I.Media - publié le 28/10/24
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Retrouver ici notre dossier sur le voyage du pape François au Luxembourg et en Belgique.

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Durant son voyage en Belgique, du 26 au 29 septembre 2024, le pape François visitera deux universités, la Katholieke Universiteit Leuven et l'Université catholique de Louvain. Mais ces deux entités, qui fêtent leurs 600 ans, n’en formaient qu’une, avant une scission mémorable en 1968. Pour Vincent Delcorps, docteur en Histoire et directeur de la rédaction du site d’information catholique belge francophone CathoBel, le « cas » Louvain est une illustration de la réalité belge, notamment en ce qui concerne les relations entre les deux langues du pays.

Dans cet entretien avec I.MEDIA, l’universitaire et journaliste évoque l’histoire des deux universités, ainsi que la situation que trouvera le pape François sur place, dans une société fortement sécularisée très critique vis-à-vis de l'Église catholique.

Dans quelques jours, le pape visitera deux universités, à Leuven puis à Louvain-la-Neuve, deux entités catholiques distinctes qui n’étaient qu’une seule réalité pendant des siècles. Pouvez-vous nous parler de l’histoire de ces établissements prestigieux qui accueillent aujourd'hui 65.000 (à Leuven) et 40.000 (à Louvain-la-Neuve) étudiants ?

L’université de Louvain a été créée en 1425 dans ce qui était alors le Duché de Brabant. À ce moment-là, la Belgique n'existe pas encore en tant que telle – elle ne deviendra indépendante qu'en 1830 –, ni la ville de Louvain-la-Neuve. Seule existe la ville de Louvain – que nous appelons aujourd’hui Leuven. Le duc de Brabant et le pape Martin V concluent un accord pour créer une université, érigée par une bulle papale. Le rôle de la papauté est bien connu dans le développement des universités. À noter qu’au départ on ne parle pas de l'université catholique de Louvain, mais seulement d'université de Louvain.

Plus tard, cette université va disparaître pendant plusieurs années, dans les suites de la Révolution française : lorsque les provinces belges sont rattachées à la France, l'université est supprimée en 1797. Après la défaite de Napoléon, lorsque les provinces belges sont réunies aux Pays-Bas au congrès de Vienne (1815), Guillaume II, le nouveau souverain, qui est protestant, va créer une université d'État, à Leuven. Puis, après l’indépendance belge, les évêques de Belgique, qui jouent un rôle très important à ce moment-là dans la société, veulent créer à nouveau un établissement catholique. Ils l’établissent à Malines, en 1834. Dès l’année suivante, l'université d'État de Louvain est supprimée, tandis que l'université catholique de Malines emménage à Louvain, devenant l’Université catholique de Louvain.

Et 130 ans plus tard, en 1968, cette université se scinde en deux… Comment en est-on arrivé là ?

Cet épisode est symptomatique de deux dimensions importantes de l'histoire de Belgique : d’une part les liens entre l'Église et la société, et d'autre part les liens entre les deux grandes communautés linguistiques du pays.

À partir du XIXe siècle, la langue des élites en Belgique est le français. Au Parlement, au gouvernement, à l'université, le français est la langue de référence, y compris en territoire flamand, comme c’est le cas de Louvain. Mais avec le temps, un mouvement de protestation flamand va se structurer. Parallèlement, les langues néerlandaise et française vont progressivement s’imposer, successivement au nord et au sud du pays.  

Le centre de gravité du pays va basculer dans les années 60 : les Flamands commencent à avoir plus de poids que les francophones à tous niveaux, sur les plans démographique, politique, économique. Le mouvement revendique le respect de ce qu'on appelle « le droit du sol » : si on est en territoire flamand c'est le néerlandais qu'il faut parler.

Comment cela s’est-il joué dans le cas particulier de Louvain ?

Dans l'université de Louvain, de plus en plus de Flamands réclament le départ des francophones, sous le slogan « Walen buiten » – les Wallons dehors. Cela crée une grande tension jusqu’au sein de l'Église belge, car les évêques font partie du pouvoir organisateur, et le recteur est encore un prêtre. En 1966, l’épiscopat publie une prise de position défendant une seule université, mais la pression ne va cesser d'augmenter. L’affaire devient très politique, agitant le Parlement. Le Parti social-chrétien, qui est largement majoritaire en Flandre à l’époque, est lui-même divisé sur cette question.

Deux ans plus tard, en 1968, la pression est devenue trop forte : l’Université est scindée. L’épiscopat se montre alors lui-même divisé. Et dans la foulée, le Parti social-chrétien va aussi se scinder en deux, signe que la question dépasse largement le cas de l’Université. Le monde flamand et le monde francophone sont aujourd’hui des réalités assez différentes en Belgique, et la cohabitation n’est pas toujours simple…

Concrètement, comment la scission de l’université s’est-elle réalisée ?

La partie néerlandophone va rester sur place, tandis que la partie francophone va emménager progressivement dans le courant des années 1970 dans une nouvelle ville créée à quelques dizaines de kilomètres : Louvain-la-Neuve. Elle est construite au milieu des champs, sur le territoire de la commune d’Ottignies. Rétrospectivement, force est de constater que ce fut une bonne chose pour la région : Louvain-la-Neuve va largement contribuer au développement intellectuel, culturel et économique du Brabant wallon, et de toute la Wallonie.

Mais le divorce est éprouvant. On peut citer le fameux épisode des livres divisés dans les deux bibliothèques, qui ne s’est pas fait selon une logique thématique ou scientifique mais selon une logique numérique, les cotes paires d'un côté, les cotes impaires de l'autre.

Reste-t-il aujourd'hui des blessures entre Leuven et Louvain-la-Neuve ?

Le divorce est vraiment de l'histoire passée. Désormais ces deux universités sont de véritables partenaires. Tant sur le plan de la recherche que de l’enseignement, de nombreuses collaborations existent. Par ailleurs, ces dernières années, les signaux de bonne entente se sont multipliés au niveau des autorités rectorales. En 2017, les deux communes ont instauré un jumelage. En 2018, a eu lieu la première mission commune à l’international, à Boston, et le lancement d’un projet de numérisation de l’ancienne bibliothèque pour reformer un nouvel ensemble commun. En 2024, la remise des insignes doctorats honoris causa était commune, et le sera aussi l’an prochain.

Quant à la présence de l’Église catholique, a-t-elle évolué ces dernières années au sein de l’UC Louvain ? Les deux universités ont-elles gardé une identité catholique ? Quelle réalité le pape François trouvera-t-il ?  

En 1830, les catholiques étaient une des forces vives du royaume, notamment dans les domaines de l’enseignement ou de la santé. La devise de la Belgique – l'Union fait la force –, choisie au moment de la création du pays, ne désigne pas l'union entre les francophones et les Flamands comme on pourrait le penser aujourd'hui, mais entre les catholiques et les libéraux. Avec le temps, le poids de l'Église va fortement diminuer, y compris à l’Université catholique de Louvain. Le premier recteur laïc de l’université (francophone) de Louvain a été nommé en 1986 et depuis, on a constaté une distanciation croissante, même si l’université a gardé l’appellation « catholique » dans son nom (UCLouvain). D’ailleurs dans les sujets qui seront discutés pendant la visite du pape à Louvain-la-Neuve, d’après le programme, on ne va pas parler d'Église mais de transition, d'enjeux écologiques, de féminisme...

En Flandre, le rejet de l'Église catholique est encore plus appuyé, notamment puisque l’Église était beaucoup plus puissante en Flandre qu'en Belgique francophone. La crise des abus sexuels y a eu un retentissement beaucoup plus fort. De manière générale, la Belgique francophone montre davantage d'enthousiasme pour la venue du pape que la partie flamande.

L’accueil réservé à François pourrait-il être froid dans ces hauts lieux de la culture et de l’enseignement ?

François est sans doute très conscient du terrain particulier dans lequel il va arriver et ce n’est pas un terrain très favorable. Il suffit de citer une anecdote : lors de la visite de Jean-Paul II en 1985, une étudiante avait prononcé un discours un peu critique notamment sur la position du pape polonais concernant la place des femmes et la théologie de la libération. La jeune fille s'était fait huer et avait été exclue de l'université par le recteur. Trente ans plus tard, on a presque le sentiment que c'est la rectrice de l’UCLouvain elle-même qui veut marquer ses désaccords et interpeler l’Église catholique. C’est un changement majeur. Jean-Paul II était accueilli en héros dans une université qui était encore très catholique. François arrive en Belgique dans un pays très sécularisé, et dans deux universités catholiques qui sont en questionnement par rapport à leur identité. Mais il est prévenu. Et je crois que l’on sera très attentifs à ses paroles. 

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